Allez plus haut avec le skyrunning
Si les trails ont lieu tout au long de l’année, les courses de skyrunning interviennent uniquement durant les beaux jours, lorsque les sentiers d’altitude sont praticables. Des épreuves très techniques, avec beaucoup de montées et de descentes à des altitudes où l’oxygène vient à manquer, et qui demandent des qualités particulières. Sans chambouler votre préparation habituelle, la base de cet entraînement spécifique repose sur le renforcement musculaire des jambes : celui des quadriceps pour ne pas trop souffrir en descente et celui des muscles postérieurs pour carburer en montée. Voici les bonnes techniques pour se préparer à « courir dans le ciel », et les conseils d’un pro de la discipline, Sylvain Cachard, champion d’Europe de course en montagne en titre.
Skyrunning : courir dans le ciel
Si au cours du XXème siècle des guides de haute montagne ont pris l’habitude de se confronter sur des ascensions en haute altitude, c’est à un alpiniste italien, Marino Giacometti, que revient la paternité du skyrunning. En 1992, il définit les règles de la discipline (« Un sport qui se déroule en haute altitude et consiste à courir dans le ciel »), organise les premières courses sur le Monte Rosa (en Italie) et sur le Mont Blanc, puis met sur pied l’année suivante le premier circuit de skyrunning officiel. Le succès est immédiat, et Giacometti fonde dans la foulée la FSA (Federation for Sport at Altitude), puis atteint une forme de consécration en organisant les premiers championnats du monde en 1998 à Cervinia, en Italie.

Quatre ans plus tard, la FSA lance la Skyrunner World Series, un circuit mondial regroupant différentes épreuves de montagne existantes, dont entre autres la mythique course suisse de Sierre-Zinal. Peu à peu, le calendrier du circuit s’étoffe, intégrant quasiment exclusivement des épreuves de skyrunning, avec notamment la 6000D en France, le marathon de Pikes Peak aux États-Unis, la Dolomite SkyRace en Italie ou encore la fameuse boucle de Zegama-Aizkorri au Pays Basque.
Depuis, la discipline s’est encore plus développée sous l’égide de la Fédération Internationale de Skyrunning, créée en 2008 par l’infatigable Marino Giacometti, donnant naissance à des circuits de course très relevés partout dans le monde.

Skyrunning : une discipline qui tutoie les sommets
Si l’expression « courir dans le ciel » revêt un caractère poétique qui incite à l’évasion et la liberté, le skyrunning n’en reste pas moins une discipline très codifiée, dont les spécificités sont bien définies par différentes instances, ce qui lui permet de se démarquer des autres disciplines proches que sont la course en montagne et le trail. Ainsi distingue-t-on la course en montagne, qui se déroule en milieu montagnard avec une altitude maximale de 3 000 mètres, pouvant comprendre de courts tronçons de bitume (pas plus de 20 % de la distance totale) et donc la pente moyenne doit être comprise entre 5 % et 20 %.
Le trail, de son côté, ne se pratique pas qu’en montagne, emprunte des sentiers et des chemins de terre, avec des portions de bitume possibles, et ses épreuves sont classés en fonction de leur distance, de trail découverte pour les parcours de moins de 20km à ultra-trail au-delà de 80km, avec des dénivelés pouvant dépasser les 3000 mètres.
Enfin, selon le Ministère des Sports français, le skyrunning, version extrême de la course à pied en montagne, doit se dérouler de préférence à une altitude supérieure à 2000 mètres, et pouvant dépasser les 4000 mètres, comme le marathon de Pikes Peak, dans le Colorado, dont l’arrivée se situe à 4302m !

Ne pas confondre skyrunning et escalade
Les tronçons sur bitume doivent représenter au maximum 15 % de la distance totale, et au moins 5 % du parcours doit avoir une pente supérieure à 30%. Dernier point, et non des moindres : les parcours, techniques et exigeants, peuvent inclure des tronçons à effectuer à l’aide de cordes, voire des passages courts en via ferrata ou dans des zones « hors piste » où il n’y a pas de sentier.
Attention cependant, il ne faut pas confondre skyrunning et escalade. La difficulté d’escalade ne doit d’ailleurs pas dépasser le deuxième degré (soit une progression en marchant avec éventuellement les mains pour s’équilibrer ou négocier le terrain). Enfin, selon le règlement établi par la Fédération internationale de skyrunning, les épreuves peuvent passer à travers des pierriers, sur des glaciers ou de la neige. Et pour les épreuves organisées en des endroits où le relief ne dépasse pas 2000 mètres d’altitude, le parcours doit atteindre les sommets locaux les plus élevés.
Les 3 disciplines du skyrunning
On considère qu’il existe 3 catégories d’épreuves de skyrunning, globalement définies par la longueur du parcours.
– Pour la première, le format Sky, la distance de l’épreuve doit être comprise entre 20 et 49 kilomètres, avec au minimum 1200 mètres de dénivelé positif. Les épreuves se tenant à plus de 4000 mètres peuvent être plus courtes, mais doivent au moins faire 10 kilomètres.
– La seconde, la plus longue, est le format SkyUltra. La distance de l’épreuve doit être comprise entre 50 et 99 kilomètres avec au minimum 3000 mètres de dénivelé positif. Le temps de course ne doit pas dépasser 16 heures.
– Dernière catégorie, le format Vertical, aussi appelé Kilomètre Vertical ou KV. Le dénivelé doit être de 1000 mètres pour une distance maximale de 5 kilomètres. La pente moyenne doit être supérieure à 20%, et au minimum 5% du parcours doit avoir une pente supérieure à 33%.

Entraînement skyrunning : de la pente spécifique
Vous l’aurez compris, le skyrunning est une histoire de pente. Et il n’y a pas de secret : pour aller plus vite en grimpant, il va vous falloir avaler des côtes. Autrement dit multiplier les séances de dénivelé. Deux sorties hebdomadaires en pente sont un minimum quasi vital pour espérer des progrès conséquents, surtout pour les épreuves de plus de 20 kilomètres. L’objectif est de gagner en force et en tonicité, mais également d’améliorer le geste technique.
En outre, ce type d’exercices très ciblés va aussi jouer sur le système cardio-vasculaire. L’effort sera donc assez intense, mais profitable, et pas seulement pour le trail. Attention, car au-delà de deux séances hebdomadaires, le rapport bénéfices/risque de blessures devient défavorable au coureur. En période de compétition, une seule séance de côte par semaine est suffisante. Dans la mesure du possible, essayez de varier les entraînements, une séance de côtes courtes mais intensives et une séance basée sur la longueur (le week-end).

Entraînement skyrunning : ne négligez pas le vélo
Que ce soit sur route ou à VTT, le vélo est un plus, indéniablement. Il représente un moyen de limiter les traumatismes, tout en travaillant le cardio et le renforcement musculaire des jambes, avantage certain pour le dénivelé. Il suffit d’observer des jambes de traileurs pour s’en convaincre. Deux types d’exercices sont envisageables : un travail pour développer la puissance de base, composé de sessions courtes et de gros braquets (30 secondes à 1 minute), sur 2 heures maximum ; un deuxième type de séance en pente, avec un enchaînement de cols (3 heures maximum) ou sur un parcours plat, mais en emmenant un gros braquet.
Entraînement skyrunning : renforcement musculaire et gainage
Musculation spécifique, gainage, PPG (préparation physique générale) et pliométrie, les exercices sont différents, mais l’objectif est le même : améliorer sa gestion du dénivelé, et mieux résister en descente. Difficile de détailler tous ces exercices, ils sont nombreux. Rapprochez-vous d’une salle de sport pour travailler les squats, le gainage abdominal, le renforcement musculaire ou l’explosivité. L’objectif d’exercices en pliométrie, par exemple, est d’augmenter la capacité à produire un mouvement plus puissant et plus rapide, les séances sont donc centrées sur des exercices d’explosivité et de vitesse d’exécution, un peu comme pour les sprinteurs (projeté, élévation).
Entraînement skyrunning : le week-end choc, un vrai plus
L’objectif est de concentrer sur un week-end toute une série d’entraînements plus ou moins intenses pour provoquer un phénomène de surcharge qui se transformera, quelques semaines plus tard, et après repos, en surcompensation, et donc en progression. Si, par exemple, vous avez l’habitude de courir 800 mètres de dénivelé positif (D+) lors de votre sortie dominicale sur 2h30, vous pouvez envisager deux sorties de 3 heures le samedi et le dimanche avec de 1000 mètres de D+. L’organisme sera alors en état de « choc », il va développer sa capacité d’adaptation en côte. Essayez de choisir des lieux et des parcours reproduisant le plus possible les conditions réelles de course.
Entraînement skyrunning : les conseils de Sylvain Cachard, champion d’Europe de course en montagne
S’il excelle en course en montagne, Sylvain Cachard n’en est pas moins performant en skyrunning. Vainqueur en 2022 de la Skyrace des Matheysins, l’une des deux épreuves françaises de la Skyrunner World Series, avec le record de l’épreuve à la clé, il vous livre quelques conseils pour mieux « courir dans le ciel ».

Y a-t-il des domaines spécifiques à travailler pour être performant en skyrunning ?
Sylvain Cachard : Je considère qu’il faut partir sur une base commune à toutes les pratiques de la course à pied outdoor, que ce soit course en montagne, trail ou skyrunning. J’ai une vision assez triathlète de ce sport, c’est montée, plat, descente. Il faut être le plus complet possible dans les 3 disciplines.
Quels sont les autres facteurs à prendre en compte ?
SC : Il faut rajouter les contraintes extérieures. Il y en a 2 que l’on redoute particulièrement en course à pied, c’est la chaleur et l’altitude. Et dans le skyrunning, c’est surtout l’altitude. Donc s’entraîner en conséquence, en montagne. Et il y a bien sûr le facteur technique. Le skyrunning est aussi une question de technique au sol, parfois hors sentier, sur des crêtes. Dans le technique, il y a une part d’inné, comme l’appréhension de son corps dans l’espace, qui est quelque chose de très important et qui ne s’apprend pas forcément. Mais il y a aussi une part d’acquis, qui se travaille.
À l’entraînement, on a souvent l’habitude de faire nos intenses, de faire nos sorties longues, mais de rester l’air de rien dans notre zone de confort. Par exemple, si on est pas trop à l’aise en descente technique, entre 2 descentes, une un peu roulante et une avec des cailloux, on a tendance à éviter celle avec des cailloux. Alors qu’en fait, des descentes, il faut en bouffer, et en bouffer encore, que ce soit à allure course ou à allure tranquille. C’est la clé pour travailler le technique. Faire le plus d’heures possible dedans pour diminuer l’appréhension.

Si tu avais une astuce de champion à donner, quelle serait-elle ?
SC : C’est un truc que je fais souvent pour travailler le technique : aller dans les terrains très techniques, où il est quasi impossible de courir, ou qui sont très exposés, avec une notion de risque. Après, lorsque l’on revient sur des parcours type la Skyrace des Matheysins, comme c’est moins technique, cela nous paraît facile. L’aller-retour entre différents niveaux de difficulté est très intéressant pour progresser en technique.
Calendrier des Skyrunner World Series 2023
Le calendrier 2023 prévoit 13 courses dans 8 pays différents. La course montant le plus haut sera la Cordillera Blanca Skyrace, qui atteindra une altitude de 4500 mètres. Le money prize s’élèvera cette saison à 100000 euros répartis entre les 10 meilleurs athlètes du circuit.
29 avril – Calamorro Skyrace – Espagne
14 mai – Skyrace Des Matheysins – France
3 juin – Hochkönig Skyrace – Autriche
17 juin – Madeira Skyrace – Madère
24 juin – Minotaur Skyrace – Canada
2 juillet – Cordillera Blanca Skyrace – Pérou
9 juillet – Skyrace du Mercantour – France
22 juillet – Schlegeis 3000 Skyrace – Autriche
26 août – Matterhorn Ultraks “EXTREME” – Suisse
17 septembre – Grigne SkyMarathon – Italie
23 septembre – Gorbeia Suzien – Espagne
7 octobre – LouzanSkyrace – Portugal

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