En octobre 2024, le traileur aventurier Sébastien Raichon avait été le premier à établir un chrono de référence sur le GR20 en autonomie complète, c’est-à-dire sans aucune aide extérieure, ni accompagnant, ni pacer. Son temps : 44 heures 43 minutes pour venir à bout des 180 km et 11000m D+ du mythique sentier corse. Le 7 juin 2025, il s’est de nouveau élancé de Calenzana, au nord, pour rallier Conca, au sud, le plus vite possible. 41 heures 53 minutes et 18 secondes plus tard, il avait établi un nouveau FKT (Fastest KnownTime).

GR20 en autonomie complète : le rêve des 40 heures

Il savait qu’il pouvait faire mieux qu’en octobre dernier. Les conditions météo de l’époque, compliquées, et une erreur de parcours sur la fin qui lui avait fait perdre une heure, l’avaient même persuadé que passer sous la barre des 40 heures était possible. Le 7 juin, Sébastien Raichon s’est donc élancé sur ce parcours qu’il aime tant avec une idée en tête : boucler le GR20 en moins de 40 heures, sans aucune aide extérieure.

La principale difficulté de l’autonomie complète, avait-il expliqué lors de ce premier record, est que le GR20 est un chemin très compliqué à suivre par endroits, où il faut quasiment s’orienter pour trouver la trace. Avec des « ouvreurs » montrant le chemin et se relayant, et des compagnons de route portant les affaires, comme le font ceux qui tentent le record avec assistance (une autre catégorie de FKT), le challenge, tout aussi compliqué en terme de technicité du sentier, est néanmoins facilité par le fait de ne pas avoir à chercher son chemin.

Mais Sébastien Raichon préfère la solitude dans l’effort, et l’autonomie complète lui va bien. C’st donc avec des temps de passage calculés à l’avance sur une base de 40 heures qu’il s’est élancé le 7 juin à 3 heures du matin pour tenter d’établir un nouveau record et de passer sous cette fameuse barre des 40 heures. Mais la météo extrêmement chaude, un bâton cassé dès les premiers kilomètres, sans possibilité de réparation ou de remplacement (merci l’autonomie totale !) lui a joué des tours. Et si le record est tombé (41 heures, 53 minutes et 18 secondes), la barre des 40 heures, elle, résiste toujours.

Les derniers mètres de Sébastien Raichon le 8 juin à l’arrivée à Conca. Photo DR
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Lire aussi son interview lors du 1er FKT

GR20 en autonomie totale : le débrief de Sébastien Raichon

Arrivé le 8 juin à 20h53 à Conca, Sébastien Raichon était épuisé mais heureux et rêvait d’une nuit réparatrice. Après une courte nuit, classique lorsqu’on vient de produire un tel effort, il raconte :

« Ce GR20 est vraiment vraiment un chantier colossal. Il y a 30 kilomètres faciles, le reste, c’est un chaos permanent. Sublime et instable à la fois. Les salamandres du mois d’octobre ont muté en lézards. Je ne savais pas que c’était possible ! Il y avait beaucoup plus de monde sur le sentier, mais c’était sympa. J’ai eu dans certains refuges un bel accueil, j’ai résisté non sans mal aux offrandes diverses. Quelle folie, cette autonomie complète !

L’objectif des 40h n’est pas atteint mais je suis déjà bien content. Je crois que cela reste envisageable mais toutes les planètes n’étaient pas alignées. Il m’aurait fallu une température d’automne avec le terrain sec de ce week-end. Des bâtons en état ou incassables et légers, mais vu ce que je leur impose comme contraintes… Et des poumons à 100%. Si parmi vous il y a un spécialiste de la toux grasse, je suis preneur d’un avis car c’est récurent et très limitant !

Ceci étant dit, la forme était bonne, j’ai un peu été inquiet au début qu’une blessure comme lors de la Barkley m’empêche. Je me souviendrai longtemps de cette crête au coucher de soleil après Petra Piana. Place au repos maintenant, car la Terminorum arrive vite ! 
»

GR20 Sébastien Raichon Photo DR 3
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La 3ème édition du Grand Raid du Finistère qui se déroulera les 19 et 20 septembre 2025 à Telgruc-sur-Mer, dans le Finistère, à la presqu’île de Crozon. Son épreuve phare, atypique, se déroule sans balisage et sans ravitaillement (hors liquides). Mais pourquoi donc aller se mettre dans cette galère ?, diront certains Romains lorsqu’ils verront les terres bretonnes s’approcher. Et bien parce que le Grand Raid du Finistère est une course à part. Loin des foules, loin des codes classiques des courses de trail à sensation, elle se vit intensément, se mérite un peu, et se partage beaucoup. Et ce sont ceux qui l’ont couru ou vont le courir cette année qui en parlent le mieux.

Voir le résumé vidéo de l’édition 2024 ICI

Grand Raid du Finistère : un spot de trail à part

Le Grand Raid du Finistère, ce sont 5 courses de tous formats où chacun pourra se frotter au littoral, à son niveau, de 14 à 166 km. Or ce littoral, c’est certainement l’un des plus beaux paysages côtiers de France (du monde, dit-on là-bas, sans chauvinissme aucun bien sûr!), aux couleurs incroyables, et où les éléments dictent les règles. Bien sûr, les aficionados des sommets alpins, pyrénéens, jurassiens ou vosgiens diront que c’est loin et que c’est plat.

Mais c’est là que le sang du Breton ne fait qu’un tour et qu’il propose au montagnard de venir se frotter à son terrain de jeu de prédilection : la pointe du Finistère, là où la Terre se finit, avec sa fameuse presqu’île de Crozon et son « sommet », le Menez Hom, culminant à « seulement » 330 mètres d’altitude. Facile ? Partez arpenter les 166 km et 3700m D+ du Grand Raid, et on en reparle après…

GRF OPEN
Photo Grand Raid du Finistère

Grand Raid du Finistère : Julie, 37 ans, finsiher du 56 km en 2024, inscrite pour 2025

Originaire de la Presqu’île de Crozon, avec des grands-parents qui habitaient à Telgruc, elle a un attachement fort à la presqu’île. « En 2019 on m’a diagnostiquée une pathologie cardiaque, j’avais 31 ans. On m’a opérée en octobre 2020, pose d’un pacemaker. La reprise du trail a été chaotique. En 2021 j’entends parler du GRF. Cette course me fait rêver, me motive à préserver dans ma reprise douloureuse. Je sais que je ne pourrais jamais faire le 166 mais le rêve est là.

Et en 2023, François (François Hinault, l’organisateur, NDLR) annonce de nouvelles distances sur le GRF ! Je trépigne ! Le 56 est accessible pour moi, hop inscription faite. Une prépa difficile car je perds ma maman fin mai 2024. Mais je vais au bout et l’arrivée est dans les larmes, de joie. Il me faudra 3 mois de recup avant mon “demi-cœur” comme je dis mais j’y retourne cette année et j’y retournerai les années suivantes. Le GRF est ma course de cœur. »

Son message : On peut atteindre nos rêves, d’une manière différente de celle voulue au départ parfois. Il faut s’adapter, avancer, croire en soi.

Grand Raid du Finistère : Marine, 51 ans, inscrite au 18 km

Finistérienne et installée depuis plus de 25 en région nantaise, Marine a eu envie de participer à des courses sur sa terre natale et tout particulièrement sur la côte. « Après une année difficile professionnellement, la course a été un élément majeur pour m’aider à aller mieux. Je me suis donc inscrite à 6 courses cette année avec différents objectifs : battre mon RP sur semi-marathon et faire des trails sur les côtes. »

Son message : Courir pour aller mieux.

GRF MER
Photo Grand Raid du Finistère

Grand Raid du Finistère : Kévin, 32 ans, inscrit au 56 km

Un énorme défi pour ce garçon originaire du Bassin d’Angers, qui a un parcours atypique : « Après un belle perte de poids d’environ 35 kg grâce à une remise au sport, je veux clôturer cette perte de poids par un bel objectif. De plus, cela me permet d’avoir d’acquérir de belle valeur que j’aimerais partager plus tard à mon fils qui vient de naître. »

Son message : Ne jamais abandonner, quel que soit l’objectif.

Grand Raid du Finistère : Nicolas, 41 ans, inscrit au 92 km

Aujourd’hui jeune papa, Nicolas cherche à repousser ses limites autrement, à travers de nouveaux défis qui lui permettent de les explorer et de les faire progresser : « Suite à un changement de vie lié à mon engagement dans des missions humanitaires en contexte sécuritaire complexe, le manque d’activité physique m’a conduit à une prise de poids et au développement d’une stéatose hépatique. Aujourd’hui jeune papa, je n’ai pas d’autre choix que de retrouver une bonne condition physique et de me réinvestir pleinement dans le sport. »

Son message : Le même message que François Hinault, l’organisateur, qui souligne l’importance de l’activité physique pour la santé. Un message qui a résonné en Nicolas comme un déclic. Il est temps pour lui de se remettre en mouvement.

Grand Raid du Finistère : Thierry, 56 ans, inscrit au 166 km solo

Thierry a participé à toutes les éditions, il aime cette course et Crozon (il habite à Clayes, à 15km de Rennes). Il veut dédier cette course à sa femme partie en début d’année : « Je me suis inscrit à l’édition 0 en 2022, après avoir fait le Grand Raid du Morbihan avec mon fils. Je voulais un autre Grand Raid pas trop loin de chez moi. Ma femme se battait contre un cancer je voulais la soutenir à ma façon. J’ai terminé en 30h15.

Je suis revenu en 2023 et 2024 avec toujours la même idée, la maladie de ma femme était toujours présente et c’était ma façon de la soutenir. Je n’ai pas fini ces deux éditions car mal préparé et fatigué. La maladie a gagné, ma femme nous a quitté en janvier 2025. Je me suis donc réinscrit dans la ferme intention de finir cette fois-ci. Je sais qu’elle sera présente et qu’elle me portera et je lui dédirai ma victoire de finisher. »

Son message : Notre souffrance sur les trails est du bonheur à côté de ces satanés maladies. Il ne faut jamais rien lâcher. La vie est belle !

Grand Raid du Finistère
Photo Grand Raid du Finistère

Grand Raid du Finistère : Philippe, 50 ans, inscrit au 56 km

Résidant dans le pays bigouden et ayant la chance d’avoir pu déjà salir ses baskets sur le GR34 côté Presqu’île, Philippe a vraiment envie de re-découvrir ce sentier en mode course libre sans balisage, sans ravito et surtout cette esprit famille/partage. « Depuis 2 ans je galère avec une pubalgie mais j’essaye d’outre-passer mes douleurs pour le plaisir du trail. J’ai plusieurs ultras à mon actif, dont 3 fois la Diag’ mais je lutte pour guérir de cette m**** dans l’espoir de prendre un nouveau dossard en 2025 avec mon fils qui lui est en pleine bourre, avec plusieurs podiums ou très belles places, dont une 20ème à l’Aber Wrach 60, pour partager père/fils cette course qui est pour moi viscérale. »

Son message : Rien n’est impossible. Il suffit de se donner les moyens pour l’atteindre. L’idéal est de le vivre avec ceux qu’on aime. L’accomplissement en est encore plus grand. 

Grand Raid du Finistère : Victoria, 29 ans, inscrite au 18 km

Quoi de mieux qu’un premier trail dans le Finistère pour une amoureuse…du Finistère ? Mais pour Victoria, ce premier trail est aussi et surtout un défi personnel post burn-out : « Cela fait un an que j’ai réussi à reprendre la course et que je ne cesse de me dépasser dans cette discipline. Ma première course était en septembre 2024, sur Nantes. Pas de grand chrono visé, juste un accomplissement. Et plus que tout ça, je me suis enfin sentie guérie de mon burn-out, je l’ai vaincu après 2 ans de difficultés d’intensités plus ou moins élevées. Depuis, chaque ligne d’arrivée franchie est synonyme de victoire. Le GRF sera une victoire supplémentaire, en plus d’être mon premier trail ! »

Son message : Victoria souhaite à tous ceux qui vivent ou vivront (malheureusement) un burn-out de pouvoir se dire la même chose qu’elle : « Mon burn-out a été la chance de ma vie ! »

Plus d’informations sur le Grand Raid du Finistère ICI

Affiche GRP
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4 heures 54 minutes et 41 secondes, c’est le temps qu’a mis l’alpiniste virtuose Benjamin Védrines, déjà détenteur du record de vitesse d’ascension du K2 sans oxygène, dans l’Himalaya (8611m) depuis juillet 2024, pour faire l’aller-retour depuis l’église de Chamonix jusqu’au sommet du mont Blanc. Un exploit réalisé en trail et en ski, qui lui permet d’établir le record absolu d’ascension du mont Blanc, mais n’efface pas des tablettes celui de Kilian Jornet (4h 57mn 40s), réalisé uniquement à pied. Une semaine plus tôt, la traileuse Élise Poncet a également établi un nouveau record absolu féminin en utilisant des skis, en 6 heures 54 minutes.

Benjamin Védrines et Kilian Jornet, deux chronos incomparables

Si de nombreux médias se sont enflammés en titrant « Benjamin Védrines efface le record de Kilian Jornet », il convient de remettre l’église (de Chamonix) au centre du village : oui, Benjamin Védrines a battu le record absolu d’ascension du mont Blanc, qui était détenu par Kilian Jornet depuis 2013, mais non, Benjamin Védrines n’a pas battu le record d’ascension à pied, catégorie dans laquelle Kilian Jornet détient toujours le record de 4h 57mn 40s établi en juillet 2013.

En réalisant une partie de l’ascension en trail et une autre partie à skis, Benjamin Védrines réalise son exploit dans une autre catégorie, et bat le record qui était détenu par l’Américain Jack Kuenzle, qui avait établi sa marque (4 heures 59 minutes) en juin 2024 après s’être installé six mois dans la vallée pour préparer le record. L’Américain avait lui même effacé le record de Mathéo Jacquemoud, qui en mai 2013 avait établi un chrono de 5 heures et 6 minutes en utilisant aussi des skis. À l’époque, le jeune champion de ski-alpinisme avait 22 ans et avait mis environ 4 heures pour gravir les 3 773 mètres de dénivelé entre l’église, située à 1037 mètres d’altitude et le sommet du mont Blanc, à 4810 mètres, dont environ 1000 mètres à pied jusqu’aux premières neiges.

Photo Noa Barrau
Photo Noa Barrau

Benjamin Védrines, une tentative pas prévue

« Ça me faisait rêver cet aller-retour mythique depuis l’église de Chamonix, même si ce n’est vraiment pas ma spécialité », a confié Benjamin Védrines, qui était notamment au côté de Kilian Jornet lors des 2 dernières ascensions de l’exploit Alpine Connections – 82 sommets des Alpes en 19 jours du Patron l’été dernier, l’accompagnant sur la Barre des Écrins et le Dôme de Neige des Écrins.

Lire l’article sur l’exploit de Kilian Jornet ICI

Mais du rêve à la réalité, il y a un pas, que Benjamin Védrines n’avait pas du tout envisagé de franchir. Il avait en effet annoncé partir en expédition au Denali (6 190 m), en Alaska mi-mai. Jusqu’à ce que l’annulation de ce projet ouvre une brèche dans son calendrier : « Je me suis décidé il y a seulement 2 semaines parce que j’étais sur Chamonix. c’est vraiment court quand on pense que Jack par exemple s’est installé 6 mois dans la vallée pour préparer ce record. […] Je n’y croyais vraiment pas à la base. C’est un record qui me fascinait, mais je ne pensais jamais en être capable, je manquais vraiment de confiance en moi pour le tenter. »

Un record absolu au bout de l’effort  

L’arrivée au cœur de Chamonix sous les applaudissements des passants surpris de l’apparition de ce gars au physique épuisé mais au regard comblé et l’acclamation de ses proches, ses amis et de ses partenaires restera marqué dans sa mémoire. « Tout le monde m’attendait. C’était hyper fort. J’ai vraiment kiffé ce moment. » Comme pour les records de ses prédécesseurs, Benjamin Védrines reconnaît avoir eu son lot de péripéties, de souffrances physiques et mentales. « Ce n’est jamais parfait, ces ascensions. C’est ce qui fait leur beauté. »

De son côté, Kilian Jornet, ami de Benjamin Védrines, a simplement commenté : “Chapeau l’artiste !” De là à ce que l’envie de tenter à son tour un chrono record en trail et ski le titille, il n’y a qu’un pas…

Photo Noa Barrau
Photo Noa Barrau

Record d’ascension absolu pour Élise Poncet

Une semaine avant Benjamin Védrines, Élise Poncet a également marqué l’histoire. Le 16 mai 2025, elle a battu le record féminin de l’aller-retour à ski en 6 heures 54 minutes 47 secondes, améliorant de 34 minutes la marque de l’Américaine Anna DeMonte (7h29 établi en juin 2024). Là encore, il s’agit bien d’une performance avec skis, qui n’efface donc pas le record à pieds établi par Hillary Gerardi, qui en 2023 avait mis 7 heures 25 minutes pour réaliser l’aller-retour Chamonix / sommet du mont Blanc.

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Réputée comme étant l’une des courses les plus dures au monde, se disputant dans le Grand Nord Canadien par des températures pouvait atteindre -40 à -50°, la Yukon Arctic Ultra 2025 a rendu son verdict après un suspense terrible. Mathieu Blanchard s’est finalement imposé, au bout de l’effort, devançant de seulement 4 heures un autre Français, Guillaume Grima. Seuls 5 coureurs à pied sur 38 partants étaient encore en course au moment où les deux premiers hommes ont franchi la ligne d’arrivée.

Yukon Arctic Ultra : les conseils de Thierry Corbarieu, premier Français à avoir gagné cette course en 2019

Alors que le 2 février les 38 concurrents au départ du format long de la Yukon Arctic Ultra, soit 600 km, s’apprêtaient à partir, Thierry Corbarieu confiait : « Le physique est très important car le parcours est très vallonné et tu dois tirer ta pulka qui pèse 25kg entre 15 et 20 h par jour. Il faut aussi être prêt à peu dormir. Pour ma part, c’était 1 h 30 par jour. C’est une course glaciale où aucun détail ne doit être négligé au péril de sa vie. Elle est vraiment hors catégorie, Il faut un engagement total ou aller sur les formats plus courts. […] Le froid est la principale difficulté bien sûr, avec un départ à -34° et des nuits à-40° sous la tente. Le sommeil est le facteur prédominant avec la débauche d’énergie impressionnante. La distance est aussi très longue et les points de contrôles éloignés. Tu fois être capable de te gérer sans l’organisation. J’ai passé par moment 20h sur la fin sans voir personne, Il faut être prêt là aussi. »

Yukon Arctic Ultra : la frayeur de Mathieu Blanchard

Après s’être porté rapidement en tête, Mathieu Blanchard a connu une énorme frayeur lorsqu’il a dû s’arrêter longuement au CP5, après 293 km de course, après avoir lancé un appel à l’aide URGENT. La raison : il ne parvenait plus à respirer normalement. « C’est comme si je n’avais qu’1/4 de mes poumons disponible », a-t-il indiqué dans son appel à l’aide, espérant pouvoir s’entretenir avec un pneumologue pour faire le point et décider de la suite de son aventure. Après plusieurs heures de repos et avoir pu discuter avec le médecin local pour écarter quelques pistes, Mathieu Blanchard, rejoint par ses poursuivants immédiats, a fini par repartir. Il a rattrapé le Britannique Matt Weighman quelques heures plus tard et repris la tête, pour ne plus la quitter. Le Britannique a de son côté abandonné, victime du froid, les pieds en partie gelés, comme bon nombre de concurrents.

YUKON ARTIC RACE BLANCHARD
Photo DR

Yukon Arctic Ultra : des difficultés insoupçonnées

En cours de route, Mathieu Blanchard a pu communiquer avec son crew, qui postait en retour sur les réseaux sociaux des commentaires de l’athlète qui en disent long sur la difficulté de l’épreuve. Parmi eux, celui-ci, posté après qu’il est arrivé au CP de Shelton Lake, au KM 420 : « Je n’ai jamais rien fait d’aussi difficile dans ma vie. Tout est difficile dans ces conditions de froid extrême. La gestion de la nourriture, de l’eau, du sommeil, de la survie, du froid, des vêtements, de l’humidité dans les équipements. J’ai dormi en tout 13 heures depuis le début. Enfin, pas dormi, je me suis mis 13 heures dans mon sac de couchage, mais je ne dois jamais vraiment dormir dans le froid fait mal et la fatigue physique aussi. Ça fait une moyenne de 2h30 de sommeil par jour. Le parcours est nouveau, l’organisateur ne l’a pas repéré. C’est pas possible. C’est quasi impossible d’avancer dans ces méga pentes raides avec la pulka chargée. Et le pire sur ce dernier tronçon de 80 km, quasi personne n’était passé. La neige n’était pas bien tassée, j’avais l’impression de traîner une ancre de 3 tonnes derrière moi. »

Yukon Arctic Ultra : une épreuve extrême et le message de Mike Horn

« J’ai la peau du visage un peu brûlée, les muscles très endoloris mais c’est normal je crois », a commenté quelques heures plus tard Mathieu Blanchard lors d’un échange avec son crew, avant de faire poster sur son compte un message d’encouragement pour son poursuivant, Guillaume Grima. Ce dernier, ultra-traileur ayant déjà effectué l’UTMB mais inconnu du grand public, avait déclaré au début de l’aventure « J’y vais mais j’ai peur ». Il a prouvé qu’avec force entraînement et humilité, et un mental hors norme, l’humain est capable de se dépasser et de dépasser ses propres craintes.

C’est également de l’aventurier Mike Horn, dont Mathieu Blanchard ne se cache pas qu’il l’inspire, qu’est venu un message de soutien inattendu, lorsqu’il s’est adressé à Mathieu Blanchard en lui disant : « On ne lutte pas contre le froid. Il faut l’accepter, l’embrasser. » Un baiser au goût de glace…

Mathieu Blanchard
Photo DR

Yukon Arctic Ultra : une larme (gelée) et du respect

Jusqu’au bout, Guillaume Grima aura poussé Mathieu Blanchard dans ses retranchements, revenant sur lui pour finalement terminer second, 4 heures et 10 minutes plus tard.

A l’arrivée de la course, Mathieu Blanchard a posté sur les réseaux sociaux une photo de lui, une larme coulant sur sa joue avant de se transformer en glace, et ce message :

« Une larme. Elle contient tout.
La douleur, la joie, la folie, la survie, l’accomplissement, le combat, la souffrance, l’euphorie, la peur.
Je viens de finir cette Yukon Arctic Ultra.
7 jours 22 heures.
Ce n’est pas une victoire contre le froid ou la distance. C’est un retour à l’essentiel. À l’instinct. À ma nature sauvage.
»

Quelques heures plus tard, alors que Guillaume Grima venait d’en finir et que les deux hommes sont tombés dans les bras l’un de l’autre, Mathieu Blanchard postait un autre message, de respect celui-ci : « La compétition n’est pas faite pour écraser l’autre, mais pour s’élever grâce à lui. Guillaume, tu es une force mentale et physique incroyables. Tu m’as poussé plus loin que jamais, et c’est grâce à toi que j’ai découvert de nouvelles limites. Merci pour cette aventure. Bravo champion. »

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Yukon Arctic Ultra : des chiffres qui en disent long

Derrière l’exploit des 2 hommes, les chiffres en disent long sur la difficulté de l’épreuve. Pour Mathieu Blanchard, cela donne :

– Km parcourus : 608,7
– Dénivelé total : 6564m
– Distance parcourue par jour : 73,5km
– Temps cumulé en mouvement : 4 jours 11h 35mn
– Temps cumulé à l’arrêt (repos, soins du corps, gestion du froid…) : 3 jours 10h 39mn
– Vitesse moyenne en mouvement : 5,7km/h
– Vitesse moyenne globale : 3,1km/h

Guillaume Grima
Photo DR
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44 heures, 43 minutes et 38 secondes : c’est le chrono réalisé par Sébastien Raichon fin octobre 2024 sur les 179 km et 11000m D+ du redoutable sentier corse du GR20, en mode « autonomie totale », donc en solo et sans assistance extérieure. Après sa 2ème place sur la colossale SwissPeaks 660, le double vainqueur du Tor des Glaciers a ainsi établi un tout premier temps de référence, ou FKT en autonomie totale, et ce malgré des conditions météorologiques dantesques. Rencontre avec cet ultra-traileur indestructible qui est allé quelques semaines plus tard décrocher avec son équipe 400 Team le titre de champion du monde de Raids Aventure en Équateur, le premier titre pour une équipe française.

Sébastien, on te connaît comme spécialiste de l’ultra-distance, moins comme performeur en solo sur FKT. Depuis quand pratiques-tu ?

Sébastien Raichon : Je me suis lancé en 2020, au moment du Covid. J’ai fait la Grande Traversée des Alpes par le GR5 en auto-assistance, sans véritable préparation, un peu à l’arrache, en 163 heures je crois. J’ai échoué de peu sur le record avec assistance, et du coup j’y suis retourné l’année d’après un peu mieux préparé, et c’est là que j’ai fait 150 heures et quelque, toujours en auto-assistance (150h 27mn très précisément, NDLR). La principale différence entre assistance et auto-assistance, c’est qu’en assistance, tu peux avoir des pacers. Tu ne portes rien et ils ouvrent le chemin. Alors qu’en auto-assistance, tu peux te nourrir et dormir où tu trouves de quoi te nourrir et dormir, tu peux récupérer un colis que tu t’es posté, mais tu te débrouilles tout seul.

Sur le GR20, tu étais carrément en autonomie totale !

Sébastien Raichon : Oui, l’autonomie complète, c’est le troisième critère de FKT. Tu pars avec tout, nourriture, matériel, et tu ne peux rien demander à personne ni bénéficier d’aucune assistance. Tu peux juste prendre de l’eau là où tu en trouves, dans les rivières, les fontaines… Pour le GR20, quand je l’ai fait, tout était fermé, donc je n’avais pas vraiment le choix. Mais comme c’était une distance assez « courte » pour moi, je trouvais sympa de le faire comme un randonneur moyen qui part avec son gros sac à dos, mais en mode express avec un petit sac. Alors qu’un GR5, quand tu pars pour 600 bornes, tu es obligé d’avoir un sac hyper lourd si tu veux le faire en autonomie totale. Et moi, j’aime bien avoir un sac léger pour pouvoir courir. 

Durant l’été, Mathieu Blanchard avait aussi fait le GR20 en autonomie totale. Il avait mis 4 jours en prenant son temps, avec une petite tente et tout et tout… 

Sébastien Raichon : Le GR20, les stars du trail s’y attaquent généralement avec assistance et sont très suivis, mais il y a plein de gens qui font le sentier en 3 jours, 4 jours, 5 jours… Aucun record n’avait jamais été posé et déclaré sur la version « autonomie totale ». De ce que j’ai lu, Mathieu l’a fait dans un esprit d’aventure, d’entraînement et de découverte, pas à la recherche d’un FKT. Et il était bien plus chargé que moi !

Photo Altore Running
Photo Altore Running

Justement, il y avait quoi dans ton sac ?

Sébastien Raichon : Il y avait tout le matériel de sécurité, c’est-à-dire couverture de survie, petite pharmacie, mon téléphone, une veste et un pantalon étanches, de la nourriture et deux flasques. Et puis aussi une batterie externe pour recharger mon téléphone, ainsi qu’une frontale Stoots avec pas mal de batteries parce que les nuits étaient super longues. J’avais pris six batteries je crois. Quant à l’eau, il a tellement plu juste avant que je n’en ai pas manqué. J’ai fonctionné avec une seule flasque de 500ml en la remplissant tout le temps.

Pourquoi avoir choisi cette date fin octobre, qui n’est pas la plus favorable pour ce genre de record ?

Sébastien Raichon : C’est par rapport à mon calendrier. J’avais prévu de le faire à la meilleure période, c’est-à-dire début juin, mais c’était blindé de neige et il y avait des passages dangereux, dont un véritable mur de neige de 3 mètres de haut au col de Bocca Alle Porte, le point culminant du GR20. Donc j’ai reporté. Après, j’avais un programme de compétition qui me permettait pas de le faire durant l’été.

Je pensais même ne pas le faire du tout, mais il se trouve que j’ai bien récupéré après la SwissPeaks que j’ai faite début septembre, et du coup j’ai un peu surfé et enchaîné dessus en me disant qu’à la Toussaint, ça pouvait être joli. Et effectivement, les couleurs d’automne étaient magnifiques. Par contre, pour le temps, c’était pas ça. Les Corses ont du mal à prévoir la météo dans la montagne, parce que je devais avoir 48 heures sans pluie et en fait j’ai pris la pluie et le brouillard toute la nuit, dans des conditions assez dantesques. 

Tu mets 85 heures pour faire les 400 km de la partie chronométrée de la SwissPeaks, après en avoir fait 300 en guise d’échauffement et avoir avalé au total 49000m D+, et il t’a fallu près de 45 heures pour ne faire « que » 179 km et 11000m D+ en Corse. Tu as fait du tourisme ou quoi ?

Sébastien Raichon : (Rires.) Ça peut paraître un peu fou, mais la SwissPeaks, elle n’est pas technique du tout, alors que le GR20… Et pourtant, c’est un sentier que je connais depuis longtemps, et sur lequel je suis allé 2 fois cette année en reco ! Je connaissais 75 % du parcours, mais c’est vraiment ultra-technique. Pour avoir une moyenne horaire à 4 km/h, il faut envoyer ! Et en plus, je suis plutôt un bon technicien, donc dans les descentes, j’arrive à enchaîner. Même si là, sur le sentier humide, c’était pas facile et plein de pièges, j’ai glissé 200 fois, j’ai évité 400 salamandres et j’ai perdu énormément de temps. Bref, il faut que j’y retourne, parce qu’il y a moyen de faire beaucoup mieux !

Surtout qu’à la fin, tu t’es un peu perdu. Raconte !

Sébastien Raichon : C’était dans le brouillard et j’ai fait carrément un demi-tour ! J’étais un peu azimuté parce que ça faisait plus de 40 heures que je n’avais pas dormi et je suis arrivé à une fourche ou deux sentiers vont au au même endroit. J’ai pris à gauche, et quand je suis arrivé à la jonction des deux sentiers, j’ai pris à droite, ce qui fait que je suis revenu revenu à mon point de départ. Au final, je me suis rajouté 5 bornes à l’aller, 5 bornes au retour, donc 10 km en plus en tout. L’anecdote est assez rigolote, mais ça m’a quand même coûté 2 heures ! (Au final, Sébastien Raichon a parcouru à sa montre 189,56 km et 12912m D+, au lieu de 179 km et 11000m D+, NDLR.)

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Ça va donner des idées à d’autres qui vont vouloir venir taquiner ton chrono !

Sébastien Raichon : Moi le premier, puisque je sens que je peux claquer les 40 heures dans ce mode d’autonomie complète. J’espère trouver un espace-temps fin mai début juin 2025 pour y retourner, parce que j’aime bien aller au bout des choses. C’est un peu comme si j’avais fait une reco générale ce coup-ci !

Quelle est la plus grosse difficulté de l’autonomie totale sur ce GR20 ?

Sébastien Raichon : Le problème du GR20, c’est que ce n’est pas toujours un sentier. Il y a parfois des parties faciles, et il y a tout un tas de sections où tu es dans les blocs et où il faut trouver le marquage. De nuit, tu perds énormément de temps à chercher ton chemin. Par rapport à un pacer qui va passer devant le coureur et lui indiquer le chemin, ça n’a rien à voir. Et même là, si je le refais, je vais encore perdre du temps, parce que je suis loin de connaître par cœur le parcours, notamment les parties techniques. Mais c’est aussi cette difficulté qui est intéressante.

Pour un athlète de ton niveau, que représente en terme d’adrénaline le fait de te lancer sur un FKT par rapport à une course traditionnelle avec des adversaires directs ?

Sébastien Raichon : C’est vachement plus zen comme effort. Tu pars un peu quand tu veux, tu choisis ton moment, tu es vraiment solo, avec les éléments, la nature… Tu prends le temps de contempler, surtout là, vu qu’il n’y avait pas de record existant, et que c’est moi qui le posais. Je n’étais donc pas à la minute près, je m’en foutais un peu, j’ai fait des photos, des films… En fait, les FKT, ça reste un petit monde de gens passionnés qui s’amusent à faire des records sur des superbes circuits. Ça repose aussi beaucoup sur la confiance, parce que n’importe qui peut tricher, peut annoncer un truc et ne pas le faire… Alors qu’une compétition avec dossard et tout, il y a beaucoup plus d’adrénaline, tu as l’envie de te confronter aux autres. Sur un FKT, tu te confrontes à toi-même et un circuit, c’est tout.

Revenons à la contemplation… Quelles sont les sections qui t’ont le plus marqué sur ce GR20 ?

Sébastien Raichon : Le Cirque de la Solitude ! (Passage phare du GR20, le plus difficile de tous, le Cirque de la Solitude est un vaste vallon escarpé très rocailleux qui serpente entre le sommet des montagnes, que beaucoup de candidats au GR20 préfèrent éviter, NDLR.) En plus, je l’avais reconnu la veille, c’est un endroit assez extraordinaire, bien engagé. En fait, j’ai beaucoup aimé toutes les variantes alpines du GR2. J’ai adoré également le passage après la passerelle suspendue de Spasimata, au tout début, pour monter vers Asco. Il y a des dalles de toutes les couleurs qui sont vraiment sublimes, au bord d’une rivière… 

En dehors d’un éventuel GR20 bis, à quoi va ressembler ta saison 2025 ? 

Sébastien Raichon : J’ai pas mal de projets. J’attends de savoir s’ils vont m’accepter à la Barclay, que j’aimerais finir car il m’avait manqué entre 1h et 1h30 la première fois. (En mars 2024, Sébastien Raichon est entré dans le cercle très fermé des coureurs ayant entamé le 5ème tour sans pouvoir le terminer à temps, NDLR.) Il y a aussi la Chartreuse Terminorum, que j’aimerais refaire. (En juin 2023, Sébastien Raichon est devenu le premier finisher de la Chartreuse Terminorum, surnommée « La Barkley française », NDLR.) Et puis je voudrais aussi retourner au Tor des Glaciers, parce que je sens que j’ai la forme de ma vie. J’ai franchi un cap cette année et je sens que je peux aller plus vite.

Après, je voudrais essayer de faire un raid-aventure, et également découvrir des nouvelles courses en fin d’année, comme le 360 The Challenge Gran Canaria (Le tour de l’île de Gran Canaria sur 260 km et 13000m D+ en semi-autonomie et sans balisage, NDLR.) et la Spin Race (Surnommée « Вrіtаіn’s mоst brutаl rаcе », la Spin Race propose un parcours de 430 km et 10800m D+ le long du sentier national le plus emblématique et exigeant de Grande-Bretagne, le Pennine Way, NDLR.) Bon, elle, c’est en janvier, donc peut-être pour 2026… Je suis un peu boulimique en ce moment parce que je sens que ce sont des belles années et qu’il ne m’en reste plus beaucoup… (Rires.)

Photo Altore Running
Photo Altore Running

Quelques-unes encore quand même ! Tu n’auras « que » 53 ans en juin ! Tu ne joues peut-être plus sur la vitesse, mais ton expérience te permet quand même de faire des performances incroyables. Quel est ton secret d’entraînement ?

Sébastien Raichon : J’adapte mon entraînement le dernier mois en fonction de mon objectif mais toute l’année, avec le raid d’aventure, je fais vachement d’entraînement croisé, VTT et kayak. C’est ce qui me permet de bien enchaîner, de pas trop me fatiguer les articulations et d’éviter de me blesser. Actuellement, c’est vraiment une belle période, j’ai enchaîné trois gros trucs en trois mois et je sens que j’assimile bien… Je pense que c’est un vrai plus que de multiplier les supports d’entraînement, ça me permet de tenir dans le temps.

Justement, parlons de raid aventure. Tu pratiques depuis longtemps ?

Sébastien Raichon : Je pratique le raid-aventure depuis 2001, et suis sur les épreuves hyper longues depuis 2009. Toute mon expérience, je l’ai acquise là-dessus. C’est pour ça que tout ce qui est ultra-trail hyper long, je trouve ça facile par rapport au raid-aventure. On vit des choses tellement fortes et intenses sur des terrains tellement compliqués, hors sentiers, sur des durées hyper longues, où on doit faire preuve de résilience tout le temps, que quand je me retrouve sur des sentiers balisés, il n’y a pas de difficultés. Ce n’est pas être prétentieux, c’est mon histoire qui fait ça !

Avec les 3 autres membres de l’équipe « 400 Team », Sandrine Béranger, Adrien Lhermet et Benjamin Fayet, tu as décroché en Équateur le titre de Champion du monde de Raids Aventure, devançant d’un souffle les professionnels des forces spéciales de l’armée suédoise, doubles champions du monde en titre. 90h47 de course, 2h20 de sommeil, votre exploit est d’autant plus énorme que c’est la première fois que la France gagne le titre. Et le scénario a été dingue. Raconte !

Sébastien Raichon : Oui, on a vraiment vécu un scénario dingue ! On était en tête lorsque dans la section kayak, on s’est renversés de nuit et on a perdu un sac. On a perdu du temps à le chercher, on a écopé d’une pénalité d’une heure, mais on a réussi ensuite sur une section trek, qu’on avait renommée entre nous trail, a revenir et à battre les Suédois champions en titre à la pédale sur une section vélo, alors que c’est leur point fort. Sur la dernière section vélo, j’ai passé mon temps à pleurer parce que je sentais qu’on était en train de le faire, et ça faisait 15 ans qu’on courait après.

C’est inimaginable ce que le sport peut apporter comme émotions, tu sais que tu as tous tes amis, tes proches, tes supporters derrière et tu te dis que ça y est, tu vas le faire. C’est magique. Nous, on a pas les Jeux olympiques dans notre sport, on a le championnat du monde, c’est le Graal. Ces 15 dernières années, les Néo-Zélandais qui ont dû gagner 10 fois, les Suédois 2 fois, et nous, notre meilleur classement, c’était 3èmes en 2018. Et là, enfin, on a ramené la coupe à la maison !

RAID AVENTURE
Champions du monde ! Photo DR
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Vous n’avez pas été tiré au sort à la Hardrock Hundred 100 ? Aucune importance, pas besoin d’avoir son ticket pour Silverton pour partir à la découverte de l’univers extraordinaire qui vous attend là-bas. Non seulement il y a d’autres courses (pour les accros du dossard), mais il y a surtout des spots incroyables qui méritent d’être courus une fois dans sa vie. Car oui, le Colorado, c’est l’État outdoor par excellence ! Notre envoyée spéciale Cécile Bertin a défriché le terrain pour vous, et le légendaire Christophe Le Saux, alias le Jaguar, organisateur d’un magnifique trail par étapes dans le Colorado, vous révèle ses spots préférés.

Le Colorado, l’autre Mecque du trail

Si pas mal d’ultra-traileurs américains célèbres ont fait le choix d’y résider à l’année, ce n’est pas un hasard. Entre la « Présidente » Courtney Dauwalter qui vit à Leadville, et le « Messie » Anton Kupricka qui a fait ses études à Colorado Springs avant de s’installer à Boulder, la « Mecque US du trail », il y a des indices concordants…

Forcément, lorsqu’on est traileur, évoquer le Colorado, c’est tout de suite penser à la Hardrock 100 ou la Leadville 100, qui sont devenues en quelques années de véritables légendes de l’ultra-trail. Ce sont d’ailleurs ces épreuves, avec la voisine Western States Endurance Run, qui ont inspiré Gilles Bertrand pour créer en France le Festival des Templiers, il y a un peu plus de 30 ans. Seul souci, pour s’élancer de Silverton le nombre de places est si limité (170 seulement !) et le système de loterie tellement obscur que la Hardrock restera pour bon nombre de coureurs un rêve inaccessible tout au long de leur vie sportive.

Photo La Sportiva
Anton Krupicka, l’icône de Boulder, Colorado. Photo La Sportiva

La Leadville 100, l’autre ultra qui fait rêver

Bonne nouvelle cependant pour les amateurs de longues distances, il existe d’autres courses tout aussi légendaires dans l’État du Colorado, et qui sont, elles, beaucoup plus simples d’accès. À commencer par la Leadville 100, qui comme son nom l’indique se court dans la région de la petite ville de Leadville, devenue célèbre parce que c’est là que vit Courtney Dauwalter, surnommée la « Présidente ».

Avec un départ sur la rue principale sous une simple banderole, son format original en mode « aller-retour » et la victoire surprise cette année d’un certain David Roche, quasi inconnu du grand public qui a eu la bonne idée de battre le record de l’épreuve vieux de 19 ans – aurait-il inspiré Vincent Bouillard sur l’UTMB ? -, la Leadville 100 est une course vraiment parfaite pour découvrir l’esprit trail façon Colorado. Bien sûr, une loterie est aussi de mise pour l’inscription, elle est beaucoup plus accessible.

« C’est simple, je me suis inscrit deux fois au tirage au sort, j’ai été tiré au sort les deux fois ! », témoignage Yann Gobert, qui était au départ de l’édition 2024. Mais attention, comme pour la Hardrock 100, il faut avoir en tête que l’altitude est une vraie difficulté et qu’il faudra l’appréhender en l’incluant de façon très sérieuse dans sa prépa.

Autre difficulté, les barrières horaires… « C’est une course où tu cours tout le temps, tu n’as pas le choix, le côté “rando course” ne passe pas sur la Leadville100 », explique Yann Gobert, avant d’ajouter : « Attention aussi aux ravitaillements. Les crews (les assistances) étant non seulement acceptées mais faisant clairement partie de la tradition, les ravitaillements, déjà très à l’américaine (chips, coca, bonbons…) peuvent être parfois un peu plus légers que nécessaire, puisque de toute façon l’entourage sera là pour pallier les manques. »

Attention également à l’hébergement sur place ! Car qui dit petite ville américaine dit capacité hôtelière quasi nulle… Reste le camping, qui est à plusieurs kilomètres, et le logement chez l’habitant, la plupart d’entre eux profitant de l’occasion pour augmenter leurs tarifs.

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Sur les sentiers de la Leadville 100

Et puis il y a la Ouray 100 !

Autre course digne d’intérêt, la Ouray 100 que Dorian Cadart, grand voyageur et passionné de trail a testée l’été dernier. Ouray, comme Leadville, tout simplement parce que c’est le nom de la ville de départ, située à quelques kilomètres de Silverton et de sa Hardrock, et organisée la semaine suivante. Un calendrier que Dorian a adoré, puisqu’il a pu jouer les observateurs sur la Hardrock et assister au cavalier seul de Ludovic Pommeret avant de prendre le départ de sa propre course quelques jours plus tard. Et il n’a pas fait le voyage pour rien, parce qu’avec ses 160 km et ses 13 000m de D+, elle a la réputation d’être encore plus dure que sa voisine !

Ce n’est pas une boucle, mais plusieurs aller-retours sur différents chemins avec un total de 14 montées à gravir, pour une altitude moyenne de 3 000 m et un maximum de 4 100m. Avec des ravitaillements tous les 11 km, on peut partir léger, ce qui est loin d’être négligeable sur un ultra de cette distance. Autre attention qui vaut d’être soulignée, la cérémonie de clôture récompense comme toujours le podium, mais pas seulement ! D’autres titres, comme le plus méritant, sont aussi décernés.

Ainsi, cette année, c’est une femme ayant enfin terminé la course après 5 tentatives infructueuses qui s’est vue honorée par l’organisation et tous les participants. Avec plusieurs parties communes à la Hardrock, mais sans sa loterie démoniaque, 52 heures pour boucler la course et une ambiance comme les Américains savent la mettre, c’est une réelle belle option pour vivre l’aventure du Colorado en ultra format.

Et bien entendu, si la Leadville et la Ouray 100 sont en tête de gondole, le calendrier des courses de trail au Colorado est très fourni, et des sites comme runningintheusa.com ou findarace.com vous aideront à faire votre choix. Avec un regret tout de même, les TransRockies Run, autre épreuve très connue aux USA, avec ses courses par étapes de 3 ou 6 jours qui figure dans le top 3 des préférées de Yoann Stuck, s’arrête en 2025. Dommage, car l’organisation offrait une expérience totalement unique sur le célèbre Colorado Trail…

OURAY Climbing to Fort Peabody
Prenez de l’altitude avec la Ouray 100.

Du trail au tourisme, il n’y a… qu’une foulée !

S’il fait rêver pour ses courses sauvages dans des décors grandioses, le Colorado est surtout un État qu’il faut venir prendre le temps de vivre, été comme hiver, tant l’offre outdoor est dingue ! Et les Texans voisins ne vous diront pas le contraire, qui en ont fait leur « résidence d’été » favorite. Si vous aimez les fameuses « maisons sur roues », vous allez être gâté, on en voit des dizaines qui parcourent le territoire dans tous les sens pour profiter de son immense potentiel.

Arpenter le Colorado, c’est aussi l’occasion de plonger dans l’Histoire du pays. Un passage au cœur du Mesa Verde National Park ou du Chimney Rock vous fera découvrir que contrairement à nos idées reçues, non ! tous les Indiens de la grande époque du Far West ne vivaient pas sous des tepees en toile mais à l’abri de maisons troglodytes et étaient beaucoup plus sédentaires qu’on ne l’imagine. Plus récent, le fameux train à vapeur de Durango, qui servait à l’origine à acheminer les minerais d’argent et d’or extraits dans la région de Silverton, dans les San Juan Mountains, vers la ville de Durango, fait toujours résonner son sifflet dans les montagnes.

Outre Mesa Verde, le Colorado compte trois autres parcs nationaux : Rocky Mountain, le parc le plus célèbre de l’État, Great Sand Dunes pour les nostalgiques du Marathon des Sables et Black Canyon of the Gunnison. Louer une voiture pour partir à leur découverte est nécessaire, et bonne nouvelle, le carburant est toujours moins cher là-bas ! Bon à savoir, il ne faut pas hésiter à choisir une voiture type SUV ou 4×4 si l’on souhaite par exemple suivre la Hardrock ou même tout simplement aller explorer un peu l’État, la notion de route bitumée n’étant pas forcément évidente et les risques de se retrouver coincé bien réels. Mais finalement, le plus gros risque que l’on prend en allant au Colorado, c’est que l’on a très vite plus qu’une idée en tête : y revenir !

Mesa Verde National Park_Cliff House (Crédit Travel Shooters)
Le Mesa Verde National Park. Photo Travel Shooters

Colorado : le City Guide de Cécile Bertin

Silverton

Silverton, la ville de la Hardrock, est en réalité plus un village, avec une offre hôtelière très limitée et surtout très chère durant l’été. The Wyman offre des lits dans des dortoirs de luxe abordables en pleine saison touristique.

Telluride

Telluride n’est pas seulement une base de vie de la course, c’est surtout et avant tout une station de ski réputée qui l’été devient un spot de randonnées très couru. Bon plan : choisir un hôtel au Mountain Village, sur les hauteurs, comme The Peaks Resort pour profiter de la piscine avec vue et « descendre » en ville grâce aux remontées mécaniques totalement gratuites.

Durango

Durango, avec son panorama donnant sur la montagne de San Juan, est dans le pur style US. L’idéal est de choisir un hôtel sur la rivière Animas, comme le DoubleTree by Hilton. Vous serez juste à côté d’un supermarché, d’une station-service et à deux pas du centre-ville. À faire : une excursion en 4×4 avec Mild to Wild, histoire de comprendre les différences notoires entre le Colorado Trail et nos GR, qui offrent de nombreux refuges d’altitude. Ici, il n’y a rien. L’autonomie est donc de mise pour la randonnée itinérante en montagne, en prenant bien en compte les kilomètres nécessaires pour redescendre dans la vallée se ravitailler. Plus original, Mild to Wild propose aussi des excursions en rafting itinérant avec camping et chamallows grillés le soir au coin du feu. So yankee !

Cortez

Cortez, dont le nom vient du conquistador Hernan Cortez, est la ville située au pied de la majestueuse Mesa Verde. Très gros coup de cœur pour une maison d’hôtes exceptionnelle, les Anciens Echoes at Kelly Place, située au sein même du parc naturel à côté d’un site archéologique protégé. La petite balade au lever du soleil au sommet du canyon voisin est un incontournable.

Pagosa Springs

Pagosa Springs est une petite ville connue pour ses sources d’eaux chaudes qui sentent un peu bizarre mais qui sont parfaites pour la récupération après une longue randonnée à pied ou en VTT. Profitez du coucher du soleil avec une Margarita bien glacée avant d’aller déguster des tacos au Kip’s Grill and Cantina. Pour le logement, The Drift, un hôtel original sans réception où un code vous permet d’accéder à votre grande chambre familiale, est le spot parfait avec son barbecue immense et ses vélos en libre-service.

Alamosa

Alamosa est connu pour ses dunes de sable bloquées par la montagne, nées après que la mer s’est retirée. Visiter The Great Sand Dunes Oasis est une activité à ne pas manquer, sans oublier la cascade Zapata à quelques kilomètres de l’entrée. L’hiver, ils organisent un trail blanc sur le Rio Grande gelé et la cascade se transforme en spot à escalade façon esquimau glacé. Mais Alamosa, c’est surtout la ville du cross-country avec un club connu dans tous les États-Unis, où l’on vient du monde entier s’entraîner, et son Campus Café réputé pour ses petits-déjeuners dignes d’un brunch à un prix ultra raisonnable. Bon à savoir, c’est le lieu de ralliement de tous les coureurs pro ou amateurs de la ville après leur entraînement du matin.

Colorado Springs

Colorado Springs n’est pas seulement la ville où Anton Krupicka a fait ses études, c’est aussi un spot idéal pour des activités outdoor en tous genres ! Située à proximité du fameux Pikes Peak culminant à 4 301 mètres d’altitude, vous y trouverez des tonnes de randonnées à faire avec des départs juste en périphérie de la ville. On vous conseillera de partir randonner à vélo ou à pied au Garden Of The Gods Park (ils y organisent un 10 miles en juin d’ailleurs !), et d’en profiter pour vous initier à l’escalade. L’accès au parc est gratuit et il ne faut absolument pas rater le petit film de présentation, très réussi. Si vous êtes en jambes, osez affronter le fameux Manitou Incline et son dénivelé supérieur à 40%, véritable KV local !

Au passage, faites un crochet par le musée de l’Olympisme et les nombreuses activités qu’il propose, car la ville accueille plein d’équipes pour leur préparation en vue des Jeux. Terminez votre séjour par l’inévitable tyrolienne de Adventure Out West, aussi fun pour les petits que les grands enfants que nous sommes tous.

Denver

Denver, capitale de l’État, abrite entre autres le siège social d’Altra Running, et présente surtout l’intérêt d’être accessible en vol direct avec Air France. Ville industrielle à la base, elle est en train de réaliser sa mue avec, comme souvent aux USA, la part belle à de nouveaux quartiers où le street art a libre cours. L’offre de logements est riche, à vous de jouer.

Boulder

Boulder est devenue en quelques années la Mecque du trail, et le fait qu’Anton Krupicka, Scott Jurek ou Joe Grant – pour n’en citer que 3 – s’y soient établis a fait de cette petite ville un lieu de visite incontournable. L’offre hôtelière y est très importante, avec toutes les grandes chaînes américaines, mais si vous avez des envies d’ambiance old USA, le « Foot of the Mountain Motel » est fait pour vous. Un peu à l’écart de la ville, cet établissement rénové offre tout ce qu’on aime : un style rétro à souhait, du bois et la nature juste à côté.

Pour les ravitaillements, on fonce découvrir les adresses préférées d’Anton en espérant le croiser : le Trident Cafe, qui fait aussi librairie, et la Spruce Confections Bakery pour sa terrasse et ses pâtisseries. Une envie de pizza et peut-être d’avoir comme voisin de table Scott Jurek ? C’est chez Alberico qu’il faut foncer ! Pour un burger, pas le choix, c’est chez The Sink. Même Obama a fait un crochet pour y dîner alors qu’il était président et invité à l’université !

Pour aller plus loin : le site de l’office du tourisme colorado.com, indispensable pour préparer son séjour là-bas.

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Boulder, au pied des montagnes.

Le Colorado de Christophe Le Saux

Globe-trotteur invétéré, organisateur de nombreux voyages de trail-évasion partout dans le monde, l’ultra-runner Christophe Le Saux, alias le Jaguar, a le Colorado parmi ses destinations de cœur, où il entraîne chaque année des petits groupes à la découverte de son Colorado Trail, un périple de 210 km et 10000m D+ en 8 étapes. Il nous dévoile ses 5 spots préférés.

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L’infatigable Jaguar au sommet du Pikes Peak.

Spot Colorado N°1 : Rocky Mountain National Park

Pourquoi : C’est l’un des plus célèbres parcs pour la rando et le trail running. Il offre plus de 570 kilomètres de sentiers, allant de parcours relativement faciles à des montées plus ardues vers des sommets élevés. Les paysages sont spectaculaires, avec des forêts alpines, des prairies et des lacs glaciaires. Pour les coureurs à la recherche de défis, il est possible d’explorer des sommets comme le Longs Peak.

Sentier recommandé : C’est le Chasm Lake Trail. Il est technique et il offre une vue imprenable sur le Longs Peak.

Spot Colorado N°2 : Great Sand Dunes National Park

Pourquoi : Courir sur les plus hautes dunes d’Amérique du Nord est une expérience unique. Le terrain sablonneux apporte un défi supplémentaire aux coureurs, testant l’endurance et l’agilité. Le cadre désertique et les vues panoramiques sur les dunes et les montagnes Sangre de Cristo en arrière-plan sont époustouflants.

Sentier recommandé :
On peut créer son propre itinéraire dans les dunes ou suivre des sentiers comme celui menant au High Dune, offrant un défi physique dans un cadre spectaculaire.

Great Sand Dunes NP (Crédit Travel Shooters)
Great Sand Dunes National Park. Photo Travel Shooters

Spot Colorado N°3 : Black Canyon of the Gunnison National Park

Pourquoi : Ce parc est connu pour ses falaises abruptes et ses vues incroyables sur le canyon. Les sentiers sont souvent escarpés et techniques, parfaits pour les coureurs à la recherche d’un défi intense dans un cadre moins fréquenté que certains autres parcs.

Sentier recommandé :
Le Rim Rock Trail, qui suit le bord du canyon. Les vues sont imprenables tout au long du parcours.

Spot Colorado N°4 : Mesa Verde National Park

Pourquoi : Ce parc offre une expérience unique pour les passionnés de nature et d’histoire. En plus de magnifiques paysages désertiques, les coureurs peuvent explorer des sentiers qui mènent à d’anciennes habitations amérindiennes creusées dans les falaises. Bien que les sentiers soient généralement plus courts, ils sont techniques et offrent une immersion dans une histoire fascinante.

Sentier recommandé :
Le Petroglyph Point Trail est un excellent choix, mêlant découvertes archéologiques et vues panoramiques sur les canyons.

Spot Colorado N°5 : Colorado National Monument

Pourquoi : Situé près de Grand Junction, ce parc offre des falaises rouges spectaculaires, des canyons profonds et des formations rocheuses étonnantes. Les sentiers sont une succession de montées raides et des descentes rapides, le tout dans un décor digne des grands parcs de l’Utah voisin.

Sentier recommandé :
Le Serpents Trail, qui grimpe sur le flanc d’un canyon, est idéal pour les coureurs cherchant un terrain exigeant avec des vues à couper le souffle.

PHOTO Clément Cangiano
Photo Clément Cangiano
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450 km, 32000m de D+, le Tor des Glaciers est un monstre effrayant, que seule une volonté de fer permet de terminer. En septembre 2023, Perrine Fages, athlète d’ultra-endurance, s’est lancée dans ce défi. Le bonheur, la chute, la souffrance, la lutte contre les barrières horaires, le film CONTRE LA MONTRE réalisé par Valentin Orange, récompensé au festival Le Trail Fait Son Cinéma en mars 2024, est le magnifique récit plein de rebondissements de 7 jours au cœur du Val d’Aoste pour une aventure hors normes. Il est enfin disponible sur YouTube. A voir absolument !

Voir le film ICI

Perrine Fages, une guerrière de l’ultra-distance

Elle n’a peur de rien, ou presque. Perrine Fages est de la race des guerrières, qui s’accomplissent dans la réalisation d’aventures hors normes. Polyvalente, tout ce qui commence par « ultra » l’attire : Ironman, Bickingman, ultra-trails… Un exemple de la démesure de son talent et sa volonté ? En 2018, elle tente de battre le record féminin de l’Enduroman Arch-2-Arc, le triathlon le plus dur du monde, qui consiste à relier la Marble Arch de Londres à l’Arc de Triomphe de Paris sur un parcours comprenant 140 kilomètres de course à pied, la traversée des 35 km de la Manche à la nage (distance qui peut faire le double en fonction des courants) et 291 kilomètres de vélo pour finir. Hélas, elle échoue, sortie de l’eau par l’organisation à seulement quelques kilomètres du rivage. Mais 2 mois plus tard, en août, elle remet ça, et s’empare du record en 67 heures et 21 minutes. Si, depuis, sa performance a été améliorée, cela illustre le caractère de cette sportive exceptionnelle, avocate de métier.

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Source CONTRE LA MONTRE

Perrine Fages et l’ultra-trail

Si Perrine Fages ne joue pas les premiers rôles et ne vise pas les podiums, on trouve dans son palmarès de finisheuse quelques-unes des plus belles courses du monde. Ainsi, une TDS, une Diagonale des Fous et un Oman by UTMB de 170 km enchaînés en 3 mois en 2019, une SwissPeaks 360 en 2020, au sortir du confinement, un enchaînement UTMB – Tor des Géants en 2021, ou encore un Marathon des Sables en 2022. Son dernier grand défi bouclé : l’Eiger Ultra-Trail, ses 254km et 15000m D+ en juillet dernier.

Sur ces courses, elle confie : « J’ai participé à de nombreux ultra-trails : l’UTMB, la PTL, le Tor des Géants, le Marathon des Sables… mais mon préféré demeure la SwissPeaks 360. Mon premier 200 miles. Une traversée grandiose, au coeur des « 4000 » des Alpes, dans le Valais Suisse. J’y ai participé pour la première fois en septembre 2020, au sortir du confinement. Pour me préparer, j’avais effectué le GR 20, en Corse, et beaucoup de volume en endurance à vélo. […] Tout au long de l’épreuve, j’ai éprouvé ‘puissance 1000’ la solidarité qui existe entre les traileurs. On a secouru une coureuse japonaise accrochée à une falaise, en panique. On a franchi des cols enneigés très engagés. J’ai partagé des bouts de route avec des gens fabuleux. On s’est aidé à repousser nos limites. On a traversé tout le Valais par les crêtes. C’est extraordinairement beau. Si beau, qu’à l’issue de l’ultime ascension, lorsque j’avais vu en contrebas le lac où se situait l’arrivée, j’avais imploré pour qu’il reste encore une ou deux petites arêtes. Je n’avais pas envie de redescendre. J’étais si bien là-haut, avec les personnes que j’avais rencontrées, qui étaient devenues mes compagnons de cordée. »

Pour aller plus loin, à écouter, le podcast du blog nöliö Perrine Fages, secrets d’endurance, un échange entre Eric Lacroix et Perrine Fages sur la force mentale entre échecs et réussites.
Ecoutez ICI

Voir CONTRE LA MONTRE

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Participer à un trail dans le désert, franchir des dunes, longer des canyons de roches ocres et récupérer le temps d’un bivouac en pleine nature est une expérience intense et riche en émotions, que tout coureur se doit de vivre une fois dans sa vie. Ça tombe bien, les épreuves par étapes en milieu désertique se multiplient, toutes plus attrayantes les unes que les autres. Notre sélection pour 2025. À vous de choisir votre bac à sable.

Oman Desert Marathon

Oman Desert marathon
Oman Desert Marathon. Photo Organisation

Foulez le désert d’Oman, ses sables plus reculés et intacts en 165 km en 5 étapes de l’Oasis d’Alwasil jusqu’à Bediyah, avec une longue étape de 42 km. Egalement 100, 42, 21 km et 10 km à l’affiche.

Prochaine édition du 18 au 22 janvier 2025

A lire : courir dans le sable mode d’emploi

MDS – 5 destinations

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MDS Cappadocia. Photo Organisation

Anciennement nommé Half MDS, les MDS sont des épreuves d’une semaine sous forme de 4 jours d’aventure au milieu du désert en autonomie alimentaire totale (hors eau) durant la course. Les parcours sont divisés en 3 étapes et avec 3 distances au choix en fonction des destinations (70, 100 ou 120km) à réaliser en courant et en marchant.

Prochaines épreuves :
Maroc / Atlantic Coast du 25 janvier au 1er février 2025 (1ère édition)
Turquie (Cappadoce) du 21 au 28 juin 2025
Namibie du 26 avril au 3 mai 2025 (1ère édition)
Jordanie du 9 au 16 mai 2025
Pérou du 29 novembre au 6 décembre 2025

A lire : Courir dans le désert, les 6 conseils de Cécile Bertin, « reine des sables »

Trans Sahara Marathon – Maroc

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Trans Sahara Marathon / Photo Organisation

Un ultra marathon d’environ 150km en 4 étapes dans le désert du Sahara organisé par Mohamad Ahansal, légendaire coureur du désert connu pour ses 5 victoires au Marathon des Sables.

Prochaine édition du 14 au 22 février 2025

Jordan Running Adventure Race

Jordan Running Adventure Race
Jordan Running Adventure Race. Photo Organisation

Une aventure inoubliable au cœur du désert du Wadi Rum, avec une course, des visites et des hébergements de qualité. 100 km ou 60 km en 3 étapes en semi-autonomie ou bien 185 km non-stop avec un départ de Petit Petra, un passage dans le site antique de Petra, puis un final dans l’exceptionnel désert jordanien.

Prochaine édition du 15 au 22 février 2025

Treg Ennedi Trail

TREG-TCHAD OK
TREG Tchad. Photo Organisation

3 courses non-stop (180, 90 et 54 km) dans le désert de l’Ennedi du Tchad en autosuffisance et auto-navigation par GPS. Cette région méconnue et très préservée est tout simplement grandiose. Programme pour les marcheurs et les accompagnants.

Prochaine édition du 15 au 25 février 2025

Tizi N’Trail – Maroc

Tizi N'Trail : Photo Organisation : DR
Tizi N’Trail / Photo Organisation

Une épreuve qui permet tous les ans de découvrir différentes facettes du Maroc. L’an prochain, cette nouvelle édition se déroulera dans la région de l’erg Chegaga, l’une des 2 plus grands zones de dunes du Maroc, au sud de Zagora. 3 étapes au programme.

Prochaine édition du 10 au 16 mars 2025

Marathon des Sables – Legendary – Maroc

ATHLETICS-MAR-MARATHON-DES-SABLES
Marathon des Sables – The Legendary. Photo Organisation

C’est la course désertique la plus connue du monde, imaginée par Patrick Bauer après avoir parcouru le Sahara en solitaire et en autonomie totale en 1984. Si Patrick a tiré sa révérence en 2024, l’aventure continue, avec environ 250km en 6 étapes, mais surtout 7 jours en autosuffisance alimentaire totale.

Prochaine édition du 4 au 14 avril 2025

Namib Race – Namibie

Namib Race : Photo Organisation
Namib Race / Photo Organisation

C’est dans le plus vieux désert et les plus grandes dunes du monde que se déroule cette course par étapes de 7 jours et environ 250 km. Vastes plaines rouges, affleurements montagneux, immenses étendues de dunes de sable, paysages lunaires et vagues de l’océan Atlantique se brisant contre le rivage sablonneux, le parcours offre un dépaysement total.

Prochaine édition fin avril 2025

Atacama Crossing – Chili

Atacama Crossing - Photo Organisation : DR
Atacama Crossing. Photo Organisation /DR

Course de 250 km qui se déroule dans le désert d’Atacama, considéré comme le désert le plus sec du monde (là où il ne pleut jamais). 6 étapes au programme : pratiquement 4 marathons en 4 jours, puis une « étape longue » de 74 km, un jour de repos et une dernière étape de 11 km.

Prochaine édition du 30 avril au 5 juin 2025

Gobi March – Mongolie

Gobi March Photo Organisation : Thiago Diz
Gobi March / Photo Organisation – Thiago Diz

Le Gоbі Mаrch еst unе cоursе par étapes de 6 jоurs, pоur unе dіstаncе d’environ 250 kіlоmètrеs. Particularité : les tеmpérаturеs sоnt d’еnvіrоn 10°C sur lа prеmіèrе pаrtіе dе l’éprеuvе, pоur pаssеr еnsuіtе à dеs vаlеurs cоmprіsеs еntrе 35 еt 45°C.

Prochaine édition du 22 au 28 juin 2025

Treg Algeria Trail – Algérie

TREG ALGERIA - Photo Linka Production – V. Kronental – Le Treg
TREG Algeria – Photo Linka Production – V. Kronental – Le Treg

C’est dans une très belle oasis du Sahara en bordure du Grand Erg Occidental, dans une zone dunaire très étendue, que se déroule le Treg Algeria Trail, une aventure d’ultra-trail par étapes en autosuffisance sur 3 formats possibles : 50, 106 et 182 km.

Prochaine édition du 29 novembre au 6 décembre 2025

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Du 9 au 17 novembre prochains, environ 150 concurrents vont s’élancer pour la 7ème édition du Grand Trail de la Vallée du Drâa, le GTVD, au cœur du grand désert et d’une des plus belles palmeraies du Maroc. Une course sur un parcours de 180 km divisé en 5 étapes en semi-autonomie qui a séduit le créateur du Marathon des Sables, au point qu’il en est devenu le parrain. Présentation.

Voir le film de l’édition 2023 ICI

Grand Trail de la Vallée du Drâa : retour aux sources pour Patrick Bauer

Si, depuis qu’il a cédé son Marathon des Sables à Cyril Gauthier, nouveau patron de la galaxie MDS (entre le MDS devenu Marathon des Sables – The Legendary et les Half-MDS organisés dans différents pays et rebaptisés MDS suivi du nom du pays, pas moins de 10 épreuves sont prévues en 2025 !) Patrick Bauer n’a contractuellement plus le droit d’organiser une course au Maroc, rien ne l’empêche de la parrainer, voire d’en courir une partie, bénévolement bien sûr. Et, en grand sentimental qu’il est, l’homme qui a porté à bout de bras 37 éditions de « sa » course, participant à la rendre légendaire, n’a pas pu résister au plaisir de parrainer ce Grand Trail de la Vallée du Drâa, synonyme de retour aux sources puisque c’est par une boucle autour de Zagora, « capitale » de la vallée, qu’a débuté l’aventure MDS.

Mais ce parrainage est aussi celui de l’amitié. Avec un homme d’abord, Lhoucine Akhdar, créateur de l’épreuve et directeur de course né à Zagora, mais également ultra-traileur émérite, 17 fois finisher de la course de Patrick Bauer, dont une 3ème place en 2005. Avec une famille ensuite, celle de Lhoucine, Samir et Ismael, les 3 frères qui ont souvent couru le MDS aux couleurs de la fondation Solidarité Marathon des Sables pour les enfants créée par Patrick Bauer, et à qui il devait ce juste retour des choses. Et avec un peuple enfin, le peuple marocain, pour lequel Patrick Bauer est très investi à travers sa fondation qui organise des actions en faveur de l’enfance et des populations défavorisées dans les domaines de la santé, de l’éducation et du développement durable au Maroc, notamment avec le centre qu’il a créé à Ouarzazate.

Patrick Bauer
Patrick Bauer. Photo DR

Le Drâa, le plus long fleuve du Maroc

Prenant sa source dans le Haut Atlas, puis serpentant durant 1200 kilomètres à travers les montagnes de l’Anti-Atlas, irriguant une des grandes palmeraies du Maroc, puis traversant le désert avant de se jeter dans l’océan Atlantique à Foum-Drâa, le Drâa, formé par la réunion de plusieurs rivières, est le fleuve le plus long du pays. Aujourd’hui, il est la plupart du temps à sec et ne rejoint l’Atlantique que lors de crues exceptionnelles. Mais l’eau ne manque pas dans la vallée du Drâa, longue d’environ 250 kilomètres, qui offre des paysages étonnants, entre dunes dorées, montagnes noires, oasis, palmiers dattiers, champs cultivés, arbres fruitiers et cultures maraichères. 

La vallée du Drâa est aussi connue pour ses superbes kasbahs et ksours en terre ocre. Ces constructions typiques de la région dominent la vallée. Pendant plusieurs siècles, la vallée du Drâa a constitué un carrefour pour les caravanes qui commerçaient entre l’Afrique saharienne et subsaharienne (Tombouctou au Mali, Niger, Sénégal…) vers le Maghreb et l’Europe. Le mythique panneau : Tombouctou 52 jours au centre de Zagora en témoigne.

C’est justement dans la province de Zagora, petite ville d’environ 50 000 habitants située à 700 m d’altitude sur le versant sud de l’Anti-Atlas, blottie au bord de l’oued Drâa, au cœur de l’une des plus belles palmeraies du Maroc, que se déroule le Grand Trail de la Vallée du Drâa.

GTVD. Photo Organisation
GTVD. Photo Organisation

Grand Trail de la Vallée du Drâa : une course qui marque les esprits

Proposé dans le plus pur esprit trail et nature, le GTDV est une course à pied par étapes en semi autonomie à allure libre dans laquelle tout le monde peut trouver sa place, souligne Lhoucine Akhdar, l’organisateur. Bien sûr, l’aspect compétition peut en motiver certains, et de belles têtes d’affiche sont présentes chaque année, mais le côté découverte et l’aspect convivial de l’épreuve, qui regroupe moins de 200 concurrents, lui confère également un caractère unique.

L’épreuve, qui se déroule sur une semaine complète, est découpée en 5 étapes de 13 à 60 km environ, pour un total de 180 km environ. Le parcours emprunte principalement des sentiers et des chemins dans le désert ou dans la palmeraie et traverse des lieux représentatifs de la vallée du Drâa, tels que les kasbahs et les ksours en terre ocre, les palmeraies, les plateaux caillouteux, les oueds asséchés, les montagnes de l’Anti-Atlas et les grandes dunes de sable. Le parcours exact n’est dévoilé qu’au moment de la remise des dossards. Le bivouac (tentes de 3 à 4 personnes), les petits déjeuners et les dîners sont fournis par l’organisation, ainsi que l’eau et un ravitaillement solide à la fin de chaque étape. Seule la réserve alimentaire pour chaque étape est à la charge du participant.

Retrouvez toutes les informations sur la course et le règlement complet ICI

GTVD Desert
GTVD. Photo Organisation
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« Petite Balade Alpine » est le nom du groupe de WhatsApp que Kilian Jornet avait créé avec les amis qui l’ont aidé au cours d’Alpine Connections, son voyage dans les Alpes, où il a relié en 19 jours les 82 sommets de plus de 4000 mètres d’altitude. Si Esprit Trail a pu vous faire vivre au jour le jour l’incroyable performance du Patron, de nombreux points de cette aventure n’ont pas été abordés, faute d’information. En publiant son carnet de route complet, Kilian Jornet en a révélé certains. Voici la compilation de tout ce que vous ne saviez pas encore – ou partiellement seulement – sur Alpine Conections.

Alpine Conections : qui composait l’équipe de Kilian Jornet

Même s’il a fait le voyage de façon autonome, Kilian Jornet a reçu de l’assistance. Aina, qui l’a accompagné dans de nombreux projets, de l’Himalaya aux Pyrénées, dirigeait l’équipe, s’assurant de lui fournir des aliments et un endroit où dormir, et gérant l’équipe de tournage. Nuria, sa mère, était également là. La première semaine, elle est restée avec Emelie et les filles de Kilian dans le Valais, puis elle a suivi Aina. David Ariño, Joel Badia et Nick Danielson s’occupaient de filmer la traversée. Finalement, Noa Barrau, un ami de Mathéo Jacquemoud, a rejoint Kilian Jornet pour les dernières étapes et filmer aussi dans les montagnes.

Pendant les 10 premiers jours, Jesús Alvarez-Herms et Sergi Cinca ont pris des mesures physiologiques et cognitives quand Kilian descendait entre les montagnes pour étudier les effets de ces événements extrêmes. Ensuite, des personnes telles que Anouchka, Sofia, Joan, Andreu, sont venues aider Kilian Jornet certains jours. Il a également appelé quelques amis pour voir s’ils voulaient se joindre à lui et partager une partie du voyage, comme Michel Lanne ou Benjamin Védrines pour l’ultime étape dans les Écrins.

Alpine Connections - Kilian Jornet 1
Photo Alpine Connections

Alpine Conections : quelques données physiologiques sur Kilian Jornet

Physiquement, Kilian Jornet considère avoir très bien géré cette traversée. Son poids est resté stable tout le temps. Alors que lors de son aventure de 8 jours dans les Pyrénées son poids avait diminué et sa dégradation avait été constante, dans les Alpes il n’a perdu que quelques kilos sur une longue étape mais il les a récupérés rapidement sur les étapes plus faciles. Ainsi, lors de Sierre-Zinal Kilian Jornet pesait 54 kg, et après la dernière étape aux Écrins il pesait 54 kg.

En dehors des considérations de poids, et même si il reconnaît avoir perdu de la puissance et de la vitesse, Kilian Jornet précise qu’il a pu maintenir un rythme de descente constant. Les 2 derniers jours au Grand Paradis et aux Écrins lui ont même démontré qu’il n’avait pas beaucoup perdu au niveau métabolique. Quant aux douleurs et autres, les mains étaient selon lui plutôt OK.

Il considère ce résultat comme étant sans doute dû à son très bon état de santé/forme au début du projet et à sa stratégie alimentaire pendant la traversée, basée sur le suivi des rythmes circadiens, mangeant peu de fois dans la journée mais en grande quantité et, en bas entre les montagnes, prenant des aliments faciles à absorber (anti-inflammatoires, gestion de l’acidité, augmentation des protéines, des graisses…) et s’hydratant bien, car en haute montagne il ne pouvait pas boire beaucoup (environ 1 litre par jour quand il grimpait).

Kilian Jornet considère que Jesús Alvarez-Herms et Sergi Cinca ont été d’une grande aide car ils lui ont donné des conseils sur les nutriments (macro et micro) nécessaires pour récupérer au jour le jour, et pour absorber la quantité de nutriments et d’énergie dont il avait besoin. Or la gestion de l’alimentation, non seulement les calories ingérées/dépensées, mais aussi les nutriments nécessaires pour absorber ces calories et restituer les fonctions systémiques, est essentielle pendant ces projets à long terme. Après l’analyse de toutes les données collectées pendant le projet, l’équipe de suivi de Kilian Jornet pourra certainement tirer des conclusions plus claires sur les processus internes qui se produisent pendant ce type d’efforts.

Alpine Connections - Kilian Jornet 2
Photo Alpine Connections

Alpine Conections : blessures, douleurs et regain d’énergie

Kilian Jornet a effectué les ascensions le plus souvent avec des gants et cela a épargné la plupart de sa peau. Il précise que les 4 paires de gants utilisées pendant la traversée étaient toutes complètement usées à la fin, avec des trous dans tous les doigts.Ses pieds étaient ok, même si des durillons se sont formés sur la voûte plantaire ou au niveau des crampons.

Une de ses côtes et son ligament extenseur gauche étaient douloureux, mais à cause d’accidents. Kilian Jornet a d’ailleurs constaté que sa côte a été assez douloureuse pendant les 2-3 jours, surtout lors de certains mouvements d’opposition en grimpant, mais qu’ensuite la douleur s’est complètement estompée jusqu’à la fin. Mais dès son retour chez lui, en Norvège, la douleur est revenue avec une haute intensité pendant 2 semaines. Kilian Jornet explique que cela est sans doute dû à la gestion/élimination du signal neuronal pendant une période où sa routine impliquait de nombreuses heures et mouvements où la côte était mobilisée.

Passionné par les informations scientifiques et les observations sur le fonctionnement du corps humain, Kilian Jornet souligne que cette aventure a été un apprentissage intéressant sur la façon dont, dans différentes situations, l’homme peut s’adapter au niveau hormonal et neuronal pour gérer différentes situations, à la fois à court terme (par exemple, lors d’une chute, d’une avalanche ou d’un éboulement, les niveaux d’adrénaline procurent un regain d’énergie), à moyen terme (par exemple, en cas d’indisponibilité d’apport énergétique dans une situation de risque, le corps humain est capable de continuer à différentes intensités pendant un jour ou deux jusqu’à atteindre une situation de sécurité) ou à long terme (comment le signal neuronal de la douleur d’un os fracturé est éliminé pendant plusieurs semaines dans une situation où l’os est mobilisé en permanence, jusqu’à ce que la situation s’achève).

Kilian Jornet ajoute qu’il est également très intéressant de voir comment la réponse hormonale à des situations dangereuses peut entraîner un regain d’énergie en intensité et en durée. La libération d’hormones telles que l’adrénaline, le cortisol, etc., dans des situations où il devait continuer sans manger, aller plus vite qu’au cours des minutes/heures précédentes ou faire un mouvement qui exigeait plus de force que celle qu’il croyait avoir, était très perceptible.

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Photo Alpine Connections

Alpine Conections : un effort émotionnel intense

Pour Kilian Jornet, le plus difficile dans une traversée de ce genre a été de rester vigilant et concentré pendant si longtemps, sachant que les conditions étaient parfois difficiles. Si le coût physique est élevé (ce que les données collectées pourront permettre de mesurer dans un second temps), c’est la fatigue émotionnelle et cognitive qui est, à son sens, plus importante.

Comparant les efforts déployés dans le projet Alpine Connections par rapport à d’autres projets entrepris, Kilian Jornet estime que la plus grande différence a été la continuité de la concentration. Lors du projet des Pyrénées de 2023, le Patron avait terminé beaucoup plus fatigué physiquement, mais, explique-t-il, sans doute à cause d’une mauvaise approche en matière de ravitaillement et de « repos ». En revanche, il souligne que le fardeau mental était moindre car le seul danger était sa possible erreur technique.

Autre exemple de comparaison : dans une expédition dans l’Himalaya, où l’on tente une voie difficile, le niveau de stress mental est élevé, mais souvent concentré sur les quelques jours ou heures de poussée, car il y a beaucoup de repos entre les poussées. Dans la traversée Alpine Connections, comme l’itinéraire consistait principalement à rester jour et nuit sur les crêtes pour relier les sommets, Kilian Jornet a dû rester attentif aux dangers la plupart du temps, qu’ils soient internes (erreur technique, fatigue neuromusculaire…) ou externes (crevasses, séracs, chutes de pierres, effondrements de rochers…). Un effort de concentration d’une durée qu’il n’avait jamais connu auparavant !

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Photo Alpine Connections

Alpine Conections : quelles chaussures a utilisé Kilian Jornet ?

Créateur de NNormal en collaboration avec l’équipementier espagnol Camper, Kilian Jornet a bien entendu utilisé du matériel de trail – chaussures et textile – de sa propre marque. Concernant les chaussures, durant les 19 jours de son périple, il a utilisé de 3 paires de chaussures du modèle Tomir 2. Il précise avoir utilisé des Tomir 2 imperméables à partir du premier jour, pour faire face aux conditions climatiques humides. Il a également utilisé une paire de Tomir 2 non imperméables sur le Nadelgrat, une des plus belles arêtes du Valais, pour que les imperméables puissent sécher. Au refuge de Turin, sur le versant italien du massif du Mont-Blanc, il a changé pour une autre paire de Tomir 2 non imperméables qu’il a utilisées pour les 4 derniers jours.

Kilian Jornet reconnaît que ses Tomir 2 imperméables étaient pratiquement hors d’usage, avec une semelle plate et quelques coupures dans la tige dues aux crampons et aux rochers. « Ce sont des chaussures souples qui sont bonnes pour courir, marcher et grimper en technique d’adhérence mais qui requièrent une bonne cheville et une technique de « 10 pointes » lors de l’escalade sur glace avec des crampons, ainsi qu’une technique différente lors de l’escalade sur rocher par rapport aux chaussures de montagne », précise le Patron.

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Photo Alpine Connections

Alpine Conections : quels vêtements ont équipé Kilian Jornet ?

Tout comme pour les chaussures, c’est chez NNormal que Kilian Jornet a logiquement pris son équipement. De bas en haut, il a utilisé des chaussettes NNormal Race Socks et des chaussettes imperméables selon les étapes, et une paire de collants Men’s Active Tight ou un pantalon de sport selon les jours. Il avait aussi un pantalon imperméable au cas où. Pour le haut, il portait un tee-shirt en mérinos, avec selon la météo et la période de la journée ou nuit une seconde couche intermédiaire, un coupe-vent, une veste de pluie et une doudoune, le tout griffé NNormal.

Pour la tête, un buff et un bonnet. Il a également utilisé pendant le voyage 4 paires de gants d’escalade – type faux cuir –, la plupart du temps pour protéger ses mains de l’abrasion des rochers plus que pour se protéger du froid. Il avait aussi une paire de guêtres qu’il a utilisées lors de l’étape 3, une longue étape de 99 kilomètres avec 7890 mètres de dénivelé dans l’Oberland.

Photo Alpine Connections

Alpine Conections : quelle protection et quels accessoires ?

Pour la protection solaire, Kilian Jornet a utilisé des lunettes de soleil (il avait 2 paires de lunettes de catégorie 4) et de la crème solaire pour les lèvres et le visage. Pour sa protection et sa progression, le Patron avait un casque, un harnais léger, une broche à glace, 2 piolets (il n’en utilisait qu’un seul à la fois, précise-t-il, mais selon les étapes il prenait un en carbone pour glace et roche ou un Ghost Tech de Grivel). Il avait également une paire de bâtons de trail.

Concernant les crampons, pour bien s’adapter aux chaussures, il a utilisé une base Petzl Lynx avec une fixation avant Grivel Soft, une fixation arrière Edelrid Soft et une cordelette Petzl. Pour certaines étapes, Kilian Jornet a utilisé des « chaînes à picots » à la place des crampons (sur les étapes de Piz Bernina et Grand Paradis), 1 mousqueton de sécurité, 1 cordelette et 1 mousqueton, des cordelettes, des cordes (il avait une Pure Dynema 5 mm de 40 mètres et une Beal Rad Line de 60 mètres de 5 mm selon les étapes), 1 broche à glace (Blue Ice 10 cm) et un mousqueton Avalakov, 2 cames (BD 0,4 et 1).

Pour les parcours de nuit, Kilian Jornet a utilisé une lampe frontale Moonlight 2000, avec toujours une batterie de rechange sur lui. Niveau suivi et communication, il avait un téléphone contenant les cartes, une montre Coros Vertix, un appareil de suivi, une GoPro, une Powerbank avec un câble, et de l’argent liquide pour les cabanes. Pour la nourriture et l’hydratation, il progressait avec 2 bidons souples et emportait de la nourriture pour chacune des étapes. Pour tout transporter, Kilian Jornet a utilisé un prototype de sac à dos de 25 à 30 litres.
Enfin, pour les transitions en vélo, Kilian Jornet a utilisé un vélo de route (Wilier Vertical), des chaussures, un casque, des vêtements de vélo et un compteur vélo Coros Dura.

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Photo Alpine Connections

Alpine Conections : Kilian Jornet et la question de « l’alpinisme »

Cette aventure est-elle de l’alpinisme ? C’est une question récurrente, à laquelle Kilian Jornet donne une réponse singulière : « Il y a longtemps, lors de ma première expérience dans l’Himalaya, à l’intérieur du gîte, buvant du thé pendant que la neige recouvrait de plus en plus les montagnes que nous voulions escalader, j’écoutais avec attention mes compagnons, tous deux avec une grande expérience de l’alpinisme technique et de la haute altitude. Je me souviens que Coro disait que « l’alpinisme » était ce jour où tu rentres chez toi et tu ne peux pas décrire ce que tu as fait. « J’ai vraiment escaladé ? Oui, mais ce n’est pas ce qui a rendu ça spécial… J’ai dormi dehors dans la neige ? Oui, mais ce n’est pas ça… J’ai marché sur des terrains exposés en m’épuisant physiquement ? Oui, mais n’est-ce pas ça non plus… »

Peut-être, seulement peut-être, l’alpinisme consiste à utiliser les outils et les connaissances acquises au fil des années pour résoudre les problèmes que la montagne nous présente sous différentes formes. Dans ce projet (Alpine Connections, NDLR), les chiffres ne représentent rien. La voie la plus technique de la traversée était un 5c, mais là c’était du bon rocher, une voie courante où la navigation n’entrait pas dans l’équation. De nombreuses voies plus faciles semblent beaucoup plus techniques, une cotation IV dans le sable ou sous une tempête de neige peut facilement devenir bien plus compliquée. Pendant cette traversée, je n’ai fait aucune nouvelle voie, je n’ai pas fait d’escalade difficile, mais à la fin, c’est compliqué de décrire ce que c’était. Après tout, la beauté réside dans le fait de ressentir ce que c’est sans la capacité de le décrire car il n’y a pas de mesures et d’étiquettes pouvant expliquer les émotions les plus profondes. »

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Alpine Conections : quelques données supplémentaires, et purement aléatoires

– La plupart du temps en montagne, le sac de Kilian Jornet pesait entre 4 et 7 kg.
– Kilian Jornet a gravi 34 sommets accompagné et 48 seul.
– Son sommeil le plus court a duré 15 minutes, et le plus long 7 heures.
– Mathéo Jacquemoud est celui qui a le plus suivi Kilian Jornet, réalisant lui-même 30 sommets.
– La nourriture la plus courante pour Kilian Jornet dans les montagnes a été des sandwichs avec de l’avocat, de l’huile et du fromage frais ou avec une « crème de cacao » maison avec des fèves, du cacao, des noix et de l’huile de coco.
– Kilian Jornet a dépensé en moyenne 8300 cal/jour (analyse précise effectuée durant les 7 premiers jours).
– Il a profité de 12 magnifiques couchers de soleil et de 11 levers de soleil incroyables pendant l’escalade.

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– Kilian Jornet n’a vu personne pendant 2 jours d’affilée.
– Les sommets où il a rencontré le plus de monde étaient l’Aletschhorn, le Mont Rose, le Cervin et le Grand Paradis.
– Le moment le plus « éclairant » a été l’ascension du Weisshorn, avec le coucher du soleil, le spectre brisé et la sensation de flotter vers le haut.
– Pour récupérer, ce que Kilian Jornet a le plus bu a été des infusions d’origan avec de l’huile de coco et des smoothies à la betterave, au gingembre et au curcuma.
– La nuit où il a le mieux dormi, c’était au bivouac d’Eccles, sur le versant italien du massif du Mont-Blanc. Seulement 3 heures, mais très profondément.
– Kilian Jornet a fait plus de 160 itinéraires différents durant le voyage. Certains étaient beaux, d’autres très beaux et d’autres moins. Ceux qu’il a le plus appréciés, pour la qualité du rocher, l’ambiance et/ou l’esthétique, étaient la traversée Lauteraarhorn-Schreckhorn, Dom-Täschhorn, Rimpfischhorn, l’arête Est de la Dent d’Hérens, l’Arbengrat à Ober Gabelhorn, le Rothorngrat à Zinalrothorn, Schaligrat à Weisshorn, Jorasses-Rochefort, Aiguilles du Diable et l’Arête du Brouillard.

Lire le journal complet de l’aventure Alpine Connections de Kilian Jornet ICI

Alpine Connections - Kilian Jornet 7
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