Christophe Le Saux : son exploit sur le plus haut volcan du monde

Christophe Le Saux Chili

Ultra-runner accompli et aventurier dans l’âme, Christophe Le Saux vient de pulvériser le record de vitesse aller-retour en autonomie totale du plus haut volcan du monde, l’Ojos del Salado, au Chili. 51 km et 3050 m+ en 15h39 pour atteindre les 6893 mètres du sommet, en partant du camp de base situé à 4550 mètres. Il raconte son exploit.

Ojos del Salado : un chrono référence datant de 2019

Le Nevado Ojos del Salado (les yeux enneigés du désert), au Chili, est le plus haut volcan du monde, et le deuxième plus haut sommet d’Amérique après l’Aconcagua. Un cône culminant à 6893m, au cœur de l’Atacama, le désert le plus aride du monde. L’ascension aller-retour n’avait jamais été faite d’une seule traite, selon Antoine Retours et Étienne Loisel, deux alpinistes français qui ont établi un chrono référence le 19 février 2019, en 21h 18mn. Depuis, plus rien. Jusqu’à ce que Christophe Le Saux décide de relever le défi, en cette fin du mois d’octobre. Son récit, de retour des hautes altitudes :

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Le Nevado Ojos del Salado, plus haut volcan du monde, culminant à 6893 m d’altitude. Photo Christophe Le Saux

Le défi de Christophe Le Saux

“Me voilà maintenant redescendu du sommet des dieux, l’Ojos del Salado, le plus haut volcan du monde, à 6893 m d’altitude. L’expédition a été difficile à cause de l’autonomie totale imposée. Le premier jour, entre le camp de base situé à 4550 m et le camp 1, le refuge Atacama, à 5200 m, les membres de l’expédition qui m’accompagnent et moi avons dû marcher 12 km avec nos sacs à dos pleins à craquer, nourriture et eau. Nous avions chacun au moins 30 kg sur le dos.”

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Lors de ses entraînements dans la Vallée de la Mort, au Chili. Photo DR

“Ce fut une journée très éprouvante, mais grâce à notre acclimatation en altitude sur 4 sommets les 10 jours précédents (Tunupa, 5200 m ; Uturuncu, 6010 m ; Licancabour, 5950 m et San Francisco, 6020 m), nous avons pu la digérer. Après 3 jours passés entre 5200 et 5800 m, une fenêtre météo s’ouvre le 20 octobre. C’est la bonne. Je décide de redescendre au camp de base, à 4550 m, afin de m’attaquer le lendemain au record d’Étienne Loisel. 21h18 pour faire l’aller-retour sans assistance extérieure. Un véritable défi. Quant à mes collègues d’expédition, ils décident de dormir à 5837 m au refuge Tejos pour tenter également le sommet de leur côté.”

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Lors de sa préparation, au sommet du Licancabour, à 5950 mètres d’altitude. Photo DR

-30° et des rafales à 100km/h

“Je prends le départ de mon défi à 3h35 du matin, avec sur le dos mon sac de 9 kg avec tout le matériel nécessaire, nourriture et eau. En 5h15, je parcours les 23 premiers kilomètres et avale 1700 m+ pour atteindre le refuge Tejos. Au loin, j’aperçois mes collègues en pleine ascension. Ils sont partis 1h30 avant moi du refuge, mais je les rattrape rapidement, vers 6600 m. Leurs encouragements me motivent énormément. La neige tombée 3 jours auparavant s’est transformée en glace et rend la progression dangereuse. Je décide de mettre mes crampons et de m’armer de mon piolet pour avoir un minimum de sécurité.”

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Durant son défi, Christophe Le Saux rejoint les membres de l’expédition partie elle aussi à l’assaut du sommet, depuis le camp 1. Photo DR

“J’arrive au cratère, à 6800 m d’altitude, avec François, un de mes compagnons d’expédition. Il m’annonce qu’il reste 400 m linéaires, mais je commence vraiment à être fatigué. Je puise en moi pour rester concentré afin de traverser un pierrier très dangereux.Au bout de 9 heures d’efforts, j’arrive sur la partie escalade que je gravis à l’aide de mon piolet et des cordes fixes permanentes. J’enchaîne alors sur l’arête sommitale, à quatre pattes, pour résister à un vent à plus de 100 km/h. J’atteins enfin le sommet, heureux, mais toujours terriblement conscient que l’objectif n’est pas atteint. Il faut maintenant réussir à rentrer vivant au camp de base. Il fait -30°, le temps m’est compté.”

Un record et une immense fatigue

“J’enchaîne sans m’attarder la descente, périlleuse d’abord, plus facile ensuite, pour rejoindre le camp de base. 51 km et 3050 m+ sur ma Garmin Enduro, pour un chrono de 15h39. Près de 6 heures de moins que le précédent record établi par Loisel et Retours.

Je pense que la large différence avec eux est due au manque de temps qu’ils ont eu pour s’acclimater correctement. Franchement, je pense qu’ils auraient pu faire mieux s’ils avaient passé comme moi 3 semaines à plus de 3700 m d’altitude. Aujourd’hui, je me sens un peu fatigué. Rester en haute montagne longtemps n’est pas fait pour l’être humain. On attrape froid, on tombe malade, on tousse beaucoup, les nuits à plus de 5500 m d’altitude sont interminables et votre saturation en oxygène chute. On mange beaucoup moins, juste des plats lyophilisés qui nous apportent un minimum d’énergie, et on perd énormément de masse musculaire. Je vais vite reprendre du poil de la bête et retrouver ma famille dans quelques jours. Ils me manquent énormément après un mois d’absence.”

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Photo DR

Christophe Le Saux, un ultra-runner insatiable

Christophe Le Saux ne sait pas rester en place. Il aime relever des défis pour se dépasser physiquement, psychologiquement, et se sentir vivant. Il aime également partager ces expéditions en faisant des films pour faire rêver les gens. A la suite de son exploit, il nous confie son ambition et ses prochains challenges :

« Tout le monde pense à faire les Seven Summit, les 7 plus hauts sommets de chaque continent. Ce sont souvent des expéditions très coûteuses, avec beaucoup de monde. Moi, j’ai décidé de m’attaquer aux 7 volcans les plus hauts de chaque continent afin d’être autonome sur chaque expédition, sans avoir la foule des expéditions commerciales.

J’aime être seul sur ce genre de défi car je ne dois penser qu’à moi. Si quelqu’un m’accompagne, je m’inquiéterais pour lui. Je connais mes capacités et mes limites, je sais faire demi-tour et renoncer à un défi pour ma sécurité. Dans les moments difficiles et dangereux, je reste très concentré afin de ne pas faire une erreur qui pourrait m’être fatale et je pense très fort à ma petite famille, Tiffany et Logan qui m’attendent à la maison et qui ont encore besoin de moi dans leur vie, et cela me donne énormément d’énergie et de motivation.”

Les 7 volcans
Les 7 volcans les plus hauts de chaque continent.

Des défis solitaires, des expéditions en partage

“Partager mes expéditions avec des copains proches me réconforte, je leur donne la chance de faire des ascensions à leur niveau et on partage des superbes moments pendant la période d’acclimatation. Le jour J, je fais mon défi du camp de base et eux du dernier camp en altitude, comme sur l’Ojos del Salado. Ils ont fait 10 km pendant que j’en faisais 51. C’est une bonne formule. Bien sûr, être à plusieurs sur ce genre d’expédition avec un chrono à la clef pourrait se faire, mais aujourd’hui beaucoup de personnes prennent plus de risques dès qu’il y a de l’adversité et ils ont parfois un mauvais esprit dès qu’ils ont un dossard. C’est dommage.”

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Christophe Le Saux, toujours plus haut. Photo DR
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