Kilian Jornet / UTMB : enquête sur les raisons du boycott
Si la révélation de l’appel au boycott de l’UTMB 2024 par Kilian Jornet et Zach Miller a fait l’effet d’une bombe, les hypothèses sur les motivations des deux champions restent vagues. « Il y a une multitude de choses que nous pourrions souligner et qui nous préoccupent, mais l’essentiel est que nous avons l’impression qu’ils ne gèrent pas leurs événements dans le meilleur intérêt du sport et de ses pratiquants », indiquaient-ils dans l’e-mail envoyé aux athlètes élite pour les inciter à ne pas aller à Chamonix en 2024, mais à se rabattre vers une course alternative « à définir ». Sauf que « la multitude de choses » n’ayant pas été développée, les hypothèses fleurissent, sans véritables réponses. Nous avons enquêté pour essayer de comprendre quels sont ces « choses » qui pourraient expliquer la fronde de l’ultra-terrestre et du 2ème de l’UTMB 2023, et tenter de démêler le vrai du faux. Particulièrement sur l’histoire de la course canadienne « sacrifiée » par l’UTMB Group. Arguments des uns contre arguments des autres, au final, à vous de juger.
Découvrez l’e-mail de Kilian Jornet et Zach Miller par lequel la polémique est arrivée ICI
L’ « affaire » de la course canadienne
Selon certaines sources, c’est un conflit survenu au Canada, où l’UTMB Group aurait fait pression pour qu’une épreuve déjà implantée ne puisse se tenir afin de créer sa propre épreuve labellisée UTMB, qui a fait déborder le vase. L’affaire en question a éclaté le 26 octobre 2023, lorsque l’UTMB Group a annoncé la création de sa septième épreuve en Amérique du Nord (et seule épreuve au Canada), l’Ultra Trail Whistler, dont la première édition se tiendra les 28 et 29 septembre 2024. Immédiatement, un ultra-traileur canadien très influent, Gary Robbins, est monté au créneau pour dénoncer ce qu’il a considéré comme un « coup de force » de la « machine UTMB / Ironman pour s’implanter au détriment d’une autre course forcée à disparaître, la Whistler Alpine Meadows (WAM), qui se déroulait elle aussi en septembre.
Gary Robbins est bien placé pour hurler au scandale. En effet, il est le fondateur de Coast Mountain Trail Running, une société d’organisation d’ultra-trails, et à travers elle l’organisateur de la course en question. Selon Gary Robbins, la station touristique et sportive Vail Resorts – Whistler Blackcomb qui accueillait son trail a subi un lobbying intense de la part de l’UTMB Group et a été poussée à choisir leur événement. Et annuler son soutien au sien.
Si les accusations de Gary Robbins étaient principalement tournées vers la station Whistler Blackcomb, les prétendues manœuvres jugées déloyales qu’il a dénoncées ont vite fait de faire réagir la communauté trail nord-américaine, qui lui a exprimé un soutien massif. Ainsi, des athlètes tels que le tenant du titre de l’UTMB Jim Walmsley, mais aussi Tim Tollefson ou l’icône de l’ultra-trail Scott Jurek ont pris parti contre l’entreprise UTMB / Ironman.
Cependant, les choses ne sont pas aussi simples qu’elles n’y paraissent. Et l’Américain Paul Huddle, directeur principal et responsable de l’équipe organisatrice de l’Ultra Trail Whistler by UTMB, a cherché mettre les choses au clair à travers une lettre ouverte relatant une toute autre vision des événements.
La lettre ouverte de l’UTMB à propos de la naissance de l’Ultra Trail Whistler by UTMB
« À la communauté du trail
Nous avons le plus grand respect pour les valeurs de la communauté du trail et pensons que tous les organisateurs d’événements contribuent à la croissance de notre sport. Beaucoup de ceux avec qui nous travaillons organisent non seulement des événements avec nous, mais aussi d’autres événements qui leur sont propres, qui sont tout aussi importants pour la santé globale du sport. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes engagés auprès de Coast Mountain Trail Running (CMTR), parmi de nombreux autres organisateurs de courses en Amérique du Nord et plus particulièrement au Canada, alors que nous recherchions des opportunités d’offrir des expériences de course de haute qualité plus près de chez nous aux coureurs qui rêvent de se rendre au Finales des World Series de l’UTMB à Chamonix.
Nous comprenons que les gens essaient de donner un sens à ce qui s’est passé. Cependant, la mauvaise interprétation de nos objectifs, de nos méthodes et, surtout, de nos collaborateurs – suggérant un comportement contraire à l’éthique et à la malhonnêteté – nous a désagréablement surpris. Comme la plupart des membres de notre communauté, nous avons appris via les médias sociaux et traditionnels le 11 février 2023 que CMTR se séparait de Whistler. CMTR a été catégorique dans son annonce sur les réseaux sociaux selon laquelle WAM ne reviendrait pas à Whistler.
Nous ne savons pas pourquoi CMTR/WAM et Whistler Blackcomb se sont séparés – nous n’étions pas au courant de leurs conversations – mais pour nous, leur déclaration ne laissait aucun doute sur le fait qu’ils quittaient Whistler et n’avaient pas l’intention de revenir.
Ayant une relation avec IRONMAN Canada à Whistler, l’un des membres de notre personnel de longue date a contacté la municipalité de Whistler (RMOW) plus tard en février pour savoir si elle était toujours intéressée à organiser une épreuve de trail malgré l’annonce du CMTR. Whistler a répondu par l’affirmative. Sur la base de leurs instructions, nous avons suivi leur nouveau protocole d’événement et rempli une demande en ligne, comme toute autre personne demandant un permis. Ce n’est qu’en juin que nous avons eu notre première discussion avec Whistler Blackcomb concernant la possibilité de créer un nouvel événement.
La première visite du site a eu lieu du 29 au 31 août et les détails de l’événement ont été finalisés en octobre, avant l’annonce de l’événement. Rétrospectivement, nous aurions dû garder les lignes de communication ouvertes entre nous et CMTR pour les informer, par courtoisie, de nos conversations ; peut-être que cela aurait fait une différence. Nous ne saurons jamais si le résultat de l’annonce du partenariat aurait été différent, mais nous aurions pu et aurions dû être meilleurs ici. Nous espérons qu’avec le temps, on se rendra compte que les membres de l’équipe Ultra Trail Whistler by UTMB sont des passionnés de trail running qui partagent les valeurs morales et éthiques chères à la communauté du trail running. (…) Nous croyons que tous les événements sont importants pour la croissance du sport et nous apprécions la poursuite du dialogue de la part des organisateurs et des opérateurs de courses partout en Amérique du Nord dans le désir collectif de partager les avantages positifs du sport. »
Paul Huddle Directeur principal, Course de trail mondial Responsable de l’équipe organisatrice de l’Ultra Trail Whistler by UTMB
L’exemple français du Trail des Marcaires, en Alsace
S’il est difficile de démêler le vrai du faux dans cette histoire outre-Atlantique, les organisateurs du Trail des Marcaires, en Alsace, ont leur mot à dire. Ils ont eu également un choc lorsqu’ils ont entendu parler du lancement du trail Alsace Grand-Est by UTMB en 2023. Alors que leur manifestation, qui entraîne les coureurs sur un parcours exceptionnel autour du Petit Ballon et de la Route des Vins, était habituellement positionnée sur le calendrier sur le troisième week-end de mai, ils ont dû la déplacer début juin (le 9 juin en 2024) à cause de l’arrivée de l’épreuve labellisée UTMB, pile sur les mêmes dates.
« Personne n’est venu nous consulter, personne ne nous a appelés, regrette-t-on du côté de l’organisation. Nous avons été mis devant le fait accompli. C’est triste. On se demande à quoi sert notre Commission des courses. Ils (l’UTMB Group) sont venus, ils ont été aidés par pas mal d’instances et nous ne pouvons que subir. »
Là encore, tout comme pour la course canadienne, la vision des uns ne correspond pas forcément à la vision des autres. En l’occurence, Nicolas Kuhn, Président de la commission régionale running du Grand Est, co-fondateur du Trail Alsace Grand Est by UTMB et bénévole, a tenu à préciser les choses. Et écarter la version selon laquelle l’UTMB se serait implanté “de force” en Alsace.
À propos de la naissance du trail Alsace Grand Est by UTMB
« Étant à l’origine de cet événement UTMB World Series, je tiens à apporter ma version : J’ai envoyé le 9 juin 2021 un mail conjointement signé par Mathieu Pettinotti (du comité départemental d’athlétisme du Bas-Rhin) et moi-même à l’UTMB pour leur proposer d’organiser un trail que nous souhaitions voir intégrer le nouveau circuit UTMB World Series. C’est donc bien un Comité Départemental d’Athlétisme DA qui a contacté l’UTMB et non l’UTMB qui est venu s’imposer en Alsace.
Suite à la venue de Michel Poletti en Alsace le 1 octobre 2021, j’ai envoyé à un vingtaine de membre des structures fédérales alsaciennes, une lettre d’intention co-signée par le président de la commission départementale running du 67 et le président de la commission départementale running du 68 (commission dont Vincent Beck, organisateur du Trail des Marcaires est membre). Cette lettre d’intention indique qu’une réunion d’information concernant le projet de trail by UTMB sera proposée à tous les clubs alsaciens.
Le 21 février 2022, j’ai contacté par mail tous les clubs organisateurs de la région Grand-Est (y compris Vincent Beck) pour les informer de la création d’un trail by UTMB en Alsace en leur proposant d’intégrer un challenge régional. 15 mois avant la première édition du trail Alsace Grand Est, la date n’était pas encore connue mais les organisateurs du Trail des Marcaires ne pouvaient pas dire qu’il n’étaient pas informés de la venue de ce nouvel événement. (…) Je tiens également à préciser que ce n’est pas l’UTMB qui a imposé la date de la course, mais les contraintes des différentes communes de départ et d’arrivée des 4 courses qui l’ont déterminée. »
Nicolas Kuhn, Président de la commission régionale running du Grand Est, co-fondateur du Trail Alsace Grand Est by UTMB
Le système de qualification de l’UTMB Mont-Blanc en question
Autre point de friction qui ne date pas d’hier, et qui pourrait expliquer la fronde anti-UTMB, la modification des conditions qualificatives pour participer à l’UTMB pour les athlètes élite. Alors qu’auparavant une simple cote ITRA permettait de s’inscrire, le nouveau règlement oblige ces athlètes à aller chercher leur qualification en participant à une course de l’UTMB World Tour l’année précédente. Deux cas de figure pour décrocher le sésame pour les finales de Chamonix : soit faire un top 3 (ou un top 10 dans le cas des courses « Majors »), soit réaliser une performance avec un UTMB score supérieur à la cote définie par le règlement.
Ainsi, même un quadruple vainqueur de l’UTMB Mont-Blanc ne peut, sauf passe-droit a priori non prévu, être qualifié pour l’édition 2024 s’il n’a pas été classé lors d’une épreuve UTMB en 2023. Ni Kilian, ni François D’Haene ne pourraient donc théoriquement s’aligner au départ en 2024 !
Cette obligation de participer à une course du circuit UTMB est considérée par de nombreux coureurs comme une prise d’otage qu’ils ont du mal à accepter, d’autant qu’en fonction de leur planning personnel, cela peut vite les contraindre à des déplacements coûteux à l’autre bout du monde pour aller chercher une qualification. On se souvient ainsi que le basque Beñat Marmissolle est allé courir en le Doi Inthanon by UTMB en Thaïlande pour décrocher sa qualification pour l’UTMB 2024 !
Un argument auquel les pro-UTMB ont réponse toute trouvée. Ils argumentent qu’il est logique qu’une entreprise ayant réussi à créer un tel événement puisse décider elle-même de la façon dont sont sélectionnés les concurrents, et que ceux qui n’adhèrent pas à ce système de qualification sont libres de ne pas y participer. D’autant qu’il y a une multitude de courses tout aussi magnifiques que l’UTMB Mont-Blanc dans la région de Chamonix, et qu’il n’est pas difficile d’en choisir une autre.
De plus, soulignent ces mêmes défenseurs de l’UTMB, qui n’hésitent pas à dire que Kilian Jornet crache dans la soupe d’un UTMB qui l’a rendu riche et célèbre, l’organisation a le mérite de rendre le système de qualification des élites transparent, là où d’autres épreuves, comme la Western States Endurance Run ou la Hardrock 100, avec des loteries et des Gold Ticket, ont des systèmes de sélection beaucoup plus obscurs.
Le tarif trop élevé des inscriptions à l’UTMB
C’est un autre point souvent soulevé par les détracteurs de la « machine » UTMB : des tarifs trop élevés qui « privent » certains coureurs de la possibilité de s’inscrire à l’épreuve. S’il est vrai que le prix des dossards pour les finales de l’UTMB World Tour Chamonix est élevé (355 euros pour l’UTMB, 220 euros pour la CCC et 135 euros pour l’OCC en 2023), le problème de l’augmentation des tarifs touche quasiment toutes les organisations. On est aujourd’hui proche, voir au-delà du 1 euro/kilomètre pour de nombreux événements.
Bien sûr, certains organisateurs choisissent volontairement de limiter les coûts d’inscription, mais c’est à la fois pour rester abordables et pour avoir des chances de faire le plein. Une problématique que l’UTMB ne rencontre pas, puisque chaque année, ce sont plus de 15000 candidats qui espèrent leur qualification, quel que soit le prix à payer. Et nombreux sont même ceux qui passent désormais par le système des dossards solidaires, qui garantissent l’inscription, et acceptent pour cela de faire un don de 2200€ à l’une des associations soutenues par l’organisation. Le prix à payer pour vivre leur rêve.
L’association UTMB / Ironman, vers l’argent roi ?
Autre argument mis en avant par les détracteurs de l’UTMB Group, son association avec le groupe IRONMAN, qui aurait toutes les caractéristiques d’une tentative de monopolisation de la discipline. Ainsi, toujours selon ces détracteurs, l’UTMB serait une société qui chercherait à posséder et à homogénéiser la communauté trail dans un but lucratif, et qui ferait de la politique et du lobbying en coulisses afin de compromettre la capacité d’épreuves implantées de longue date à se poursuivre sans partenariat avec l’UTMB. Quand on sait qu’il existe 5 événements « by UTMB » en France, et plus de 3600 trails recensés dans l’Hexagone, on ne peut que modérer le propos.
Pour rappel, le groupe IRONMAN fait partie de la World Triathlon Company basée en Floride, USA. Il est organisateur de prestigieux triathlons, dont le championnat du monde se tient tous les ans à Kona, sur l’île d’Hawaï, avec un système d’événements de qualification aux mains du groupe. Il n’en faut pas plus pour voir dans les finales de l’UTMB World Tour à Chamonix l’équivalent en trail de ce qu’est Kona au triathlon : un système qualificatif verrouillé, des finales hors de prix et un business ultra-lucratif.
Dans cette logique marketing, placer l’UTMB/Chamonix sur un piédestal encore plus élevé permettrait à l’UTMB Group de facturer des frais d’inscription plus élevés dans les courses de qualification et dans les courses qualificatives pour obtenir des Running Stones, de payer plus de pros pour s’engager dans leurs épreuves et de prendre des mesures anticoncurrentielles, comme le fait de menacer d’organiser, ou d’organiser des épreuves sur le même territoire le même jour que les autres courses.
Jornet / UTMB, les questions qui intriguent…
Si une partie de la communauté trail critique ouvertement l’UTMB Group, essentiellement en raison de l’obligation d’aller chercher des Running Stones sur des courses qualificatives UTMB et du prix des dossards, une autre partie considère comme tout à fait logique qu’une entreprise ayant créé un tel événement d’envergure mondiale en fasse un business et cherche à gagner de l’argent. Quel chef d’entreprise n’en ferait pas autant ? Personne n’est choqué par le business autour de sports comme le football ou le basket. Pourquoi l’univers du trail baignerait-il dans la philanthropie ?
La principale question qui semble se poser aujourd’hui, est de savoir s’il y a un lien entre l’émergence d’une nouvelle association, la World Trail Majors, qui propose de revenir à l’essence du trail et regroupe cette année pas moins de 9 épreuves mythiques, et la prise de position de Kilian Jornet et Zach Miller. Et certains de souligner que ce tout nouveau circuit mondial d’ultra-running est soutenu par la Pro trail Running Association (PTRA), l’organisation fondée par Kilian Jornet début 2022 pour « défendre les intérêts des athlètes professionnels du trail », et que certaines des épreuves de ce nouveau circuit sont sponsorisées par The North Face et Coros. Qui ne sont autres que l’équipementier sponsor de Zach Miller et l’un des sponsors de Kilian Jornet.
Dacia, le sponsor mal-aimé de l’UTMB
Dernier point que nous devons évoquer : le fait que le sponsor titre de l’UTMB en 2023, et pour 3 ans, soit le constructeur automobile Dacia. Kilian Jornet est très impliqué dans la protection de l’environnement, et il est évident qu’il n’a pas du tout apprécié qu’un constructeur automobile parraine un événement destiné à mettre en valeur la beauté de l’environnement, et son urgence à le préserver. Il l’a d’ailleurs largement exprimé.
Cependant, là aussi, des incohérences demeurent. En premier lieu, quel pourcentage de coureurs d’ultra ne possèdent pas de voiture ? Et Dacia Spring a été élue « voiture la plus verte » en 2022. Il est également intéressant de noter qu’une grande partie de l’argent investi par Dacia dans l’UTMB a été consacré à l’amélioration de la planification des transports pour les spectateurs et les concurrents. Notamment, proposer un nouveau service de navettes pour éviter les embouteillages. Enfin, n’oublions pas que Kilian Jornet était jusqu’à récemment sponsorisé par Mercedes-Benz, et sa compagne Emelie Forsberg a fait la promotion de Kia et Seat. Alors, Dacia/UTMB, une affaire qui roule ?
Retrouvons vite les sentiers de la liberté
Nous vous avons fourni un certain nombre d’éléments de réflexion, à force de recherches et de recoupements d’informations, en essayant de rester le plus neutre possible pour vous laisser seuls juges. Il y en a d’autres bien sûr, mais faut-il creuser encore et encore ? Faut-il réellement prendre parti pour l’un ou l’autre ? Quel couple ne connaît pas de crise ? Quelle adolescence se passe sans heurts ? Kilian Jornet est et restera un artiste de l’ultra-trail, une icône qui nous a fait et nous fait encore rêver. L’UTMB restera une course mythique, avec ses 20 ans d’histoires, une “petite entreprise” de quelques fous furieux devenue “Sommet mondial du trail”. L’un comme l’autre n’ont pas fini d’écrire la grande histoire du trail. Et le trail leur survivra. retrouvons vite les sentiers de la liberté, loin de ces polémiques…
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