Montée raide : faut-il se pencher plus pour grimper mieux ?
C’est une question qui divise. D’un côté, les adeptes du cassé de buste, de l’autre, ceux qui préconisent de ne pas trop se pencher. Sans compter l’autre débat : mains sur le haut des genoux ou le milieu des cuisses ? On a fait le tour de la question.
Montée raide : le cassé de buste de Courtney Dauwalter
Si la littérature sur la façon d’aborder des pentes raides en course est nombreuse, quelques règles semblent faire l’unanimité, parmi lesquelles 2 principales : pour grimper efficacement, il ne faut pas trop casser le buste mais plutôt essayer de maintenir le haut du corps redressé pour une respiration optimale. Ensuite, il faut appuyer les mains de préférence sur le haut des genoux, plutôt que sur le milieu ou le haut des cuisses.
Ceci étant dit, certaines images restent gravées dans la mémoire, parmi lesquelles celles de l’Américaine Courtney Dauwalter, très fatiguée à la fin de la Diagonale des Fous 2022, le buste complètement cassé en 2, poussant sur ses cuisses pour venir à bout d’une montée raide. Une position peu orthodoxe, allant à l’encontre de la théorie, mais qui illustre le fait qu’entre la théorie et la pratique, c’est surtout à l’individu de trouver le meilleur rendement, en fonction de son état de fatigue, de son ressenti et de ses possibilités du moment.

Montée raide : se pencher en avant oui, mais pas trop
Pour contrer l’effet de la pente, les coureurs (ou marcheurs quand la pente devient trop raide) ont souvent tendance à trop se pencher en avant. Se pencher en avant est naturel et permet de décaler le centre de gravité en dehors du polygone de sustentation, donc de rompre l’état d’équilibre du corps et d’obliger l’individu à avancer pour ne pas tomber (un corps cesse d’être en équilibre quand la verticale passant par son centre de gravité tombe en dehors de son polygone de sustentation).
Cependant, trop se pencher et casser le buste va avoir 2 conséquences. La première, c’est que votre centre de gravité va être trop déporté en avant de vos pieds, et entraîner un déséquilibre trop important, au lieu de se retrouver juste au-dessus de la pointe des pieds, qui est la position la plus efficace. Vous aurez donc tendance non pas à avancer efficacement vers l’avant, mais à vous écraser vers l’avant, et devrez faire des efforts supplémentaires pour contrer cet effet et vous redresser. La seconde, c’est qu’en cassant trop votre buste, vous allez altérer votre respiration en réduisant le volume de votre cage thoracique. En faisant plus d’efforts pour respirer, votre taux d’oxygène dans le sang va diminuer, celui de gaz carbonique augmenter et… vous vous épuiserez plus vite.

10°, l’inclinaison optimale du buste
Les différentes études sur le sujet s’accordent à dire que pour une pente inclinée entre 15 et 20% (considérée comme raide mais pas extrême), une inclinaison du buste de 10° en avant (ce qui est peu) et une inclinaison supplémentaire de la tête de 10° également (ce qui fait que l’on regarde à environ 2 mètres devant soi) est la meilleure position pour monter le plus efficacement possible. Faites le test vous-même : trouvez une pente d’environ 15% (limite entre montée facile et difficile) et montez-la rapidement en marchant. En penchant votre buste à 10°, vous constaterez que vos muscles abdominaux sont relâchés, ce qui facilite le travail du diaphragme et permet ainsi d’optimiser le temps abdominal de la respiration, qui est le plus efficace pour la performance.

À l’inverse, en penchant votre buste à 20 ou 30°, vous allez sentir une pression abdominale plus forte, qui empêchera la respiration abdominale d’être complète. Pour compenser, vous devrez donc faire appel au temps thoracique de la respiration, plus fatigant et moins performant. L’Italien Marco Olmo, double vainqueur de l’UTMB, avait une technique bien à lui pour conserver son volume thoracique dans les montées : il grimpait avec les bras et les mains dans le dos !
Inclinaison du buste et tensions musculaires
Par ailleurs, une inclinaison du buste de 10° permet aux muscles vertébraux, cervicaux, dorsaux et lombaires de se relâcher, donc de consommer moins d’oxygène et de provoquer moins de douleurs. À l’inverse, une position plus penchée vers l’avant va créer des tensions musculaires, donc plus de consommation d’oxygène, et surtout des risques de douleurs qui se paieront cher au moment de redresser le buste pour reprendre la course sur le plat ou en descente.

Appui des mains : sur les genoux ou sur les cuisses ?
Contrairement aux idées reçues, c’est en prenant appui juste quelques centimètres au dessus des genoux que l’aide de vos bras sera la plus efficace, et non au milieu, voire en haut de vos cuisses. Si là encore le ressenti du coureur – ou sa capacité à reproduire le bon geste, dans des moments où généralement la pente est raide et l’effort intense – est différent pour chacun, il existe une logique purement mathématique derrière cette affirmation.
En effet, les bras interviennent à la fois pour soulager l’effort musculaire demandé aux cuisses, mais aussi et surtout pour additionner les deux forces en présence. Or plus la trajectoire de la force additionnelle liée à la poussée des bras sera orientée vers l’avant du coureur, plus elle sera efficace. À l’inverse, dans le cas d’une poussée des bras sur le milieu ou le haut des cuisses, la trajectoire de la force additionnelle sera moins orientée vers l’avant, donc perdra en efficacité.
Attention, en vous servant de vos bras pour pousser sur vos jambes, vous allez adopter une position qui va refermer votre cage thoracique et entraver votre respiration, avec les conséquences que nous avons évoqué précédemment. Il sera donc important de conserver les épaules les plus ouvertes possible, quand bien même la technique utilisée impose l’inverse.

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