Thibaut Baronian : « L’UTMB est un rêve dont je ne dois pas avoir peur ! »
Champion de France de trail court 2023, Thibaut Baronian, 3ème de la CCC en 2021, est un des meilleurs traileurs français sur format marathon. Fin août, il va pour la première fois s’attaquer au monument UTMB, une course mythique qui l’attire depuis longtemps, mais qui l’inquiète également pour la part d’inconnu qu’elle recèle. Esprit Trail l’a rencontré.
Pourquoi cette envie d’aller sur le long, alors que tu es encore très performant sur les formats 30 à 60 km ?
Thibaut Baronian : Ça fait plusieurs années que je suis sur le même format marathon et que je fais la Golden trail Series, et j’ai une envie de changement par rapport à mes saisons précédentes. J’essaie depuis quelques années d’intégrer des courses plus longues qui m’attirent, car je pense que je suis un athlète d’endurance à la base, j’aime l’effort long, que je pratique depuis longtemps en off, mais en essayant d’être sur les deux tableaux, en étant toujours focus sur les formats courts, cela me laissait peu de liberté et de place pour le plus long. Et puis je crois que sur le format court des Golden, je suis arrivé au maximum de ce que je peux faire…
Peut-on parler de manque de motivation ?
TB : Oui, il y a de ça, moins de motivation à aller sur les marathons, plus de difficultés à me fixer des objectifs personnels, j’avais moins la flamme. Je connais les préparations, je connais les courses, mon ressenti et ce qui peut m’arriver sur ces courses-là. Le fait qu’il y ait moins d’inconnues fait que je n’ai plus l’excitation que tu as quand tu découvres quelque chose de nouveau.
Côté entraînement, tu as changé quelque chose pour te préparer à l’échéance UTMB ?
TB : Fondamentalement, non, c’est toujours la même philosophie, avec pas mal d’entraînement en endurance pure. Je n’ai rien révolutionné, j’ai juste fait plus d’heures, avec plus de liberté pour faire des longues sorties. Et peut-être un peu moins de qualité comme j’ai pu en faire pour préparer les Golden Trails. Mais même en modifiant mon programme et en mettant un peu plus d’heures, je garde quand même cette explosivité, comme je l’ai vu mi-juin sur le Neirivue Moleson, où j’arrive à sortir un gros chrono sur une course de montagne alors que je n’ai pas préparé la course. (Thibaut Baronian a pris la 2ème place, à moins de 3 minutes de Rémi Bonnet, en avalant les 10,6 km et 1290m D+ en 1h00mn28s, NDLR) Ça fait plaisir de voir qu’en travaillant autre chose, ça n’empiète pas sur mes forces pures.
Tu as dit que tu n’allais pas sur l’UTMB pour gagner, ni juste pour le finir. As-tu une petite idée de ta « juste place » ?
TB : Je n’ai pas d’objectif chrono précis en tête, je veux surtout réussir à faire une course en posant un peu les bases que j’ai sur ultra pour voir jusqu’où ça peut tenir. Je n’ai jamais fait une nuit, je n’ai jamais couru plus de 120 bornes, donc il y a pas mal d’inconnues qui me font dire qu’il ne faut pas que je sois trop ambitieux et qu’il faut d’abord que je fasse ma course, à mon niveau, pleine. Ceci étant, il faut aussi que ce soit une course que j’aime faire. Je ne suis pas du genre à partir 300ème pour faire une remontée et finir 30ème, je veux faire une course qui me ressemble…
Quel est le paramètre qui t’inquiète le plus ?
TB : Peut-être la traversée de la nuit et le lever du jour, parce que ce sont des choses que je n’ai jamais vécues et je ne sais pas trop comment mon corps va réagir. Je l’ai un peu vécu à vélo, mais j’imagine que ça va être différent… Les kilomètres et le dénivelé ne m’inquiètent pas trop, donc c’est vraiment la gestion de la fatigue sur le petit matin qui me pose question. Surtout que cette partie qu’on fera de nuit, je ne la connais pas, alors que la deuxième partie après Courmayeur, qui est commune à la CCC, je la connais bien.
Question nutrition, tu pars dans l’inconnu. Comment envisages-tu les choses ?
TB : C’est l’inconnu mais sur mes derniers ultras, ça n’a pas été un facteur limitant ; j’ai toujours pu manger, m’hydrater… Donc je ne me fais pas trop de souci. Je vais certainement avoir une base semi-liquide dans la première partie, et sur les ravitos avoir des choses un peu solides qui tiennent au ventre. Après, entre les ravitos, je vais voir avec mes produits Baouw, ceux que je peux facilement assimiler, peut-être en les dosant un peu moins que sur les formats plus rapides pour pouvoir tenir dans la durée le taux de glucides.
Question facteurs limitants justement, quels sont-ils ?
TB : Depuis 2021 je traîne une inflammation intestinale sur le flanc gauche dont je ne me suis pas trop occupé parce qu’elle ne me limite pas sur les formats courts, et quand elle apparaissait sur les formats longs, je faisais avec. Ça crée des crampes en descente, et ça m’a d’ailleurs handicapé sur le 90km du Mont-Blanc. Donc on est dessus actuellement, avec pas mal de tests et d’analyses pour trouver une solution.
Tu as d’illustres collègues bien expérimentés chez Salomon, François d’Haene, Courtney Dauwalter, Mathieu Blanchard… Tu as déjà parlé stratégie UTMB avec eux ?
TB : Pas encore, parce qu’on ne s’est pas trop vus depuis avril avec Mathieu et François, mais cet été on va avoir l’occasion de passer des moments ensemble, et ça sera le sujet principal, c’est sûr.
Cette interview est parue dans le magazine Esprit Trail n°138 paru en juillet 2024.
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