Devenue légendaire, la remontada de Ludovic Pommeret date de l’UTMB 2016. Alors qu’il pointe en 48ème position au ravitaillement des Chapieux (km 50,9), à près de 45 minutes du leader suite à des problèmes gastriques, il envisage d’abandonner. Mais le couteau entre les dents, il s’accroche. Il effectue alors une remontée spectaculaire dans la deuxième partie de course pour prendre la tête dans la descente vers Trient (km 141) et filer la la victoire, qu’il obtient en 22h00 pile, avec 26 minutes d’avance sur le Lituanien Gediminas Grinius et 30 sur l’Américain Timo Tollefson. Un exploit monumental pour un athlète hors normes. On vous laisse savourer.
Sortie : 2023 Durée : 36 minutes Langue : Français
Du 25 au 31 août, la vallée du mont Blanc vivra au rythme de la 22ᵉ édition de l’UTMB Mont-Blanc, l’événement devenu le rendez-vous annuel du monde du trail, où se retrouvent les plus grands athlètes de la discipline. Cette année, le plateau élite sera plus dense que jamais, avec 561 coureuses et coureurs venus du monde entier, dont 45 % de femmes. Parmi les 8 courses au programme, 3 ont une signification particulière, puisque ce sont les finales des UTMB World Series, rassemblant les athlètes qualifiés tout au long de la saison sur les courses du circuit : l’OCC (50K), la CCC (100K) et l’UTMB(100M). Voici les favoris.
L’UTMB : le retour de 3 vainqueurs et une concurrence relevée
La course phare de 174 km et 10000m D+ s’annonce comme l’un des rendez-vous les plus suivis de la saison. Entre retour des figures iconiques, affrontements internationaux et talents encore méconnus du grand public prêts à se révéler, le plateau 2025 promet une course intense et pleine de suspense. Parmi les faits marquants, notons le grand retour de François D’Haene, celui de Courtney Dauwalter et la présence une nouvelle fois de l’inoxydable Ludovic Pommeret, tout juste auréolé de son 2ème titre sur la Hardrock.
Parmi les grands absents, Jim Walmsley, qui sera sur l’OCC, et Vincent Bouillard, qui préfère se préparer pour les championnats du monde de trail long de fin septembre. Sans oublier Kilian Jornet, qui a annoncé qu’il souhaitait revenir sur l’UTMB, sans doute en 2026, mais se consacrera début septembre à son projet personnel dans les montagnes Rocheuses.
Quadruple vainqueur (2012, 2014, 2017, 2021), François D’Haene revient quatre ans après sa dernière participation. Découvrant l’épreuve comme bénévole en 2005, il s’est forgé une histoire unique avec le massif du Mont-Blanc. À 38 ans, il repart pour une nouvelle aventure, animé par la même excitation que lors de ses débuts.
« En 2005, (il y a 20 ans) je découvrais stupéfait et intrigué l’UTMB en tant que bénévole. Quelques mois plus tard, trop jeune pour faire l’UTMB, je m’inscrivais à la CCC. Depuis, j’ai pu vivre chaque année l’évolution de cette course et du sport, et la fascination et l’émerveillement que l’ultra-trail procurent aux coureurs. J’ai aussi pu y vivre des moments et des victoires inoubliables : 2012, 2014, 2017, 2021. Cette année, j’y retourne avec la même excitation et le même engouement pour une aventure et une histoire que j’ai très hâte de vivre. »
Actuellement détenteur du record du nombre de victoires avec Kilian Jornet (4 chacun), François D’Haene, en cas de succès, deviendrait l’homme le plus titré de l’UTMB Mont-Blanc. Et inciterait certainement Kilian Jornet à revenir en 2026 pour égaliser…
François D’Haene. Photo UTMB GROUP
UTMB : Courtney Dauwalter, la Présidente en quête d’une 4ème victoire
Avec trois victoires (2019, 2021, 2023), l’Américaine est devenue l’icône mondiale de l’ultra-trail. Sourire aux lèvres, lunettes de soleil vissées sur le front, elle repousse sans cesse les limites et visera un 4ᵉ sacre à Chamonix et ne cache pas non plus son enthousiasme : « Je suis vraiment impatiente de revenir à l’UTMB cette année ! J’adore les défis qu’offre ce parcours et j’ai hâte de profiter des panoramas grandioses et de l’ambiance électrique ! »
UTMB : Ludovic Pommeret, l’infatigable
À 50 ans, le Savoyard reste une légende vivante du trail. Vainqueur de l’UTMB en 2016 après une remontada exceptionnelle, il a encore impressionné cet été en triomphant sur la mythique Hardrock 100 aux États-Unis. Endurant, stratège, il pourrait une nouvelle fois surprendre.
UTMB au féminin : des rivales prêtes à bousculer l’ordre établi
Si Courtney Dauwalter est donnée favorite, la bataille féminine promet d’être intense. La Néo-Zélandaise Ruth Croft, déjà titrée sur la CCC en 2015 et sur l’OCC en 2018 et 2019, rêve d’un premier succès sur l’UTMB et a axé toute sa prépération sur cette course. L’an dernier, elle a échoué à la 2ème place, derrière Katie Schide, mais a marqué les esprits avec une fin de course très rapide. Une victoire pourrait faire d’elle la première femme à remporter les trois finales.
L’Américaine Abby Hall s’affirme quant à elle comme l’une des femmes les plus régulières du circuit, affichant de grandes ambitions après une victoire remarquée sur la Western States Endurance Run 2025. Parmi les autres concurrentes, notons la Zimbabwéenne Emily Hawgood qui monte en puissance après un début de saison solide et la Française Camille Bruyas qui revient après sa 2ème place en 2021 et pourrait également créer la surprise. Derrière elles, l’Américaine Heather Jackson, ancienne triathlète, sera également une sérieuse concurrente, sans oublier l’Allemande Katharina Hartmuth, 2ème en 2023, qui incarne la nouvelle vague prête à détrôner Dauwalter.
Courtney Dauwalter, la femme à battre. Photo UTMB GROUP
UTMB au masculin : des internationaux de haut rang
Face aux légendes françaises, des internationaux, grands noms de la discipline seront également présents afin d’écrire leur histoire sur les sentiers du massif du Mont-Blanc. Le Britannique Jonathan Albon, champion complet et redoutable tacticien, figure parmi les grands favoris. À ses côtés, le Néo-Zélandais Daniel Jones, l’Américain Hayden Hawks, le Britannique Tom Evans et le Chinois Ji Duo ont les plus gros Index UTMB.
Mais l’outsider n°1 pourrait bien être l’Américain Ben Dhiman, vainqueur cette année et nouveau recordman du Lavaredo 120K, mais aussi vainqueur du Grand Raid Ventoux by UTMB 2025 – GRV – 100K. Indiscutablement un des hommes en forme du moment, qui après 2 abandons sur la boucle du Mont-Blanc, rêve de prendre sa revanche.
Et parmi les Français, n’oublions pas Théo Detienne, récent vainqueur du 90KM du Mont-Blanc, qui se lance pour la première fois sur 100 Miles et pourrait bien animer le début de course, voire plus…
La CCC, grand spectacle en prévision chez les hommes
Avec +10 % d’élites par rapport à 2024, la CCC (101 km, 6 050 m D+) promet d’être très compétitive. Chez les hommes, l’Italien Francesco Puppi, grand favori déjà remarqué sur des formats plus courts comme le 50K, sera à suivre de près sur cette distance. Il tentera de confirmer sa performance impressionnante réalisée récemment sur le 100K de The Canyons Endurance Runs by UTMB.
L’Américain Eli Hemming, ancien triathlète reconverti avec succès au trail et grand gagnant de l’OCC 2024, sera l’un de ses principaux rivaux, tout comme son compatriote Chris Myers, régulier dans les grands rendez-vous. Derrière, un autre Américain, David Sinclair, habitué des courses alpines, et l’Italien Andreas Reiterer complètent un peloton très dense. La Chine sera bien représentée avec Guangfu Meng, puissant grimpeur, et Canhua Luo, spécialiste des longues distances. Côté tricolore, Hugo Deck incarne l’espoir français, tandis que l’Espagnol Andreu Simon Aymerich, solide marathonien de montagne, et l’Américain Jeshurun Small, en constante progression, viseront le top 10.
Chez les femmes, une CCC historique
Rarement dans l’histoire du sport féminin un plateau aura été aussi relevé. Sur la ligne de départ de la CCC, on retrouvera les trois dernières reines de l’épreuve : la Sud-Africaine Toni McCann, explosive et redoutable sur les formats rapides, la Norvégienne Yngvild Kaspersen, spécialiste des terrains techniques, et la Française Blandine L’Hirondel, double championne du monde de trail et récente gagnante du 90KM du Mont-Blanc. Trois championnes, trois styles, trois stratégies… mais un seul objectif : régner à nouveau à Chamonix.
Autour d’elles, une concurrence féroce : la Chinoise Fuzhao Xiang,véritable référence asiatique, l’Espagnole Anna Tarasova, polyvalente et capable de créer la surprise, la Vietnamienne Hau Ha Thi, ultra-résiliente et 6ème féminine sur la Western States Endurance Run 2025, ou encore l’Américaine Dani Moreno, qui misera sur sa vitesse. Il faudra également avoir un œil sur la Norvégienne Sylvia Nordskar, la Népalaise Sunmaya Budha et la Polonaise Martyna Mlynarczyk.
Jim Walmsley en vedette sur l’OCC
Chez les hommes, surprise avec la présence de Jim Walmsley qui se teste sur un format court (57 km et 3 500m D+) où sa vitesse pourrait faire des ravages. L’Américain, vainqueur de l’UTMB 2023, toujours légèrement inquiet pour sa blessure au genou, vise les championnats du monde de trail fin septembre à Canfranc, en Espagne, et a donc préféré un format court que l’UTMB.
Le Suisse Roberto Delorenzi, spécialiste du skyrunning, sera l’un de ses plus sérieux rivaux, tout comme l’Italien Nadir Maguet, référence en la matière. Son compatriote Cristian Minoggio, puissant et constant, visera également le podium, aux côtés du Suédois Petter Engdahl, redoutable grimpeur.
L’Italie comptera aussi sur Luca Del Pero et le récent vainqueur du Marathon du Mont-Blanc Davide Magnini, tous deux habitués des formats explosifs. L’Espagnol Antonio Martinez Perez, rapide et technique, sera également à suivre, tandis que le Polonais Andrzej Witek et le Kényan Ezekiel Rutto pourraient bien venir créer la surprise.
Jim Walmsley lors de sa victoire sur l’UTMB en 2023. Il sera cette année sur l’OCC. Photo UTMB GROUP
OCC féminine : Judith Wyder favorite
Ancienne star de la course d’orientation reconvertie au trail, la Suissesse Judith Wyder part favorite. Elle devra contenir la Chinoise Miao Yao, redoutable sur formats rapides et qui remet son titre en jeu, ainsi que la Kényane Joyline Chepngeno, révélée lors de la saison 2024 en remportant l’iconique course Sierre-Zinal et également grande favorite.
L’Espagne sera représentée par Rosa Lara Feliu et Sara Alonso, toutes deux capables de briller sur ce terrain. L’Américaine Sophia Laukli, venue du ski de fond, apportera sa puissance, tandis que sa compatriote Hannah Allgood misera sur sa régularité. La Suissesse Theres Leboeuf et la Canadienne Jazmine Lowther viseront le top 10, tout comme l’Allemande Rosanna Buchauer, solide sur ce type de profil.
La TDS : plateau relevé et popularité grandissante
Considérée comme l’alternative « sauvage » de l’UTMB, la TDS (Trace des Ducs de Savoie, 148 km et 9300m D+) séduit de plus en plus. Depuis l’allongement de son parcours en 2019, elle s’est forgé une réputation redoutable pour sa technicité et ses passages mythiques comme le Passeur de Pralognan. Cette année, la course connaît un engouement inédit avec +37 % d’élites au départ, signe qu’elle s’impose désormais comme l’un des grands rendez-vous du sommet mondial de l’ultra-trail.
TDS : Manon Bohard pour un doublé chez les femmes
Chez les femmes, la compétition s’annonce relevée avec en tête d’affiche Manon Bohard Cailler. Récente 2ème de la Hardrock 100 en 2025 et victorieuse du 100K du Trail 100 Andorra by UTMB en juillet, elle se lance une nouvelle fois sur la TDS après l’avoir remporté en 2021.
Elle retrouvera sur la ligne de départ l’Américaine Careth Arnold, qui découvrira pour la première fois les sentiers de Chamonix, ainsi que l’Allemande Ida-Sophie Hedemann, brillante lauréate du 100M au Grand Raid Ventoux by UTMB 2025.
Manon Bohard, candidate pour un doublé sur la TDS. Photo UTMB GROUP
TDS : Beñat Marmissolle favori chez les hommes
Le plateau masculin de cette TDS n’est pas en reste, avec plusieurs figures du trail international. Parmi les Français, Beñat Marmissolle arrivera fort de ses 2 victoires cette année sur le 100M de Valhöll Fin del Mundo by UTMB et sur la X-Alpine du Trail Verbier St-Bernard by UTMB. À ses côtés, Antoine Charvolin, fidèle aux formats CCC, OCC et YCC, sera un concurrent à surveiller.
L’Espagnol Pau Capell, vainqueur de l’UTMB 2019 et de la TDS 2016, viendra rappeler son statut de référence sur ces terrains exigeants. Enfin, Alexandre Boucheix, alias Casquette Verte, apportera son énergie et son audace à un plateau déjà particulièrement relevé.
https://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/08/vcsPRAsset_3574646_756999_e7bc6d7a-5fb9-4439-9be1-2243a427c567_0.jpg8241200Patrick Guerinethttps://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/02/ET-logo-vert-noir-300x87.pngPatrick Guerinet2025-08-24 08:57:452025-08-24 08:57:49Courses de l’UTMB 2025 : qui sont les favoris ?
Après une CCC en 2017 et 5 UTMB entre 2019 à 2024, Alexandre Boucheix, alias Casquette Verte, ne pouvait pas manquer le rendez-vous de Chamonix. N’ayant pas chopé sa qualification pour l’UTMB, il se rabat cette année sur la TDS, la Trace des Ducs de Savoie, la “sauvage” de l’UTMB Mont-Blanc, accessible sur inscription classique. Histoire d’être (un poil) sérieux, il a donc effectué début août la reconnaissance du parcours, 148km et 9300mD+. Bien entendu, un film vient raconter cette aventure réalisée avec Charlotte, sa compagne devenue « Madame Casquette » fin juillet. De quoi découvrir le parcours (un peu) et rire (beaucoup)…
Ce qu’il en dit : “On a toujours voulu vous montrer la TDS autrement. Un film pensé pour montrer la trace dans son intégralité, décortiquer ce parcours exigeant de cette course mythique de l’UTMB. On voulait une reconnaissance brute, qui sente la forêt, la montagne, la boue et l’effort. C’est exactement ce qu’on vous propose avec ce film sur la TDS (Traces des Ducs de Savoie), ses 144 km et ses 9 900 m de D+. Aux côtés de Franck, avec sa gourmandise communicative, et de Charlotte, avec son énergie débordante, on s’est régalés à courir, à filmer et à vous retransmettre l’essence de cette course mythique. Vous allez découvrir une analyse sans filtre de ce parcours avec la petite touche “Plaisir & Panache” en prime. On s’est bien kiffés à le faire et on espère que vous prendrez autant de plaisir à le regarder. Merci à Suunto, Salomon et Distances+ pour leur soutien. Plaisir & Panache !”
Sortie : 2025 Durée : 34 minutes Langue : Français
Peu de gens se souviennent qu’à ses débuts, Ludovic Pommeret, alors passionné de défis insensés – et peu préparés – , s’est aligné par deux fois sur l’UTMB, en 2004 et 2005, et par deux fois a abandonné. Depuis 2016 et sa victoire après une remontada devenue légendaire, le néo-quinquagénaire (depuis le 22 juillet 2025 !) à l’immense foulée caractéristique est devenu l’un des coureurs les plus populaires de France, qui ne rate jamais le rendez-vous de Chamonix. Le 29 août, il sera de nouveau au départ de la boucle autour du mont Blanc.
Tu as fait beaucoup de sports avant de te fixer sur le trail, notamment du snowboard, du ski alpin, de la planche à voile… Comment, de la glisse, tu es arrivé au trail ?
Ludovic Pommeret : Un petit peu par hasard en fait, des histoires de défis. D’abord avec mes beaux-frères qui faisaient de l’athlétisme et m’avaient mis au défi sur des montées franches vers chez nous. Ensuite, en 2000, il y avait la Forty, une course de 120 kilomètres qui partait de chez moi, à Valloire. Je n’avais pas été accepté en tant que coureur, donc je m’étais inscrit en marcheur, parce qu’il y avait une catégorie marcheur… En fait, c’était surtout le défi de faire de grandes courses qui ne paraissaient pas réalisables quand on n’a pas l’entraînement qui m’animait. Et d’ailleurs, je n’ai pas réalisé ce défi…
120 bornes, pour une première course, même en marcheur, c’était un peu n’importe quoi…
Ludovic Pommeret : Ben oui ! Et je n’ai pas terminé bien sûr. J’en ai fait 60 et puis j’ai arrêté. Mais c”était vraiment cet aspect défi qui m’attirait, ces courses dites infaisables.
C’est la raison pour laquelle tu t’es inscrit à l’UTMB en 2004 ?
Ludovic Pommeret : Oui, et en 2005 aussi. C’est ce côté défi d’arriver à faire un truc qui paraît compliqué. Et ça l’était vraiment, parce qu’en 2004 et en 2005, je n’ai pas terminé. En 2004, j’ai eu une tendinite des releveurs assez tôt, à Courmayeur, et en 2005, j’ai fait 40 bornes avec une contracture et j’ai fini par abandonner. Clairement, c’était le manque d’expérience…
Photo Stéphane Demard
Mais tu es revenu. C’est quoi ? De la persévérance ? De l’obstination ?
Ludovic Pommeret : Ça a été un peu différent. Après ça, je me suis orienté sur des formats un peu plus courts, et c’est là que ça a commencé à marcher au niveau performance. Ce qui fait que finalement, je suis revenu assez tard sur des formats de plus de 80 kilomètres. En 2009. Mais oui, j’y suis revenu pour ne pas rester sur des échecs.
Et ça t’a plutôt réussi ! Cette année-là, tu fais 3ème sur la CCC et 2ème sur la Diagonale des Fous. C’est à ce moment-là que tu as un premier contact avec Philippe Propage, qui était alors entraîneur de l’équipe de France…
Ludovic Pommeret : Oui, il était venu me voir parce que j’avais terminé deuxième sur la course des championnats du monde qui avaient eu lieu à Serre-Chevalier, alors que j’étais sur le format open. (Il s’agit de la 11ème édition de la Merrell Sky Race – 68 km, 3500 m D+ -, où Thomas Lorblanchet avait été le premier Français à être sacré Champion du monde. Ludovic Pommeret avait terminé 1er du format open, sur le même parcours, dans le même temps que le Népalais Dawa Sherpa, classé 2ème des championnats du monde, NDLR).
Il était venu me voir en me disant « il faudrait peut-être que tu t’entraînes un peu correctement » et tout ça, mais à l’époque je n’avais pas voulu sauter le pas. Et puis en 2015, comme par hasard, j’ai été sélectionné en équipe de France juste un mois avant les Mondiaux qui se tenaient à Annecy, lors de la MaXi-Race. C’était un peu tard, mais le fait d’être sélectionné alors que je ne l’avais pas trop cherché, fait que j’ai repris contact avec Philippe et lui ai demandé de m’entraîner pour essayer d’être un peu mieux sur ces Mondiaux.
Où tu as fini 5ème sur un format long de 82km et 5100mD+. Mais revenons en 2009 : pourquoi est-ce que tu n’as pas eu envie de t’entraîner sérieusement à cette époque, alors que tu as déjà des résultats très prometteurs et de belles victoires à ton actif ? Trop de contraintes de devoir suivre des plans ?
Ludovic Pommeret : Oui, tout à fait. À l’époque, je faisais beaucoup de courses, je courais pratiquement toutes les deux semaines, mais au final ça ne me laissait pas beaucoup de temps pour l’entraînement. Mais ça m’allait, parce que je concentrais la course à pied sur les week-ends et ça me laissait du temps pour mes autres occupations à côté. Surtout qu’en 2010, on a commencé à construire. Donc oui, c’était trop de contraintes et je n’en avais pas envie. Attention, je ne dis pas que je n’avais pas envie d’être plus performant, parce que parfois, quand j’allais sur des courses, j’étais un peu déçu du résultat, mais disons qu’il y avait un équilibre l’un dans l’autre et que je m’y retrouvais.
C’est donc le maillot tricolore qui t’a motivé à franchir le cap !
Ludovic Pommeret : Oui, le fait d’avoir ce maillot, de ne pas avoir envie d’être ridicule, de ne pas être le dernier de l’équipe, enfin des petits trucs comme ça…
Depuis ta victoire légendaire en 2016, tu n’as raté aucune édition de l’UTMB. Que ce soit sur l’UTMB, la CCC, la TDS, tu es toujours à Chamonix fin août. C’est un passage obligatoire pour toi ?
Ludovic Pommeret : Pas forcément obligatoire, mais disons que 2016 a été un tournant pour moi. Après mes premiers échecs, et même si ça avait bien marché sur la CCC en 2009, j’étais revenu sur l’UTMB en 2010 et en 2012, mais la première fois la course a été arrêtée (les conditions météo avaient contraint les organisateurs à annuler la course presque 3 heures après le départ, et juste avant de d’attaquer la zone très montagneuse du col du Bonhomme, NDLR.) et la seconde fois c’était un parcours de repli (un UTMB réduit à 105km et 5900mD+ remporté par François D’Haene, et où Ludovic a terminé 21ème, NDLR.). L’UTMB, c’était devenu ma bête noire, donc je voulais revenir une dernière fois en 2016, et ne plus revenir après !
Photo Stéphane Demard
Et on connaît la suite. Une victoire, et depuis, chaque année, tu es là…
Ludovic Pommeret : Voilà. C’est vrai qu’il y a un peu d’attachement à l’événement. Et puis il y a aussi les partenaires qui nous demandent d’être présents sur cette semaine, même si ce n’est pas forcément pour courir. Après, tant qu’à faire d’être là, autant courir, oui. Et puis l’UTMB, je l’ai refait pour différentes raisons… En 2023 c’était pour les 20 ans de l’épreuve, en 2024 pour les 20 ans de ma première participation…
Et en 2025, ce sera pour quelle occasion ?
Ludovic Pommeret : Ma nouvelle vie, maintenant que je suis professionnel ! (Rires.)
Parlons-en de cette nouvelle vie de pro. Jusque-là, tu étais ingénieur aéronautique, et tu étais passé à temps partiel, à 60% si je ne me trompe. Et là, tu as donc basculé en professionnel à plein temps ?
Ludovic Pommeret : Oui, depuis le 1er avril 2025, je n’ai plus de travail. Mais le fait d’arrêter à mes 50 ans était prévu depuis longtemps. En fait, depuis qu’on a commencé à travailler, avant même que je fasse du trail, on avait prévu, Céline et moi, d’arrêter à 50 ans notre travail respectif. On a donc travaillé pour ça, on a investi aussi, et cette année, ce sont mes 50 ans, donc voilà ! Après, le fait que le trail me rapporte aussi de l’argent aujourd’hui, ça n’était pas prévu, donc ça tombe bien, c’est le petit bonus qui accompagne agréablement le prévisionnel.
Ta deuxième course de cœur après l’UTMB est la Diagonale des Fous, que tu gagnes en 2021 après avoir fait 3 fois second, en 2009, 2014 et 2019. Tu l’as aussi faite en 2022 avec ta femme, qui a dû abandonner, puis de nouveau en 2023, où vous êtes finishers. L’UTMB en duo avec Céline, c’est pour quand ?
Ludovic Pommeret : Ça devait être cette année, mais malheureusement depuis l’OCC l’année dernière elle ne peut plus courir, elle a un problème au genou et a priori ça nécessite une prothèse. Du coup, on verra quand elle aura la prothèse si ça peut le faire ou pas, mais oui, c’est dans les tuyaux…
Tu vas donc refaire un enchaînement Hardrock / UTMB en solo cette année ?
Ludovic Pommeret : Je sais pas, je verrai après la Hardrock. J’ai mon dossard, puisque je devais la faire avec Céline, mais ce qui est sûr, c’est que je retourne à la Diag’, donc faire les trois, pour moi, c’est un peu compliqué. Si je fais l’UTMB à fond, a priori, je serai quand même bien cramé pour la Diag’. Donc je n’en sais rien, je verrai au dernier moment… (Depuis cette interview, Ludovic a tranché : oui à l’UTMB ! NDLR)
Et puis il y a ta fille, Léa, qui s’y est mise également…
Ludovic Pommeret : Oui, elle commence. Pour l’instant elle n’est encore pas très assidue, mais elle aimerait courir aussi. Après, il ne faut pas trop lui mettre la pression. Elle aimerait faire le Métis Trail à La Réunion (50 km et 2600m D+), donc on va aller là-bas ensemble, moi pour courir la Diagonale et elle le Métis. Je pense qu’elle a des capacités, même si elle ne s’entraîne pas beaucoup et qu’elle a une petite faiblesse sur une cheville qu’il faut travailler. Mais si elle est motivée, je pense qu’il y a moyen que ça ne soit pas trop mal.
L’an dernier, tu as fini 5ème de l’UTMB, avec ton meilleur chrono jamais réalisé sur la boucle, en moins de 21 heures. En 2016, tu avais gagné en 22 heures. Tu as donc gagné plus d’une heure. Comment expliques-tu ce gain de performance ? C’est lié à ta forme ? La nutrition ? La concurrence qui te tire vers le haut ? La technologie avec les plaques carbone ? Un peu tout ?
Ludovic Pommeret : Les plaques carbone, je suis pas sûr que ça fasse 1 heure ! Mais c’est vrai que sur le parcours il y a des parties qui sont assez roulantes et qu’on peut avoir le bénéfice de ce matériel. Après, pour expliquer tout ça, il y a diverses choses. D’abord, il y a l’expérience, ça compte un petit peu quand même, dans la gestion de course. Il y a l’entraînement aussi qui a changé.
En 2016, je n’étais pas vraiment spécialisé dans l’ultra, alors que maintenant je ne vais presque plus sur des courses plus courtes, car ça devient compliqué pour moi d’être performant, donc clairement mon entraînement s’est un petit peu adapté. Et ma nutrition aussi. Et également le fait que depuis deux ans j’avais diminué mon temps de travail, donc j’avais plus de temps pour m’entraîner. Je pense que ce facteur est encore plus important sur un ultra, car quand tu dois faire des préparations avec deux semaines de volume, c’est quand même mieux de ne pas travailler.
Parlons entraînement justement. Philippe Propage, qui te coache depuis 10 ans, il te produit toujours des plans ? Et est-ce que tu les suis ?
Ludovic Pommeret : Oui, il me produit des plans d’entraînement, et en principe, oui, je les suis. Sauf pendant l’hiver, quand je fais ma saison d’alpinisme. Là, il ne me produit pas du tout de plans, je lui note ce que je fais, des fois il me met des petites séances de course à pied, mais c’est tout. Sinon, pendant la saison, oui, j’ai mes plans, mais c’est variable. L’année dernière par exemple, sur la Hardrock, il m’a laissé beaucoup plus de liberté par rapport à l’entraînement classique.
C’était aussi dû au fait qu’il y avait ce phénomène d’acclimatation à altitude, et qu’à 4000 mètres, aller faire une séance d’intensité de bonne quantité, c’est compliqué. Du coup, mon entraînement n’était pas vraiment structuré, c’était plus au feeling et en fonction de l’endroit où je me trouvais.
Cette année, on a fonctionné un petit peu de la même manière que l’an dernier, donc il m’a mis des séances et j’ai vu si je pouvais les faire ou pas, sachant qu’avec Céline on a beaucoup bougé, on a fait pas mal de rando, on dormait dans la voiture, on en a bien profité… Et j’ai fait comme l’an dernier, deux soft rock, c’est-à-dire le parcours en entier en 4 jours, dont une fois avec Mathieu Blanchard.
Photo Stéphane Demard
Quel est ton regard sur ces jeunes qui arrivent aujourd’hui sur l’UTMB, dont les départs sont extrêmement rapides et qui explosent en vol ?
Ludovic Pommeret : Je pense que c’est lié à l’évolution du trail en général. L’UTMB est devenu une course tellement importante pour un coureur professionnel qui a besoin de visibilité et de résultat, parce que performer sur l’UTMB peut changer la donne, que ça met indirectement beaucoup de stress, et qu’il faut savoir gérer ce stress. Ces coureurs qui viennent uniquement pour performer, si ils ne voient qu’ils ne peuvent pas monter sur le podium, ils jettent l’éponge.
C’est une autre façon d’aborder la course, et je pense que c’est pour ça qu’il y a beaucoup de déchet. Ce n’est pas trop ma façon de voir les choses, car pour moi, la première performance, c’est déjà de terminer la boucle, mais je peux comprendre le fait que quand on est professionnel, si ça coince un peu, on préfère abandonner et garder les cartouches pour autre chose, pour pouvoir briller ailleurs. Moi, je me satisfais d’une 5ème place !
Ludovic Pommeret, où l’histoire de la remontada de 2016
Devenue légendaire, la remontada de Ludovic Pommeret date de 2016. Alors qu’il pointe en 48ème position au ravitaillement des Chapieux (km 50,9), à près de 45 minutes du leader suite à des problèmes gastriques, il effectue une remontée spectaculaire dans la deuxième partie de course pour prendre la tête dans la descente vers Trient (km 141) et filer la la victoire, qu’il obtient en 22h00 pile, avec 26 minutes d’avance sur le Lituanien Gediminas Grinius et 30 sur l’Américain Timo Tollefson.
Depuis, Ludovic a fait du dépassement de ses adversaires un véritable art. En 2024, il passe ainsi de la 45ème position à La Balme (km 40) à la 34ème au Col de la Seigne (km 63) puis 16ème à Courmayeur (km 83) pour finalement terminer 5ème en 20h 57mn 48s.
Pour célébrer cette stratégie atypique, l’équipementier Compressport a créé cette année une collection capsule au message sans ambigüité : « Stay Behind! » (« Reste derrière ! »), composée d’un tee-shirt Racing et d’un tee-shirt Podium (modèles homme ou femme), d’une paire de manchons de compression, d’une paire de chaussettes, d’une ceinture de course et d’une casquette. Si vous voulez envoyer un message clair à vos adversaires, c’est pour vous. Mais encore faut-il être capable de doubler tout le monde !
Cette interview est parue dans le n°144 d’Esprit Trail, daté août-septembre 2025.
Avec une victoire sur le format 100K de la première édition du Grand Raid Ventoux by UTMB le 26 avril 2025, puis une autre sur le format 100M du redoutable Lavaredo Ultra Trail by UTMB 2 mois plus tard, Ben Dhiman, le plus français des traileurs américains, qui a élu domicile à Bagnères-de-Bigorre, dans les Pyrénées, a parfaitement lancé sa saison d’ultra-trail, dans la continuité des multiples podiums qui jalonnent son CV depuis 4 ans. Seul l’UTMB, avec 2 abandons consécutifs, en 2023 et 2024, semble lui résister. Plus pour longtemps ?Cécile Bertin lui a posé la question, parmi d’autres. Portrait d’un ultra-motivé.
Ben Dhiman, en France pour l’amour d’une femme
Pour certains, comme Jim Walmsley, c’est l’amour pour une course qui amène un Américain à vivre en France. Pour d’autres, c’est l’amour d’une femme. Ben Dhiman est de ceux-là : « Je suis arrivé en France en 2021. Enfin, nous sommes arrivés en France, parce que j’ai rencontré mon épouse en Inde en réalité. Nous faisions tous les deux un périple solo qui s’est fini en duo. » Ben n’est à l’époque pas« vraiment » un traileur, c’est surtout un randonneur, mais de ceux qui ne font pas les choses à moitié.
« Quand j’avais la vingtaine, j’étais à l’université mais j’avais besoin d’autre chose, de quelque chose de plus grand, de plus fort, de plus absolu. Je partais alors sur les chemins de grande randonnée américains, un peu à la façon de Christopher McCandless dans Into The Wild. Comble de l’ironie, il fréquentait la même université que moi. J’étais un peu en révolte vis-à-vis de ma famille, de mon parcours qui semblait être tout tracé. Mais les points communs avec le personnage du roman s’arrêtent là je pense. »
Ben, lui, aime l’effort long et la montagne. Il aime l’idée d’aller d’un point À à un point B à la façon d’un Forrest Gump et assume le fait qu’il n’est pas toujours simple de revenir dans le monde réel lorsque le périple se finit.
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Ben Dhiman, des capacités innées
En 2018, lorsqu’il découvre l’Île de Réunion, où vit sa future belle famille, Ben Dhiman pas le choix : il s’inscrit à la Diagonale des Fous, sans aucune expérience réelle sur ce type d’ultras techniques. Il a bien quelques 100 miles à son actif, courus aux États-Unis en 2017, mais aucun aussi exigeant en terme de difficulté, et où le dénivelé impose le respect. « Il faut bien reconnaître que je cherchais avant tout à impressionner mon futur beau-père ! Le parcours passe carrément devant sa maison puisque le ravitaillement de la Possession est en face de chez eux… »
Pour sa préparation, ce sera bloc de randonnée à Darjeeling et Sikkim, en Inde, pour accumuler du dénivelé. Et là, surprise, il termine 35ème, une belle place au général pour quelqu’un qui a si peu d’expérience sur 100 miles. Devant lui s’ouvrent alors de nouveaux horizons qui n’étaient pas du tout envisagés, et se pose LA question cruciale : et si il s’entraînait sérieusement pour aller titiller les podiums ? « Voir de près des grands champions comme François d’Haene m’a clairement inspiré et donné envie d’aller moi aussi chercher mes limites. Après tout, les premiers résultats étaient là, cela valait la peine de persévérer un peu. »
Modeste, il s’empresse de rajouter : « Je ne veux surtout pas que mes propos soient mal interprétés et que l’on prenne cela pour de la vanité, mais lorsque j’ai réalisé que j’étais capable de faire cette place sans être réellement entraîné pour, je me suis dit que j’avais des capacités innées qui ne demandaient qu’à être exploitées. » Mais pas question pour autant de moment de renoncer à une vie de nomade, et le couple repart vers l’Australie, juste avant la crise du Covid. Pas l’idée du siècle, vous en conviendrez, mais qui pouvait imaginer qu’en quelques jours, le monde entier allait se mettre à l’arrêt et les frontières se refermer.
« Mon épouse est très vite rentrée en France parce qu’elle attendait notre premier enfant, un petit garçon, et qu’il semblait très compliqué de mener à terme une grossesse sur place en toute sérénité. Mais moi je devais rester encore quelques mois, le temps surtout de faire tous les papiers pour pouvoir venir la rejoindre en toute légalité. » Tout finira bien, et quelque temps après, le couple est réuni, s’installe en France, dans les Pyrénées, et Ben Dhiman décide qu’il est temps pour lui de commencer sérieusement une carrière d’ultra-traileur professionnel. Même si, pour cela, il lui faudra renoncer petit à petit à sa façon très naturelle de s’entraîner sans montre connectée. « Je courais tous les jours, pour le plaisir, sans chercher à connaître mes allures ou autres données chiffrées », se souvient-il. Mais seuls les imbéciles ne changent pas d’avis…
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Une SaintéLyon en guise de récupération
Très vite, les résultats sont là, avec entre autres un retour en fanfare sur le Grand Raid et une 3ème place à la clé (derrière Beñat Marmissolle et Jean-Philippe Tschumi), puis un enchaînement de victoires début 2023, les premières de sa carrière, qui le mèneront en avril 2024 sur la plus haute marche du très prestigieux 115 km du MIUT, sur la petite île de Madère. « Je n’ai pas de coach, je considère que je me connais suffisamment pour être capable de faire mes plans d’entraînement seul. Je choisis également mes courses seul, même si bien sûr j’en discute avec Laurent Ardito (le manager du team Ascis, son équipementier et employeur, NDLR).
D’ailleurs, cela entraîne parfois des situations amusantes, comme lorsqu’après la Diagonale des Fous 2024 il m’a proposé de venir comme spectateur sur la SaintéLyon, dont Asics est partenaire majeur. J’ai accepté volontiers, parce que la course fait vraiment partie des incontournables du calendrier français, même si ma spécialité est plutôt la course en montagne. Mais très vite, j’ai réalisé que le côté spectateur sur le bas-côté, ça n’était pas trop mon truc, surtout que la start-list était sympa. J’ai donc finalement demandé un dossard alors que, soyons honnête, cette distance et surtout son caractère ultra roulant n’étaient peut-être pas l’idéal en récupération. » Résultat : une 2ème place à 11 minutes de Thomas Cardin, le grand favori de la course.
L’UTMB, cet ennemi qui lui résiste
Dans toute cette histoire idyllique, subsiste cependant un point noir, une course qui lui résiste, comme le village gaulois à l’envahisseur romain : l’UTMB ! Deux départs, deux abandons, avec à chaque fois des explications. « Ma première participation, en 2023, c’est le stress de vouloir trop bien faire qui m’a finalement perdu, se souvient-il. Je venais de signer un contrat avec mon équipementier, j’avais la volonté de bien faire, de trop bien faire. Seulement voilà, j’ai trouvé le moyen de tomber malade quelques jours avant la course. On peut y voir le signe d’une fragilité, conséquence classique d’un entraînement intensif, je ne sais pas… Mais le résultat était là, j’ai dû abandonner.
L’année suivante, je suis revenu, j’avais les jambes, mais c’est mon système digestif qui m’a fait défaut. J’ai vomi plus que de raison, et là encore j’ai dû abandonner. Est-ce l’expression physique de mon stress ? Peut-être, je ne sais pas. Mais les résultat étaient là, et ils n’étaient pas forcément simples à analyser. »
Loin de se décourager, Ben Dhiman persiste et signe, avec un projet clairement assumé et revendiqué : il n’est pas sur la ligne de départ en mode « esprit de Coubertin » dans l’idée de seulement participer, mais parce qu’il compte bien un jour gagner l’UTMB ! Et tout faire pour. Pour les problèmes digestifs, il a d’ailleurs sa petite idée :
« Je pense qu’il y a une piste que beaucoup d’ultra-traileurs n’ont pas forcément envisagée. En vivant en France, j’ai appris à me nourrir au quotidien de façon totalement différente. Comparé à l’alimentation made in USA, il faut bien avouer que ce n’est pas très compliqué de manger plus sainement d’ailleurs. Et là, le temps d’une course, on charge de façon excessive notre corps de glucides et autres gels. Je pense que notre organisme n’est plus prêt à encaisser tout ça. J’avais beaucoup moins de problèmes gastriques lorsque je mangeais un peu n’importe quoi, façon junk food américaine.
Et puis surtout, je pense qu’il faut être conscient du fait qu’un ultra-traileur n’est pas un cycliste ou un triathlète. Transposer sans les adapter des protocoles nutritionnels à la mode que l’on voit fleurir un peu partout dans d’autres sports n’est pas une bonne idée. Sur un ultra, où par la force des choses on court forcément plus de 10 heures, il faut forcément rajouter un peu de solide ! »
Sans parler du fait qu’un plan qui fonctionne très bien sur plusieurs courses peut se révéler catastrophique le jour J, quand d’autres facteurs externes viennent perturber la machine pourtant bien huilée. La gestion d’une bonne hydratation, par exemple, est aussi capitale pour être justement capable d’encaisser une telle dose de glucose. Comme pour l’entraînement, Ben Dhiman ne fait confiance qu’à lui-même pour élaborer son programme de nutrition, partant du principe que là encore, si quelqu’un connait ses besoins, c’est bien lui et personne d’autre.
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Les FKT, non, la compétition, oui !
Et les FKT aux États-Unis dans tout ça ? Parce qu’avec un parcours pareil, la question se pose naturellement. À une époque où de plus en plus d’ultra-traileurs s’attaquent à des records sur des grands parcours de randonnée, comme François D’Haene cet été sur le Nolan’s 14, revenir courir sur des traces connues et déjà explorées aurait une certaine logique.
« Même si cela peut sembler évident à la vue de mon CV, ça n’est pas du tout dans mes projets ! Je suis vraiment devenu ultra-traileur avant tout et j’ai trop d’envies à satisfaire, d’objectifs dossards pour le moment pour retourner passer plusieurs semaines sur des chemins américains. Cela demande trop de temps, trop d’investissement physique pour prendre ce risque. Et puis j’avoue, j’ai l’esprit de compétition vis-à-vis de moi-même, mais aussi vis-à-vis des autres.
J’adore être sur une course et me bagarrer sur les chemins avec les autres concurrents. Ce que j’ai vécu au Ventoux avec Baptiste*, c’est vraiment ce qui me fait vibrer. Cette concurrence saine, ce duel au sommet où quasiment jusqu’au bout, nous ne savions pas qui de lui ou moi allait passer le premier la ligne d’arrivée, j’ai adoré. Un FKT, tu es seul face à toi-même, face à une trace, et parfois face à un temps à battre mais cela manque sérieusement de relations humaines et ce n’est pas ce que je cherche aujourd’hui. »
S’il retourne courir aux USA, ce sera plutôt pour une Hardrock 100, course mythique s’il en est, qui le fait rêver depuis plusieurs années. Hasard de la vie, même si on peut plutôt y voir un signe du ciel, Ben Dhiman a passé quelques mois à Silverton, vivant dans une tente à côté de la rivière et travaillant comme serveur dans l’un des quelques restaurants de la petite ville qui se remplissait de traileurs début juillet. Nous étions alors en 2017, et Kilian Jornet avait réussi l’exploit de gagner la course le bras en écharpe après s’être démis l’épaule, rajoutant une page de plus à sa légende déjà bien fournie.
« Le voir courir comme ça, alors que n’importe qui aurait raccroché, m’avait vraiment impressionné et inspiré, se souvient-il. Mais je ne m’étais pas contenté d’être spectateur cette année-là, mon job de serveur m’avait permis de faire la connaissance de traileurs arrivés quelques semaines avant pour repérer les lieux qui m’avaient demandé si je connaissais des pacers pour les accompagner. J’avais tout de suite répondu que je pouvais le faire. Certes, aucun n’avait le niveau d’être vainqueur, j’avais été là uniquement pour les accompagner et les aider à être finisher, mais j’avais adoré l’expérience, l’ambiance qui régnait sur cette course et je m’étais promis de revenir un jour, cette fois avec un vrai dossard accroché sur mon t-shirt, même si je sais que la sélection y est difficile. » Alors qui sait, après avoir gagné à Chamonix, peut-être verrons-nous un jour Ben gagner aux Etats-Unis.
*Ben Dhiman a pris le lead à seulement quelques kilomètres de l’arrivée du format 100K du Trail du Ventoux by UTMB, après avoir formé un duo avec Baptiste Chassagne pendant une bonne partie de la course.
Des dunes marocaines aux sommets européens, Elhousine Elazzaoui est entré dans le monde de la compétition par hasard. Mais il n’a jamais cessé de courir. Au-delà de ses victoires, dont le titre des Golden Trails World Series en 2024, le « Flying Camel », surnom qu’il s’est approprié, est connu pour quelque chose de plus profond : sa capacité à transcender les frontières, à gagner le respect et à nouer des amitiés durables. Pour la première fois, il partage son histoire dans The Nomad, un film qui raconte ses origines, le chemin parcouru et les personnes qui l’ont accompagné sur ce chemin.
Sortie : 2025 Durée : 18 minutes Langue : Français
Une première édition est toujours un événement, à la fois pour les organisateurs qui se lancent dans la grande aventure de l’événement trail, et pour les participants, qui donnent au rendez-vous ses lettres de noblesse. Et pour un début, le Trail du Corbier a fait une entrée remarquée les 9 et 10 août dans le calendrier des épreuves d’été, avec 6 formats de course, une ambiance conviviale, des parcours exigeants et des panoramas grandioses. Près de 800 participants ont répondu à l’appel des sommets dans le décor sauvage et majestueux de la Maurienne, au cœur du domaine Les Sybelles. Une 1ère édition pleine de promesses…
Trail du Corbier : du KV au nocturne, une première journée « parfaite »
Samedi 9 août dès 10h, les participants du KV de la Pointe ont eu l’honneur de fouler les sentiers pour écrire les premières pages de l’histoire du Trail du Corbier. Un effort intense depuis Villarembert jusqu’à la Pointe du Corbier, où les amateurs de dénivelé ont pu se mesurer à la verticalité pure, dans un cadre grandiose. Chez les hommes, Jonas BUCHOT a devancé Aurélien JEGOU et Simon MAHUT, tandis que chez les femmes, Angélique PASQUALI s’est imposée devnat Léane ROSSAT et Constance LAMBIN.
La journée s’est poursuivie avec le Trail des Pitchounes, qui a permis à près de 100 enfants de 7 à 14 ans de s’initier au trail, dans une ambiance festive. Répartis par catégories d’âge, les jeunes coureurs ont enchaîné les efforts sur des parcours adaptés, sous les regards admiratifs des parents. La relève est assurée !
Enfin, à la nuit tombée, les frontales ont illuminé les sentiers à l’occasion du Trail Nocturne. Un moment hors du temps, sous les étoiles, pour les coureurs qui a conclu de fort belle manière cette première journée. Erwann DENIS s’est imposé devant Augustin RIBIOLLET et Jérémy FOUGERE, tandis que chez les femmes, Constance LAMBIN, 3ème du KV, est cette fois-ci montée sur la plus haute marche du podium, devant Lucie LAMBERT et Julie SIMON.
Photo TRAIL DU CORBIER
Trail du Corbier : cap sur les sommets pour les épreuves du dimanche
En raison des fortes chaleurs annoncées, l’équipe d’organisation avait décidé, dès la veille, d’avancer les horaires de départ des courses du dimanche 10 août, afin de garantir la sécurité de tous.. Ainsi, dès 7h30, la journée a commencé avec le Trail des Sybelles : un parcours exigeant de 32 km pour 2100m D+, à travers les crêtes et les panoramas spectaculaires du domaine. Mont Charvin, Pointe du Corbier, Pointe de l’Ouillon… plus de 200 coureurs ont enchaîné les sommets et profité des panoramas grandioses. Et les sourires sous l’arche d’arrivée en disaient long sur la fierté d’avoir relevé ce défi. Chez les hommes, le plus rapide a été Jonas BUCHOT, qui a devancé sur la ligne d’arrivée Romain SAUVEY et Sylvain LAMARQUE. Chez les femmes, la victoire est revenue à Estelle OLIVIER, devant Lorna BONNEL et Clara DETIENNE.
Plus court mais tout aussi spectaculaire, le Trail du Charvin n’a pas été en reste : avec ses 16 km pour 1100m D+, le tracé empruntait la première partie du grand parcours jusqu’au sommet emblématique du Charvin. L’épreuve, qui a séduit les 180 traileurs et traileuses en quête d’un effort intense sur une distance plus accessible, a sacré à l’arrivée Paul BURETTE devant Louis BOUCHET et Aurélien JEGOU, 2ème du KV la veille chez les hommes, Léane ROSSAT devant Tiara AMRHEIN et Gabrielle FERRATON chez les femmes.
Enfin, le Trail de l’Ouillon, avec son départ insolite depuis le sommet du télésiège « Sybelles Express », offrait une expérience différente : un tracé descendant et rapide, parfait pour les coureurs débutants ou ceux en quête de sensations. Chez les hommes, les plus rapides ont été Johan CHAMPION le bien nommé, devant Emilien MARION et Tom NORAZ. Chez les femmes, la victoire est revenue à Angélique PASQUALI, qui a devancé Charlotte FERT et Eponine DEPRE.
Photo TRAIL DU CORBIER
Trail du Corbier : “L’aventure ne fait que commencer !”
Entre défis sportifs, sourires partagés et paysages à couper le souffle, cette première édition du Trail du Corbier aura marqué les esprits. L’oganisation, ravie de ce succès, n’a pas manquer de remercier tous les participants, bénévoles, partenaires et spectateurs qui ont contribué à faire de ce week-end une vraie réussite. « L’aventure ne fait que commencer », ont conclu les organisateurs, donnant d’ores et déjà rendez-vous pour la prochaine édition, en août 2026.
Nombreux sont ceux qui prennent le départ, mais seuls quelques privilégiés ont l’honneur d’inscrire leur nom au palmarès de Sierre-Zinal. Et ils sont encore moins nombreux à avoir l’occasion de le faire deux fois, même si Kilian Jornet, maître incontesté de l’épreuve, l’a remportée 10 fois. Parmi les champions ayant inscrit 2 fois leur nom au palmarès de “la Course de Cinq 4000”, il faut désormais compter les Kényans Philemon Kiriago et Joyline Chepngeno, qui ont décroché leur deuxième victoire sur cette course légendaire de 31 km, 2.200 m D+ et 1100m D- entre Sierre et Zinal.
Sierre-Zinal 2025 : un héros local nommé Adrien Briffod
Sierre-Zinal ne laisse aucun répit. Après le coup de pistolet et à peine plus d’un kilomètre sur asphalte, les coureurs entraient dans la section la plus exigeante du parcours. Sur les 8 premiers kilomètres menant à Ponchette, ils grimpaient plus de 1300 mètres de dénivelé, soit plus de la moitié du total de la course. C’est ici que Philemon Kiriago a voulu imposer un rythme de vainqueur dès le départ, mais il a vite été rejoint par son compatriote Josphat Kiprotich et le Suisse Adrien Briffod. Briffod, héros local venu du triathlon, 41ème de l’édition précédente, a même réussi à prendre le large. Il a été le premier à franchir la partie la plus exigeante, suivi à plus d’1mn30 de Kiriago et Kibett. Le Suisse Dominik Rolli et Josphat Kiprotich suivaient à moins de deux minutes.
Une fois la portion la plus dure franchie, commençait les montagnes russes de Sierre-Zinal, le fameux « Fast & Furious » qui incarne l’essence même de cette course. Avec une pente plus douce mais encore du dénivelé à accumuler, Adrien Briffod restait en tête, Philemon Kiriago se rapprochant peu à peu.
Adrien Briffod. Photo rising.story_@justingalant
Sierre-Zinal 2025 : Philemon Kiriago en patron
La montée se poursuivait et, dans la partie finale, vers le point le plus haut du parcours, avant d’entamer la descente vers Zinal, Philemon Kiriago prenait les commandes. Adrien Briffod résistait mais finissait par céder face à la charge finale des Kenyans Patrick Kipngeno, Michael Selelo Saoli et Paul Machoka, lancés à vive allure derrière lui.
Dans la descente vers Zinal, seul Patrick Kipngeno parvenait à réduire légèrement l’écart avec son compatriote Kiriago, mais pas assez pour l’empêcher de signer un deuxième succès sur l’une des courses les plus prestigieuses du trail. Selelo Saoli complétait le podium, tandis que Briffod, héros local inattendu de la journée, et Machoka terminaient respectivement quatrième et cinquième.
À l’arrivée, cette deuxième victoire ne semblait pas suffire à Philemon Kiriago, qui affichait clairement ses ambitions : « Je suis très heureux de remporter à nouveau Sierre-Zinal. Mes coéquipiers rêvent de dominer Sierre-Zinal autant que possible. Mon objectif est de m’approcher des cinq victoires ici avant de viser d’autres courses comme Zegama-Aizkorri. Remporter cinq fois ici est mon rêve. »
Patrick Kipngeno, 2ème, et Elhousine Elazzaoui, le grand battu du jour, seulement 9ème. Photo @rising.story_@justingalant
Sierre-Zinal 2025 : le Top 10 Hommes
Philemon Kiriago (Kenya – Run2gether On Trail) 2:28:32 2. Patrick Kipngeno (Kenya – Run2gether On Trail) 2:29:09 3. Michael S. Saoli (Kenya – Run2gether On Trail) 2:29:15 4. Adrien Bridffod (Suisse – Atlet) 2:32:07 5. Paul Machoka (Kenya – Atletica Saluzzo) 2:33:02 6. Martin Nilsson (Suède – VJ) 2:33:53 7. Dominik Rolli (Suisse – Salomon) 2:34:10 8. Andreu Blanes ( Espagne- Hoka) 2:35:20 9. Elhousine Elazzaoui (Maroc – Nnormal) 2:36:00 10. Francesco Puppi (Italie – Hoka) 2:37:50
Le Top 5 hommes. Photo @rising.story_@mathisdecroux
Sierre-Zinal 2025 : Joyline Chepngeno royale
Dès le départ, les Kényanes Joyline Chepngeno et Caroline Kimutai ont pris la tête de la course féminine dans les premiers kilomètres de l’ascension vers Ponchette. À mi-pente, Kimutai a réussi à creuser un léger écart sur ses poursuivantes. L’Allemande Laura Hottenrott a également joué un rôle de premier plan, menant la course sur les pentes les plus raides. Une fois la section la plus difficile franchie, Kimutai a repris les commandes, suivie une minute plus tard par la tenante du titre Chepngeno. Laura Hottenrott accusait alors un retard de plus d’une minute et demie.
Au kilomètre 12, le top 5 était complété par la Roumaine Madalina Florea et la quadruple vainqueure de Sierre-Zinal, détentrice du record féminin, la Suissesse Maude Mathys, toutes deux à deux minutes et demie de la tête.
Aux abords de Chandolin (kilomètre 12), Joyline a rattrapé Kimutai et a pris la tête, une position qu’elle ne quittera plus jusqu’à l’arrivée. Presque trois minutes derrière, on retrouvait Hottenrott, Florea et Mathys. À Nava, le point le plus élevé du parcours, Chepngeno comptait plus d’une minute et demie d’avance sur Kimutai, conservait trois minutes sur Hottenrott, et devançait Mathys et Katie Schide de quatre et cinq minutes respectivement.
À Zinal, Chepngeno franchissait la ligne victorieuse pour la deuxième année consécutive. C’est ici même, en 2024, qu’elle s’était révélée en remportant l’une de ses premières grandes courses de trail, créant la surprise avec un chrono 46 secondes plus rapide que celui de cette année. Kimutai, Schide et Mathys ont conservé leurs deuxième, troisième et quatrième places respectives, tandis que la Suissesse Oria Liaci dépassait Hottenrott pour s’emparer de la cinquième place. « Je ne m’attendais pas à gagner cette course », confiait une Chepngeno émue à l’arrivée.
Joyline Chepngeno à l’arrivée. Photo @rising.story_@mathisdecroux
Le Top 5 Femmes. Photo @rising.story_@mathisdecroux
Direction la Grande Finale de la GTWS 2025
Sierre-Zinal marque la clôture de la saison régulière des Golden Trail World Series (GTWS) 2025, qui comptait 8 étapes. Les grands vainqueurs de cette saison seront connus lors de la grande finale du Ledro Sky Trentino, du 9 au 12 octobre 2025. Le format différent des courses disputées jusqu’à présent promet du suspense, puisque cette finale comprendra un prologue contre-la-montre et des courses séparées pour les hommes et les femmes. En ce qui concerne les points, le double de ceux attribués lors d’une course classique sera accordé, de sorte que tout reste encore à décider pour le classement général. Actuellement, Elhousine Elazzaoui et Madalina Florea mènent le classement général.
Top 10 hommes Classement général GTWS 2025
Elhousine Elazzaoui (Maroc – Nnormal) 600 points 2. Patrick Kipngeno (Kenya – Run2gether On Trail) 588 points 3. Philemon Kiriago (Kenya – Run2gether On Trail) 588 points 4. Michael S. Saoli (Kenya – Run2gether On Trail) 498 points 5. Daniel Pattis (Italie – Brooks) 470 points 6. Taylor Stack (États-Unis – Broos) 453 points 7. Roberto Delorenzi (Suisse – Brooks) 436 points 8. Cesare Maestri (Italie – Nike) 434 points 9. Dominik Rolli (Suisse – Salomon) 432 points 10. Pierre Galbourdine (France – Brooks) 423 points
Trop d’assistance dans les ultras nuit à l’égalité des chances ! C’est par un article publié sur ses réseaux que Kilian Jornet a décidé de lancer un pavé dans la mare et d’aborder enfin le problème dès ravitaillements, où certains coureurs parmi les élites ont carrément une « armée » entière à leur service quand d’autres sont seuls à devoir tout gérer.
Assistance sur les ultras : le cas extrême de la Western States Endurance Run 2025
Ce n’est pas un hasard si Kilian Jornet a attendu le début du mois d’août pour jeter un pavé dans la mare. En juillet, alors qu’il a participé à la Western States Endurance Run aux États-Unis, le « Patron » a été frappé par l’assistance dont ont pu bénéficier certains coureurs élites, avec à chaque ravitaillement plusieurs personnes à leurs soins et une démesure dans l’assistance, allant des changements de chaussures et de tenues aux « piscines » remplies d’eau fraîche pour se refroidir, tandis que d’autres coureurs élites n’avaient personne sur certains points. Un constat d’autant plus étonnant que sur la Western States, course extrêmement rapide, il est rigourseusement impossible pour une même personne d’être présente sur tous les points de ravitaillement. Certains coureurs ont donc carrément plusieurs équipes d’assistance à leur service, ce qui suppose une organisation et des moyens démesurés. Et Kilian Jornet, sans vouloir une suppression totale des assistances, de souligner les efforts faits par les organisateurs de l’ULTM Mont-Blanc pour limiter le nombre de points d’assistance et surtout d’intervenants, afin de maintenir un certain cadre d’égalité pour les athlètes en quête de performance.
Kilian Jornet, le plaidoyer pour moins de démesure dans l’assistance
Voici le texte intégral (traduit) qui lance le débat :
« Lors de mes premières courses de trail longues, l’assistance était simple. On emportait le nécessaire, et de temps en temps, il y avait un poste de ravitaillement où des bénévoles distribuaient de l’eau, des bananes, et parfois du chocolat. Avec un peu de chance, un ami ou un membre de la famille pouvait vous retrouver à un croisement avec un morceau de votre plat préféré. C’était simple, et c’était pareil pour presque tout le monde.
Au fil des ans, le sport a beaucoup évolué. Aujourd’hui, sur certaines courses, des athlètes professionnels comme moi peuvent disposer d’une équipe complète à plusieurs endroits du parcours : des personnes prêtes avec des boissons fraîches, des chaussures sèches, des gilets de course avec tout le nécessaire pour la section suivante, et même des piscines gonflables ! Dans d’autres cas, on peut voir un athlète arriver seul, avec l’aide d’une seule personne, voire sans personne. Pourtant, l’importance du soutien n’est plus un détail. C’est devenu l’un des facteurs de performance les plus importants dans les courses d’ultra-trail modernes.
(Kilian Jornet donne ensuite l’exemple, vidéos à l’appui, de 2 ravitaillements effectués par 2 athlètes élite sur la Western States : l’un avec une assistance très organisée, qui dure quelques poignées de secondes, l’autre avec un coureur sans aucune assistance, obligé de tout faire lui-même, et prenant évidemment beaucoup plus de temps). Et Kilian de commenter ces 2 exemples :
« L’un cherche à optimiser son temps et y consacre toutes les ressources et la réflexion nécessaires, l’autre improvise principalement sur le tas. Il existe de nombreux niveaux intermédiaires, et de toute façon, les deux respectent les règles de la course. Dans ce cas, si l’on cherche le meilleur résultat, on essaiera de maximiser les ressources et d’optimiser le temps passé aux ravitaillements en conséquence. Mais comme les athlètes peuvent avoir des ressources financières et humaines différentes, la question est : est-ce équitable ? Et peut-être plus important encore : est-ce la direction que nous souhaitons donner à ce sport ?
Soyons clairs : avoir du soutien n’est pas une mauvaise chose. C’est formidable d’avoir sa famille, ses amis ou une équipe qui vous encourage, vous tend sa bouteille, peut-être même son en-cas préféré ou change sa lampe frontale. Cela peut vous aider à rester dans la course, physiquement et mentalement. Cela permet de se connecter à un effort autrement solitaire. De même, lors des ultra-trails, où l’athlète court pendant des dizaines d’heures, avoir une alimentation testée et se sentir bien est essentiel, et il serait difficile de tout transporter dès le départ. Un point d’assistance est donc logique.
Mais la réalité actuelle est que la quantité et la qualité du soutien varient énormément. Certains athlètes arrivent à un ravitaillement entourés de cinq personnes : l’une change leurs chaussures, l’autre remplit leurs bouteilles, une autre les nourrit, et une autre encore leur donne des informations en direct grâce au tracker. D’autres arrivent seuls, parfois sans personne pour leur remettre un sac de transport. Et ce n’est pas qu’anecdotique : cela a un impact direct sur la performance.
Sur des courses comme la Western States, le règlement autorise ce type d’équipage complet. En revanche, d’autres événements comme l’UTMB ont mis en place des règles spécifiques : limitation des lieux d’assistance, du nombre de personnes autorisées à apporter leur aide et de la quantité de matériel pouvant être échangé. Il s’agit d’une tentative d’égaliser les chances, et je crois que c’est nécessaire.
Cela nous amène à une question plus profonde : quel type de sport construisons-nous ?
L’ultra-trail est-il en passe de devenir comme la Formule 1 ou le cyclisme professionnel, où la performance ne dépend pas seulement de l’athlète, mais aussi de la taille de l’équipe, de la technologie et des moyens financiers ?
Voulons-nous un avenir où les athlètes bénéficient d’une équipe de voitures d’assistance qui suivent le parcours, où les changements de vitesse et les stratégies de refroidissement deviennent des atouts décisifs ? Ou bien considérons-nous le trail comme une activité liée à l’exploration personnelle et à une certaine autonomie en pleine nature ? Une course où amateurs et professionnels affrontent les mêmes montagnes, le même soleil, les mêmes ravitaillements — et la même chance de s’en sortir.
Je ne prône pas l’absence totale de soutien. Mais je crois que des limites claires et cohérentes sont nécessaires pour garantir l’équité, notamment dans les courses professionnelles.
Réglementer le nombre de zones de secours autorisées aux équipages, limiter le nombre de personnes pouvant apporter leur aide et définir les échanges possibles sont autant de mesures simples qui préservent l’équité dans ce sport.
Cela compte aussi au-delà de la compétition. En banalisant les équipages excessifs, nous relevons les barrières à l’entrée. Il devient plus difficile pour les athlètes sans gros budget ou équipes de concourir à armes égales. Cela contredit l’idée que l’endurance est une question de résilience, et non de ressources.
En tant qu’athlètes d’élite, nous participons à ce jeu de renforcement du soutien, car nous cherchons toujours à maximiser nos performances dans les limites autorisées par le règlement, afin d’avoir les mêmes chances que les autres athlètes qui les optimisent également. Ainsi, nous apportons de plus en plus d’aide chaque année, creusant ainsi l’écart avec les athlètes qui ne peuvent pas bénéficier d’une assistance. Ainsi, si les règles restent ouvertes, il sera plus compliqué de revenir à une compétition plus équitable pour tous.
Réfléchissons à ce que sera le sport dans dix ans. Souhaitons-nous un sport où, pour performer, il nous faudra des budgets plus importants, des équipes plus importantes et où les athlètes n’auront « que » besoin de courir ? Ou souhaitons-nous un sport où tous les coureurs auront les mêmes chances et où la gestion de l’humain face aux défis des espaces et des conditions naturelles fera toujours partie du parcours ?
https://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/08/Kilian-Jornet-WSER-2025.-Photo-NNormal-.png7581200Patrick Guerinethttps://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/02/ET-logo-vert-noir-300x87.pngPatrick Guerinet2025-08-09 16:53:212025-08-09 16:53:25Assistance sur les ultras : Kilian Jornet lance le débat
“States of Elevation” est le nouveau projet de Kilian Jornet : une aventure en autonomie totale visant à relier à pied et à vélo les sommets de plus de 14 000 pieds (environ 4 270 mètres) à travers les États-Unis. Un défi particulièrement exigeant, au cours duquel Kilian parcourra chaque jour l’équivalent d’une étape du Tour de France et d’un marathon — l’altitude et les terrains techniques en plus. Au-delà de l’effort physique, ce projet reflète la profonde connexion de Kilian avec les espaces sauvages, ainsi que sa quête constante de sens à travers l’endurance, la nature et l’exploration.
States of Elevation : dans la continuité de Pyrénées 3000 et Alpine Connections
C’est début septembre 2025 que Kilian Jornet lancera son nouveau projet, States of Elevation. En partant de Longs Peak dans le Colorado, il cherchera à relier les « fourteeners » américains — sommets de plus de 14000 pieds — uniquement par des moyens humains : course à pied et vélo.
Réputé pour repousser les limites du potentiel humain et de l’endurance athlétique, States of Elevation n’est pas qu’un exploit sportif ; c’est aussi un message fort sur la découverte de la nature américaine, l’engagement, et le lien avec les communautés.
L’approche de Kilian Jornet s’inscrit dans la continuité de sa philosophie de toujours : minimalisme, respect de la nature et exploration responsable. Ce projet fait suite à d’autres défis d’endurance tels que Alpine Connections en 2024 et Pyrenees 3000 en 2023, lors desquels il avait relié certains des plus hauts sommets des Alpes et des Pyrénées.
States of Elevation : Kilian Jornet explorateur
« Ce que j’ai vécu dans les Pyrénées et les Alpes m’a motivé à continuer d’explorer cette dimension des longues traversées, qui comporte un fort aspect physique, cognitif et créatif. Je cherche clairement une continuité dans ce sens. Sous prétexte de relier les sommets de plus de 14000 pieds, mon objectif est aussi d’explorer l’Ouest américain — l’immensité des paysages, des cultures qui y ont vécu et y vivent encore, ainsi qu’une nature souvent sauvage et incroyablement variée, allant des zones alpines aux forêts denses en passant par les déserts.“
Kilian Jornet lors de son projet Alpine Connections, en 2024. Photo Alpine Connections
States of Elevation : 58 sommets au programme
Si le communiqué de Kilian Jornet ne le précise pas, on peut supposer que son projet s’articule autour des « Fourteeners » du Colorado, donc en écartant le Mount Rainier situé dans l’État de Washington. Selon la façon dont on compte chaque sommet, le Colorado compte entre 53 et 58 sommets de plus 14000 pieds. La différence de comptabilisation tient de fait que certains ne comptent pas les sommets voisins quand les 2 “pics” ont moins de 300 pieds d’écart (91 mètres). Depuis les années 1960, de nombreux alpinistes se sont succédé pour tenter d’établir un record de vitesse sur ces sommets du Colorado, record établi généralement sur 55 sommets. Le premier officiellement recensé est Cleve McCarty qui en 1960 a reconnu 52 sommets en 52 jours.
En septembre 2020, l’Américain Teddy Keizer, connu sous le surnom de « Cave Dog », a établi le record en 10 jours, 20h et 26mn. Le parcours est connu dans le milieu sous le nom de « The Mighty Mountain Megamarathon ». Mais le tout dernier FKT recensé est celui de Andrew Hamilton, sur 58 sommets, en 9 jours 21h 51mn en version avec assistance.
En version sans assistance, le record est détenu par Daniel Hobbs depuis juillet 2022 en 14 jours, 17h et 33mn. C’est sans doute ce record auquel va s’attaquer Kilian Jornet.
States of Elevation : inspirer les jeunes générations
En fin de compte, States of Elevation est un nouvel exemple de l’engagement de Kilian Jornet à utiliser ses projets sportifs comme leviers pour des changements porteurs de sens. En inspirant les gens à adopter les valeurs d’aventure, de responsabilité et de respect de l’environnement, Kilian espère encourager une plus grande appréciation des espaces sauvages qui nous nourrissent et nous inspirent chaque jour, pour laisser derrière lui un héritage d’actions impactantes et de prise de conscience pour les générations futures.
https://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/08/KILIAN-JORNET.jpg8001200Patrick Guerinethttps://www.esprit-trail.com/wp-content/uploads/2025/02/ET-logo-vert-noir-300x87.pngPatrick Guerinet2025-08-07 11:50:272025-08-07 12:22:56States of Elevation, le nouveau défi de Kilian Jornet