Guillaume Grima, 2ème de la Yukon Arctic Ultra : « À – 40°C, ça devient dangereux ! »
En terminant 2ème de la Yukon Arctic Ultra seulement quelques heures après Mathieu Blanchard, Guillaume Grima est entré de plain pied dans la légende de cette course extrême de 600 km dans le Grand Nord canadien, où les températures peuvent atteindre -40 à -50°. De retour « sur terre » après ses 8 jours dans l’enfer du froid, le musher ubayen de 26 ans témoigne.
Comment se passe le retour à la civilisation ?
Guillaume Grima : Ça va ! Une grosse vague de messages et de sollicitations, ce qui est nouveau pour moi. Physiquement, je récupère doucement, je me repose et je mange.
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Vous étiez coupé du monde durant l’épreuve ?
Guillaume Grima : J’avais mon téléphone pour prendre des photos mais il était en mode avion, je n’avais aucun contact avec l’extérieur. J’envoyais seulement un message par jour à ma copine, via satellite, pour lui dire comment j’étais. C’était un choix d’être déconnecté.
Vous conseilleriez la Yukon Arctic comme digital detox ?
Guillaume Grima : (Rires.) Ce n’est peut-être pas nécessaire de faire 600 km mais ça fait du bien, parce qu’on se retrouve avec soi-même !

Pourquoi y êtes-vous allé ?
Guillaume Grima : J’ai grandi dans les Alpes du Sud, à Barcelonnette. J’ai toujours vécu entre le ski et le froid. Je suis arrivé au Yukon il y a deux ans et demi pour découvrir le milieu des chiens de traîneau. C’est là que j’ai découvert ce genre de course. Comme je fais de l’ultra trail je me suis dit, ça a l’air cool ! J’avais fait les 150 km il y a deux ans. Depuis, je voulais faire la grande pour me challenger, avoir ce côté froid et survie, vivre une aventure en quasi-totale autonomie.
Ressent-on la différence entre -20 et -40°C ?
Guillaume Grima : Oui ! Jusqu’à -20°C, ce sont les bonnes températures pour évoluer dans ce milieu car on a l’équipement pour lutter contre. Il ne fait pas assez chaud pour transpirer mais ce ne sont pas des températures extrêmes. À partir de -30°c, ça commence à faire froid, on réfléchit quand on enlève les gants, il faut faire les choses vite, installer le bivouac rapidement. En dessous de -40°C, même avec la doudoune d’expédition, on sent le froid. Il faut alors tout le temps être en mouvement, si on s’arrête plus de 20 minutes, ça peut devenir dangereux.
Avez-vous conservé tous vos orteils ?
Guillaume Grima : J’ai tout ! On a un contrôle médical à tous les checkpoints, soit tous les 45 à 80 km. Ils nous regardent les doigts, les pieds, le nez, les oreilles, vérifient qu’on est encore lucide, si on arrive à refaire nos lacets, etc.
Cette course est-elle plus éprouvante physiquement ou mentalement ?
Guillaume Grima : Jusqu’au 150ème kilomètre, soit les deux premiers jours, c’est beaucoup physique. À partir de là, la fatigue nerveuse et musculaire s’installe et le mental entre en jeu parce qu’on est dans l’inconfort permanent. On est humain, on veut que ça s’arrête. Il faut alors se rappeler pourquoi on est là et ne pas gâcher l’opportunité qu’on s’est créée d’y être. Penser à des réconforts, la famille, les amis, au premier petit-déjeuner après la course avec des bonnes patates et du bacon ! (Rires.)
Vous êtes-vous fait quelques frayeurs ?
Guillaume Grima : La nuit qui a suivi les aurores, ça a été la plus froide de toute la course. J’avais installé un thermomètre sur la luge et en longeant une rivière, c’est descendu à -48°C… Cette nuit-là, j’avais décidé de ne pas dormir pour atteindre le dernier checkpoint au petit matin, ça a été très éprouvant. J’avais toutes mes affaires sur moi mais je sentais qu’il ne fallait pas que je m’arrête. Avec la fatigue, mes yeux se fermaient et ma vision se troublait. J’ai eu la chance de trouver une cabane de trappeur ouverte. C’était un abri au sec qui m’a autorisé à fermer les yeux 20 minutes. En arrivant au checkpoint, je croise Mathieu Blanchard qui me précédait de quelques heures et on se prend dans les bras. On venait de vivre un enfer de froid. J’ai pleuré, c’était un moment intense.

Réalisez-vous la performance sportive que vous venez de faire ?
Guillaume Grima : Un peu… J’essaie de comparer ça à un UTMB et le temps qui me séparerait de Mathieu. Rapporté à la distance, je finis très peu de temps derrière et c’est une énorme surprise pour moi. J’y allais avant tout pour la finir. Je me suis lancé en solitaire dans cette aventure en essayant, sans succès, de trouver des sponsors et partenaires, en m’entraînant sans coach et avec ma pulka. Avec l’engouement et les sollicitations que je reçois, je réalise que c’est une performance !
SOURCE DL

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