Résultat Diagonale des Fous 2022 : Beñat Marmissolle couronné, Courtney Dauwalter souveraine
Ils étaient 25000 à acclamer les 2600 coureurs représentant 45 nations au départ de Saint-Pierre, au sud de l’île de la Réunion, pour les 30 ans du Grand Raid de la Réunion. Sur l’épreuve phare, la Diagonale des Fous, 164 km de montagnes russes à travers toute l’île, le Basque Beñat Marmissolle, 3e en 2021, l’emporte au bout du suspense. Il devance son compagnon de course sur plus de 80 km, le Suisse Jean-Philippe Tschumi. Exploit de Courtney Dauwalter, qui prend la 4e place, à moins de 1h30 du vainqueur.
Diagonale des Fous 2022 : Beñat Marmissolle la voulait
Il en rêvait, il l’a fait. Pour clôturer une saison exceptionnelle, qui l’a vu remporter de très belles victoires, dont le Restonica Trail en Corse et la 6000D à La Plagne, et accrocher une belle 6e place à l’UTMB, Beñat Marmissolle avait coché la Diagonale des Fous sur sa « To Win List ». 3ème de l’édition 2021, le Basque avait même refusé une sélection en équipe de France pour les Championnats du Monde de trail en Thaïlande pour être présent à La Réunion.
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Beñat Marmissolle et Jean-Philippe Tschumi, le mano a mano
Aux avants-postes dès le début de la course, Beñat Marmissolle a fait une partie de la nuit en tête. Il a ensuite été rejoint après le col du Taïbit, au km 70, par le Suisse Jean-Philippe Tschumi, meilleur index ITRA du plateau, mais qui n’a jamais terminé une Diagonale. Les 2 hommes pointaient ensemble à Grand Place, au 100e kilomètre, après 14 heures de course.
Derrière eux, un trio de chasse composé de Maxime Cazajous, Germain Grangier et Ben Dhiman pointait à 35 minutes. L’Américain Ben Dhiman, 35e de la Diagonale en 2018, auteur de très belles performances en 2021 avec une 2e du Grand Raid des Pyrénées et à l’Ultra-Race de la Maxi-Race, était tout en gestion de course. Tout comme Germain Grangier, très concentré sur son objectif. Quant à Maxime Cazajous, 4e du Grand Raid 2019, il avait réalisé une bonne première partie de course mais il s’était égaré dans la nuit aux environs de Notre Dame, perdant un gros quart d’heure.
Diagonale des Fous 2022 : des abandons de favoris en cascade
Si la course était au départ très ouverte, avec une dizaine de concurrents capables de s’imposer, les premières heures ont entraîné une cascade d’abandons inattendus. Premier super favori à avoir jeté l’éponge, Grégoire Curmer, vainqueur de l’édition 2019. Victime d’une douleur au psoas et épuisé, il a rendu son dossard dans la nuit, après 52 km de course. Second grand favori, Daniel Jung, tenant du titre, vainqueur ex-aequo avec Ludovic Pommeret, abandonnait après 69km de course. Blessé au dos avant la course, il pensait pouvoir tenir le coup mais a dû se rendre à l’évidence : il n’était pas suffisamment remis pour aller au bout.
Très attendu également, le Réunionnais David Hauss pouvait prétendre au podium. Mais alors qu’il était dans le groupe de tête avec 10 coureurs, une erreur de parcours lui a fait perdre du temps et l’a sorti de sa course. Énervé, mentalement touché, il a abandonné peu après à la mi-course, au début du sentier du Taïbit, après 80 kilomètres. Dernier grand favori disparu trop tôt, le Corse Lambert Santelli, recordman du GR20, était 13e lorsqu’il a renoncé après 94 kilomètres de course, victime d’une grosse fatigue.
Diagonale des Fous 2022 : une fin de course palpitante
Dans Mafate, Beñat Marmissolle prenait les devant dans les montées, Jean-Philippe Tschumi revenait dans les descentes. Les 2 hommes poursuivaient leur mano a mano durant plusieurs dizaines de kilomètres, se parlant et se relayant régulièrement. À Deux Bras, à environ 42 kilomètres de l’arrivée, alors qu’il ne restait plus qu’un marathon de montagne à courir, il était impossible de faire un pronostic tant les 2 hommes semblaient déterminés à ne rien lâcher.
Au Chemin Ratinaud, au 130e kilomètre de course, les 2 hommes étaient toujours ensemble. Ils possédaient toujours une heure d’avance sur le premier poursuivants, Germain Grangier et Courtney Dauwalter, fantastique 4e.
Tschumi ou Marmissolle : suspense total
Pourtant, dans l’esprit de chacun des deux champions, un point du nouveau règlement ne cessait de clignoter : impossible d’arriver ensemble. En effet, en cas d’égalité, c’est le plus âgé qui est déclaré vainqueur. En l’occurence, 41 ans pour le Basque contre 40 pour le Suisse… Qui allait attaquer l’autre ? Et quand ? C’était la question qui allait animer toute la fin de course…
On pouvait s’attendre à une attaque dans le sentier de La Kalla, une terrible descente intervenant après après 8000m de D+ et 7000m de D-. Avec ses 400 mètres de D- sur 4 kilomètres, cette zone technique bourrée de racines nécessite en effet de savoir dompter la fatigue pour ne pas faire d’erreur fatale. Une zone idéale pour faire la différence. Mais les deux hommes l’ont descendue ensemble, comme s’ils avaient signé un pacte de non agression.
Même scénario dans le Chemin des Anglais, où aucun des 2 concurrents ne semblait vouloir ou prendre l’ascendant sur l’autre. Ou pouvoir le faire… Pourtant, à 8 kilomètres de l’arrivée, interrogés par des journalistes, Jean-Philippe Tschumi lâchait: “On s’est mis un petit peu d’accord, vous allez voir !”
Un finish à suspense, une victoire triomphale
Si la surprise fut à la hauteur du suspense, ce n’est pas celle que l’on attendait. Alors que l’on parlait déjà d’un sprint sur le Stade de la Redoute, c’est dans la dernière descente du Colorado que tout a basculé. Beñat Marmissolle a en effet réussi à distancer le Suisse, qui n’a pas pu le suivre. Le Basque a fini seul et franchi la ligne en 23h 14mn et 47s. Il devance Jean-Philippe Tschumi de moins de 5mn et 19s. “Beñat méritait cette victoire seul, c’est lui qui m’a permis de faire cette course”, a déclaré le Suisse, modeste, à l’arrivée. C’est l’Américain Ben Dihman qui termine à la 3e place, 1h et 6 mn après le vainqueur.
“C’était une course très dure mais très aboutie”, a expliqué Beñat Marmissole. “On ne l’a pas volée, on fait un super chrono. Bien sûr, en étant devant à 2, c’est plus facile.” Le Basque a reconnu que les 2 hommes avaient convenu de faire toutes les ascensions ensemble, et qu’après le Colorado, chacun ferait la dernière descente en donnant tout et que le plus frais l’emporterait.
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Diagonale des Fous 2022 : Courtney Dauwalter souveraine
Elle était peut-être un peu moins souriante que d’habitude, mais sans doute était-ce dû à une concentration extrême et une volonté de faire une performance. Coachée par un certain François D’Haene, son collègue de la team Salomon, elle a préparé méticuleusement cette course qu’elle découvrait et n’a rien laissé au hasard. Présentée comme ultra-favorite, elle a bien géré cette pression qu’il fallait accepter. Tout comme sa rivalité annoncée avec Anne-Lise Rousset, détentrice du recordwoman du GR20 en Corse en juin dernier et autre favorite.
Partie dans le groupe de tête, Courtney Dauwalter a parfaitement géré sa nuit et s’est même hissée à un moment en 3e position, dépassant Maxime Cazajous et Germain Grangier dans la sortie de Cilaos avant d’être reprise. Si une chute violente dans Cilaos a fait craindre pour son genou, elle a su gérer sa blessure au genou. Elle pointait ainsi à la 6e place, à 3 minutes du trio de chasse, donc 40 minutes seulement de la tête de course après 100 km ! Elle menait alors largement la course féminine devant Anne-Lise Rousset, qui accusait plus d’1h30 de retard au 100e km, et l’Américaine Sabrina Stanley.
Historique : Courtney Dauwalter au pied du podium !
Après avoir repris Cazajous après 110km, l’Américaine revenait même sur Germain Grangier et se hissait à la 4e place après 120km de course. Dans la foulée, elle rattrapait Ben Dhiman, dans le dur physiquement, et se hissait sur le podium provisoire. Et elle n’était qu’à une heure des 2 leaders ! Une première dans un ultra de cette envergure. Mais alors qu’on commençait à rêver d’un podium pour elle, il restait encore la terrible montée de Dos d’Âne, véritable juge de paix de la fin de course.
Rattrapée par Germain Grangier, Courtney Dauwalter allait ensuite voir revenir un Ben Dhiman requinqué. Dans un ultime effort, elle allait reprendre le Français pour terminer finalement à une historique 4e place. Un véritable exploit sur un ultra aussi relevé, avec 2 heures de moins que ,le temps de référence féminin. Après la prouesse de son arrivée à peine 2 heures après François D’Haene sur l’UTMB en 2021, elle confirme son immense talent et relance le débat : un jour prochain, une femme pourra finir devant un homme sur un ultra de premier plan.
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